La série noire (et folio policier ensuite en poche), éditent deux séries de l’Irlandais Ken Bruen. La première, R&B est noire et très drôle. Elle a pour personnages principaux deux flics londoniens affreux (machistes, limite ripoux, violents, grossiers, racistes … et j’en passe). Le seconde se situe à Galway, et met en scène Jack Taylor, ancien Guarda (police irlandaise) viré pour alcoolisme (ce qui est un exploit), qui s’est reconverti en privé. Elle est noire et … très sombre.
Le Dramaturge est le quatrième roman de la série Jack Taylor. Jack est en train de s’acheter une conduite : il ne boit plus, ne se drogue plus, et envisage même d’arrêter de fumer. Heureusement il lui reste la lecture, et l’amitié de Jeff et Cathy. C’est justement Cathy qui va le mettre sur une nouvelle affaire. Elle lui demande d’aller voir son ex dealer en prison. Celui-ci est persuadé que sa sœur, trouvé morte au bas d’un escalier, a été tuée, et demande à Jack de mener une petite enquête. Quelques jours plus tard c’est Jeff qui le supplie d’aider un copain, soupçonné à tord de pédophilie. Il craint par dessus tout une milice de « bons citoyens » qui a commencé à sévir à Galway. Comme toujours, Jack va tout faire à l’envers …
Ce roman va encore plus loin dans la noirceur. Et comme Ken Bruen est un grand auteur, ça laisse des traces. Que le lecteur le sache avant de s’y plonger dans un moment de déprime. Tout se ligue pour faire replonger Jack dans son cycle autodestructeur. Une Irlande qui se rue dans la « modernité », perdant toute trace de culture ; des citoyens perdus, qui réagissent, pour certains, de la pire manière ; un contexte international qui ne prête guère à rire, avec Bush fils qui entame sa guerre … Ajoutez là-dessus les enquêtes qui le mettent en contact avec ce que l’humain a de plus sombre, et lui révèlent sa propre part d’ombre. Quelques réflexions acerbes de Jack, ses joies littéraires, une description de pub, un moment de grâce avec une femme, ou une gamine, peuvent par moment, laisser percer une lueur d’espoir. Puis, sèchement, Ken Bruen achève son personnage et son lecteur. Sans pitié. Un grand roman, qui secoue.
Je crois que je vais lire quelques bibliothèques roses, le temps de me remettre.