Deuxième (et dernière) fiche n’ayant pas pu se caser dans le DILIPO :
Tristan Egolf est né en 1971 en Europe, où il vit ses premières années avec ses parents qui sont écrivain et peintre. Quand ils divorcent, il suit sa mère et son nouveau mari à Washington D.C puis à Louisville, dans le comté très rural de Lancaster, où il vit entre onze et dix-huit ans. Il rentre alors à la Temple University à Philadelphia qu’il quitte au bout de deux semestres, une expérience qu’il considère comme une pure perte de temps. Il exerce alors toutes sortes de petits boulots, puis décide d’aller à Paris.
Il commence alors à écrire son premier roman, Le seigneur des porcheries (Lord of the Barnyard, 1998), et gagne sa vie en jouant de la musique dans un pub irlandais, et sur le Pont des Arts. C’est là que la fille de Patrick Modiano le rencontre, et, apprenant qu’il écrit, le présente à sa famille qui le prend sous son aile, et le soutient tout au long des dix-huit mois que dure la rédaction de ce premier roman. Il retourne alors aux USA, où il ne trouve pas d’éditeur, quand Patrick Modiano l’appelle : Gallimard accepte de le traduire et de le publier. La publication en anglais ne viendra qu’après. Il vit ensuite à New York, cadre de son second roman. Il se suicide en 2005.
Le seigneur des porcheries raconte l’histoire de John Kaltenbrunner, jeune homme qui bouleversa la petite ville de Baker dans la Corn Belt. Tout jeune, John s'avère différent, ce qui dans cette petite ville obscurantiste, peuplée d'alcooliques bas de front et de fanatiques religieux plus ou moins pervers, est très mal vu. L'issue est inévitable, à 16 ans, dans une explosion de haine, il brûle sa ferme, déclare la guerre à la ville et finit en prison. Trois ans plus tard, il revient, bien décidé à reprendre sa place à Baker, où tout le monde l'a oublié. Il effectue les boulots les plus durs et les plus sales, avec l'efficacité et l'intelligence redoutables qui ont toujours été les siennes. Jusqu'à ce qu'il finisse chez les éboueurs, derniers des derniers à Baker. Révolté par leurs conditions de travail, et l’attitude des habitants envers eux, il les organise pour faire valoir leurs droits à une vie ayant un semblant de dignité, et déclenche une grève qui aura des conséquences dramatiques. Ce premier roman frappe par sa richesse, son ambition, la violence de sa charge contre les habitants de cette petite ville raciste, obscurantiste et haineuse, et la puissance de ses descriptions. Ces tableaux pleins de bruit, de fureur, d’odeurs, de sensations, d’émotions, culminent en deux ou trois occasions, lors de catastrophes qui emportent tout, personnages comme lecteur.
Une puissance que l’on retrouve dans son second roman, Violon et jupons (Skirt and the fiddle, 2002). Charlie Evans est violoniste, classique. Le syndicat des musiciens l'envoie à un concert en costume, et à sa grande surprise, lorsqu'il arrive il trouve un public d'abrutis racistes complètement saouls, venus voir un groupe punk allemand particulièrement violent. Circonstance aggravante, Charlie est métis. Il se fait copieusement insulter et menacer, le concert est un cauchemar total. En partant, il jette son violon, abandonne la musique et part dans un hôtel minable, retrouver son ami l'Anarchiste, fainéant fort en gueule, toujours plein de projets totalement irréalisables. Après avoir gagné une petite fortune en allant massacrer des rats dans les égouts, les deux compères prennent une cuite magistrale, et se réveillent dans la chambre d'un hôtel cinq étoiles, en compagnie d'une femme superbe. Les aventures ne font que commencer. Ici aussi, le lecteur éberlué se demande où va l'auteur, pour oublier immédiatement la question, submergé par le maelström. Egolf confirme son talent pour décrire des moments cataclysmiques, où le chaos va crescendo, dévastateur, jusqu'à l'apothéose.