Mary Gentle aime revisiter l’histoire. Après le Moyen Age sanglant du magistral Livre de Cendres, voici le début du XVII siècle de L’énigme du cadran solaire :
Valentin Raoul Rochefort est l’homme de Sully. Marie de Médicis lui ayant prouvé qu’elle pouvait faire assassiner son protecteur quand elle voulait, il accepte d’organiser l’assassinat d’Henry VI. Il choisit volontairement un illuminé qui a peu de chance de réussir. Ravaillac. Pendant ce temps, en Angleterre Robert Fludd arrive à calculer ce que l’avenir prépare. Il sait que pour éviter l’anéantissement de la Terre dans cinq siècles, il faut absolument, dès aujourd’hui, infléchir l’avenir du royaume pour avancer la révolution industrielle. Pour cela, il faut que le roi Jacques Stuart soit assassiné, et que son fils lui succède. Il a aussi calculé que l’homme idéal pour le rôle est un français, Valentin Raoul Rochefort …
Mary Gentle passe au XVII avec ce roman d’aventure, de cape et épée, à la Dumas (le personnage central n’étant autre que l’affreux Rochefort, adversaire juré de nos mousquetaires préférés). C’est déjà un excellent roman de genre, avec tous les ingrédients (complots, duels, batailles, reconstitution historique …). Mais c’est aussi un roman d’amour avec des personnages plus « modernes », non dans leur nature, mais dans la liberté que prend l’auteur dans ses descriptions beaucoup plus crues des scènes d’amour et de sexe. Et puis il y a la touche Mary Gentle, avec quelques éléments de SF qui viennent pimenter le roman, lui apporter une touche originale et piquer la curiosité du lecteur.
Une très belle réussite une fois de plus, qui, paradoxalement, est un peu décevante. J’explique. D’un autre auteur, je n’aurais eu aucune restriction. Mais il y a le Livre de Cendres. Quatre tomes de fantazy qui, subtilement, intelligemment, deviennent de la SF. Une histoire ébouriffante, du suspense, de l’action, du souffle, des batailles, du sang et des larmes, de l’émotion, et peu à peu, cette trame SF qui arrive, et qu’elle résout magnifiquement alors qu’on se demande bien comment elle va pouvoir s’en tirer. On retrouve ici le talent de conteuse dans la partie historique, et dans la construction des personnages. Le piment SF est aussi là, mais moins époustouflant, plus « classique ».
Excellent donc, mais quand même un peu décevant car on l’attendait géniale. Coïncidence amusante, avec les Lames du Cardinal, de Pierre Pével, les bretteurs pimentés SF et fantazy sont à la mode. Et c’est tant mieux.
Mary Gentle / L’énigme du cadran solaire Tomes 1/2 et 2/2 (Denoël/Lunes d’encre, 2007).