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7 mai 2008 3 07 /05 /mai /2008 23:56

Un peu partout dans la presse, les hommages fleurissent. Ils ne varient guère d’un journal à l’autre. Ils attirent, partout sur les sites, une majorité de commentaires chaleureux, émus, malheureux de lecteurs désolés et reconnaissants. Et leurs scories de commentaires imbéciles de grincheux minables qui critiquent sans avoir lu sous prétexte que l’homme était trop de gauche, trop anar, trop populaire … C’est inévitable, et méprisable. Ils attirent aussi leur lot de commentaires tout aussi grincheux et idiots qui prennent prétexte de ce malheur pour déclarer que le polar français est maintenant mort, et que tous les autres font de la merde. Je n’invente rien, j’en ai lu.

Vous trouverez tout seul ces hommages sur les sites des journaux. Je vous signalerai si, ici ou là, apparaît un texte plus personnel qui sorte un peu de ce minimum syndical au demeurant respectable.

N‘ayant jamais croisé Fajardie, je vais juste revenir sur mes impressions de lecteur.

 

La première, la plus évidente pour moi, est qu’il me ramenait au temps magique de mes lectures d’enfance et d’adolescence, qu’il me faisait retrouver mon émerveillement de môme devant les exploits de d’Artagnan, d’Ivanhoé ou du dernier des Mohicans. Ses personnages sont plus grands, plus beaux, plus romantiques, plus forts, plus fidèles, plus amoureux, plus intelligents, plus élégants, plus impitoyables, plus nobles … Ce sont de vrais héros. Et quoi de plus difficile que de camper un vrai héros, un chevalier blanc avec armure étincelante, panache et belle dame, sans se casser la gueule, sans prêter à sourire, sans tomber dans la caricature.

 

Fajardie y arrivait. Qu’ils soient flics (avec la série Padovani), anciens militaires désoeuvrés (La nuit des chats bottés, Brouillards d’automne), chevaux de course (Sous le regard des élégantes), ou chien de résistants (Des lendemains enchanteurs), les personnages de Fajardie sont tous la déclinaison du héros, paladin des temps moderne, défenseur des pauvres et des opprimés, pourfendeurs de méchants, de médiocres, d’oppresseurs et de cons. Et ça fait un bien fou. Parce qu’ils nous vengent. Avec élégance et panache ils balancent des grands coups de tatane dans les burnes des cons, médiocres, affreux, sales et méchants qui nous pourrissent la vie, à nous et surtout aux plus faibles.

Fajardie faisait de la vraie littérature populaire (et surtout pas populiste), intelligente, généreuse, élégante. Il la

faisait à fond, au premier degré, sans jamais se moquer ni du lecteur ni du genre. Comme ses personnages son style était, en premier lieu, élégant. Ensuite, comme ses héros, vif, efficace, au besoin implacable.

 

Au moment où je redécouvre le cinéma d’aventure avec mes gamins, le lien me semble évident. Fajardie pour moi c’est Errol Flynn dans Robin des Bois, Jean Marais dans Le capitan, Gérard Philippe dans Fanfan la tulipe, Gary Cooper dans Vera Cruz, Tyrone Power dans le Cygne noir. Biger than life comme ils disent de l’autre côté de l’Atlantique. C’est marrant, je voulais dire les héros de Fajardie, et j’ai écrit Fajardie. Parce qu’on sent tant d’amour, de rage et de sincérité dans ce qu’il écrivait qu’on imagine mal qu’il ait pu être très différent de ses personnages.

C’est tellement dommage que dans la vie il y ait si peu de personnages fajardiens. Les héros bien entendu, les autres, les cons, il y en a pléthore.

 

Il avait aussi un côté plus sombre, plus polar classique, dans lequel il excellait également, Gentil Faty en est peut-être le meilleur exemple. Mais ce n’est pas cela que je garderai de lui. Si je ne gade qu’une image en tête, ce sera celle de Steph et Paul faisant sauter le Sacré Cœur pour l’amour de Jeanne.

 

Et bien entendu, Fajardie était de gauche, la vraie, pas la rose saumon. Sa Chronique d’une liquidation politique est un réquisitoire implacable contre la destruction de la gauche par Mitterrand. Au-delà de cet engagement et de ses écrits politiques tous ceux qui ont gardé un tout petit peu de leur fraîcheur de minot, peuvent se retrouver dans Padovani, Steph, Paul, Tanz et les autres.

Un très bel article, très loin des nécros citées ci-dessus, sur le blog de Bastien Bonnefous.

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commentaires

K
J'aimais beaucoup les nouvelles de Frédéric. Je lisais cette littérature élégante dans les plaines tranquilles et je me sentais à l'abri de tout aux contreforts du monde. Puis j'ai lu ses romans qui dressaient un tableau explosif et furieux de la vie et j'ai compris qu'on allait vers des dérèglements incontrôlables et barbares. Il n'y avait rien de glaçant pourtant. Que de l'élégance, du non renoncement, des idées et la volonté de s'y tenir fièrement. <br /> Les nouvelles de Frédéric c'étaient les livres des songes rêvés. Des rêves à rallonges. Je pensais que cela ne s'arrêterait jamais.
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  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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