Mettez dans un hôtel de luxe : Du personnel sous et mal traité, un congrès d’écrivains de polars, un opposant africain combattant le néocolonialisme, un tueur à gage qui doit le descendre mais n’a pas encore identifié sa cible, un détective ancien membre des services secrets persuadé qu’il y a un complot d’écologistes à l’échelle mondiale, quelques syndicalistes tentant d’organiser les travailleurs exploités, et pour finir, l’assemblée générale annuelle du grand groupe qui possède l’hôtel. Ajoutez à cela qu’une partie de l’hôtel, condamnée, est utilisée comme centre de détention pour des sans papiers en attente d’expulsion. Agitez, et attendez que ça pète. Puis consommez chaud, très chaud.
Le format suite noire (une centaine de pages) est ici parfaitement exploité par Laurence Biberfeld, qui, en peu de pages, arrive à planter autant de personnages extravagants, croquer un auteur de polar alcolo (non ? si !) et haut en couleurs, dézinguer un tueur à gages ridicule et un détective d’hôtel abruti, dénoncer l’exploitation de l’Afrique par les grands groupes industriels, et des africains par des négriers bien implantés en France, démonter en trois phrases la rhétorique puante des actionnaires, décrire en deux chapitres l’humanité d’un groupe de femmes en grève …
Non contente de réaliser cet exploit sans jamais donner la sensation de trop charger la barque, elle nous fait même le plaisir de tout faire péter ! Le pied. Il fallait le faire, elle l’a fait. Merci Laurence.
Laurence Biberfeld / Un chouette petit blot , suite noire (2008).