1953, le jeune Pierce Duncan quitte la maison de ses parents et part découvrir l’Amérique en sautant à bord d’un train de marchandises. Il compte vivre, voyager, expérimenter, et accumuler du matériel pour devenir écrivain, comme Hemingway son modèle. Son voyage l’amènera de traumatismes en bonheurs, de chocs en rencontres magiques. Il sera prisonnier, ami d’un boxeur, ouvrier du bâtiment, et finalement privé à San Francisco …
La quatrième de couverture situe un peu l’auteur et son roman. Joe Gores est peu connu en France. Scénariste, romancier, il a en particulier écrit Hammet, le roman adapté au cinéma par Win Wenders. Privé est présenté comme un roman fortement autobiographique, et comme son chef-d’œuvre.
Il est facile d’imaginer que ce roman est fortement inspiré de sa jeunesse. Le qualificatif de chef-d’oeuvre est par contre largement exagéré.
La partie la plus réussie est justement la partie autobiographique. A la John Fante pour le fond, mais sans le génie de l’écriture dans la forme. Le témoignage sur une époque et ses mœurs, l’aventure de ce jeune homme, totalement libre d’attache, qui part sur les routes, ouvert à toutes les possibilités, la galerie des personnages croisés … c’est tout cela qui fait la richesse et l’intérêt du roman.
L’histoire rapportée pour essayer de faire de cette errance, de ce roman d’apprentissage, un polar qui finit par boucler est beaucoup moins réussie et apparaît nettement comme une pièce rapportée artificiellement. Certainement coïncidences sont un peu grosses, et on sent que certains événements ont été forcés, pas toujours avec bonheur, pour permettre de boucler l’histoire et relier les différents épisodes entre eux. Quand au style, il est assez plat, et, sans être criticable, ne justifie en aucun cas le qualificatif de chef d’oeuvre.
Au final, un roman à moitié réussit, qui aurait gagné à s’assumer plus ouvertement comme une autobiographie, un témoignage, sans chercher absolument à en faire un polar.
Joe Gores / Privé (Cases, 1999), Rivages Noir (2007). Traduction de l’américain par Guy Abadia.