La série du Trône de fer est très certainement une des plus riches, des plus originales et des plus intéressantes de la Fantasy actuelle. Loin des affrontements caricaturaux du Bien contre le Mal, à mille lieux des récits initiatiques qui voient l’inévitable jeune homme qui ne sait pas encore qu’il a du sang de roi découvrir ses pouvoir avant de sauver le monde, le Trône de Fer est un récit plein de fureur, de sang, de cris, de larmes, de trahisons, de grandeur …
Les personnages s’y débattent dans la boue et les tripes, les gentils d’un jour sont les immondes du lendemain, les alliances se font, se défont. On y trouve des fanatiques religieux, des opportunistes, quelques (rares) idéalistes, des forts qui abusent de leur force, et des faibles qui, comme toujours et partout, paient les pots cassés.
George Martin réussit l’exploit d’arriver à ces épisodes 10 et 11 sans jamais faiblir, et sans non plus laisser entrevoir l’ombre d’une fin. C’est dire la richesse extraordinaire de cette saga, où l’on suit simultanément quelques dizaines de personnages, et où, surtout, le lecteur ne peut se raccrocher à aucune certitude : Le héros d’un chapitre n’est pas du tout assuré d’arriver au bout de la course, il peut très bien être abattu, brutalement, au détour d’une page, comme n’importe quel personnage secondaire. Certains survivent alors que l’on ne donnait pas cher de leur peau, d’autres en apparence indestructibles ne passent pas quelques chapitres.
Pas de facilités, pas de gentillesse pour le lecteur, dans Le trône de fer quand le gentil jeune homme affronte un sombre brute habituée à se battre … il finit découpé en rondelles.
Incertitude, surprise constante, richesse de l’intrigue et surtout, ampleur de la fresque qui dénote une imagination époustouflante alliée à une rigueur implacable qui permet à l’auteur, et à son heureux lecteur, de ne jamais se perdre.
Vraiment, je ne vois aucun équivalent à ce monument en construction. Le seul reproche que l’on puisse lui faire est le pendant inévitable à ses qualités : quand on reprend un épisode, quelques mois après le précédent, on a parfois un peu de mal à se souvenir de tout ce qui c’est passé auparavant, et de bien remettre qui est qui. Mais cet obstacle passé, on en redemande.
Il est quasiment impossible de résumer les volumes 10 et 11, surtout à des lecteurs qui n’auraient pas les 9 précédents en tête. Sachez seulement que si vous recherchez une série de fantasy riche, adulte, méchante, héroïque, humaine, enthousiasmante, plus sombre que le plus noir des polar, avec des guerres, des trahisons, des amours, des grands gestes, des horreurs, du souffle, des paysages … et un peu de Trouille avec les Autres qui rodent quelques part dans l’ombre, une seule adresse, Le Trône de Fer.
George R. R. Martin / Le Chaos (Le trône de fer 10) et Les sables de Dorne (Le trône de fer 11) (A feast for crows, 2005), J’ai Lu (2007), traduit de l’américain par Jean Sola.
PS. Je crois que ça y est, le 12 est sorti en poche.