On l’attendait, voici le nouveau volume de la collection Rivages/Casterman/Noir qui met en BD les grands classique du polar. Jean-Hugues Oppel et Joe G. Pinelli adaptent Trouille de Marc Behm. C’est, de mon point de vue, la plus belle réussite de la collection avec l’adaptation de Jim Thompson.
Depuis l’âge de onze ans, ou presque, Joe Egan fuit. Depuis qu’il l’a croisée. Elle était très belle, toute vêtue de noir. Elle venait chercher monsieur Morgan, mort des suites d’une chute de cheval. Joe n’a pas compris tout de suite, mais dès qu’il a su qui était cette femme, il a commencé à fuir. Il vit de son talent pour les cartes. Et dès qu’il l’aperçoit dans les parages il change de ville, de pays, et même de nom. Mais il sait aussi, au fond de lui, qu’il ne pourra pas lui échapper éternellement.
Trouille est un de ces romans inclassables de Marc Behm. Inclassable, mais pas inadaptable, comme le prouvent avec un brio époustouflant Jean-Hugues Oppel au scénario et Joe G. Pinelli au crayons.
Oppel a su épuré jusqu’à l’extrême, ne garder que quelques phrases, quelques indications, pour ponctuer la fuite de Joe Egan. En grand connaisseur du cinéma, il a capté l’essence du mouvement du roman de Behm, son sens de la vitesse, du flou, de la fuite.
Et dans cette œuvre, il est associé à un partenaire idéal en la personne de Joe G. Pinelli qui, lui aussi, joue sur le flou, le trait et la couleur estompés, la vitesse, l’absence de cadre. Tout donne l’impression de la fuite en avant, de la course, sans aucun point d’arrêt, sans cadre entre les cases (d’ailleurs, il n’y a pas de cases, il n’y a que des pages).
Le récit coule, d’une fluidité totale. L’adaptation est magnifique, parfois lumineuse, souvent sombre, toujours implacable, comme le roman. Une réussite totale.
Marc Behm , Jean-Hugues Oppel (scénario), Joe G. Pinelli (dessin) / Trouille, Rivages/Casterman/Noir (2009).