« Je viens de tuer ma mère ». Ainsi commence Saint Remède de l’uruguayen Rafael Courtoisie.
Pablo Green, le narrateur, est un jeune homme sans boulot qui vit chez sa mère. Qu’il vient de tuer donc. Pour abréger ses souffrances, car elle était atteinte d’un cancer. Le problème, c’est que ce meurtre va en entraîner bien d’autres … Le voisin du dessus qui joue de la trompette la nuit, la voyante qui insiste pour voir sa mère, le concierge qui crie tout le temps et bat sa femme … Tout cela dans un pays qui sombre peu à peu dans le chaos ; un chaos que les militaires mettent à profit pour reprendre le pouvoir.
Voilà un roman qui me laisse perplexe. Le début est brillant. Dans sa forme, dans ses dialogues souvent très drôles, dans l’absurdité des situations. On rit souvent. De la cupidité des arnaqueurs qui profitaient de la maladie de Mme Green ; des réflexions de Pablo, tellement au premier degré qu’elles en deviennent décalées, au point qu’on ne sait plus s’il est un peu niais ou s’il se fout du monde ; de la mise en place de la dictature militaire, décrite sous le mode du grotesque …
Puis, on commence à se demander comment l’auteur va conclure, vers où il va. Et là on passe à autre chose.
Je suis prêt à accepter tout postulat, tout développement, tant que je sens la cohérence de l’auteur et de son univers. Là il doit bien y en avoir une, mais je ne l’ai pas vue.
L’impression que donne la fin est que l’auteur, ne sachant plus comment s’en sortir, a pris le parti d’écrire tout ce qui lui passait par la tête, tout ce qui lui faisait plaisir, sans plus se soucier, justement, de cohérence. Il multiplie les tours de passe-passe, en appelle aux grands anciens (pourquoi pas), intervient directement dans le roman (ce qu’il ne faisait pas du tout au début), et termine en queue de poisson.
Du coup, je suis perplexe, et j’aimerais bien savoir ce qu’en pensent d’autres lecteurs.
Rafael Courtoisie / Saint Remède, (Santo Remedio, 2006) L’atinoir (2009), traduit de l’espagnol (Uruguay) par Jacques Aubergy.