L’autre jour je traîne dans une librairie (oui, je traîne davantage dans les librairies que dans les magasins de chaussures ou chez les coiffeurs …) et que vois-je ?
Une couverture de BD, de toute évidence d’Hugo Pratt, que je ne connais pas. Je m’approche, quasi certain que c’est juste un nouvel emballage pour un vieux machin que j’ai déjà, et là je vois le titre et je tombe sur le cul (l’expression est peu élégante, mais elle a l’avantage de décrire parfaitement ma surprise).
Car que vois-je ? La BD s’appelle … Sandokan !
Fébrile, je veux ouvrir le bouquin prêt à découvrir une vile supercherie commerciale, pas de bol, ils sont tous emplastiqués. Je râle, je cherche, je peste et je finis par en trouver un ouvert.
J’ouvre. Il n’y a pas tromperie sur la marchandise. Hugo Pratt avait commencé une adaptation du légendaire Sandokan, puis, dépassé par le succès de Corto, son nouveau personnage, il avait laissé les planches dans un carton, où on vient juste de les retrouver.
La BD n’est pas complète. Il en manque un bon tiers. C’est dommage bien entendu, mais c’est tellement mieux que rien.
On s’aperçoit qu’avant même le premier Corto, Hugo Pratt était déjà maltesien si l’on peut dire. Son Sandokan a des airs de Grand Diable, la Perle de Luan ressemble furieusement à certaines femmes de la vie de Corto. Et surtout, son trait est là, magique, qui fait de chaque case un tableau qu’on ne se lasse pas de contempler.
Et puis, à posteriori, c’est d’une telle évidence, Sandokan adapté par Pratt, qu’on se trouve étonné de ne pas y avoir pensé. Quoi de plus Cortien que la rébellion et le panache de Sandoka, le flegme de Yañez, et surtout l’amour fou entre Sandokan et la filleule de son ennemi ? Tout concourt à ce que ce soit un chef d’œuvre. C’en est un, inachevé.
Ce sont peut-être les plus beaux …