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4 octobre 2009 7 04 /10 /octobre /2009 21:52

Je connaissais le Camilleri exubérant de l’incontournable série Montalbano, et le Camilleri picaresque des romans historiques. Le tailleur gris m’a fait découvrir un Andrea Camilleri tout en retenue et en nuances.

 

Aujourd’hui est un jour particulier. C’est le premier jour de la retraite. Un jour qui laisse ce directeur de banque sicilien totalement désemparé. Et Adele, sa très jeune et très belle épouse bien embêtée. Adele que le lecteur découvre peu à peu. Très à cheval sur les principes et la respectabilité en public, totalement dépourvue de morale et de limites en privé, elle a depuis peu imposé son jeune amant à son époux vieillissant qui ne peut la satisfaire, loin s’en faut. Dès le lendemain, Adele, grâce à ses relations, trouve un nouveau travail à son mari … qui découvre le même jour qu’il est gravement malade.

 

Le lecteur découvre ici  un Camilleri intimiste et sobre qu’il ne pouvait soupçonner à la lecture des romans précédents. La langue camillerienne est là, avec ses expressions savoureuses, mais elle est épurée et assourdie. La rogne, l’énergie rageuse de Montalbano sont remplacées par le flegme de ce personnage, capable de louvoyer entre sa fidélité à sa banque et les impératifs d’une économie obligée de composer avec la mafia. Un personnage discret, efficace, prudent, qui ne s’intéresse qu’à son travail, et considère toutes les menues attentions que veut bien lui prodiguer sa femme comme des cadeaux qu’il mérite à peine.

 

On sort peu dans ce roman, pas de soleil, pas de mer, pas de cuisine, pas d’odeurs … Tout est enfermé, feutré. Pas de bruit, pas de cris, pas de grandes scènes, tout passe par des non dits. Une façon magistrale et tout en nuances de rendre l’hypocrisie d’une bourgeoisie qui tient aux apparences alors qu’elle est sous la coupe de truands. Une bourgeoisie qui cache ses secrets, ses drames, ses fantasmes et ses compromissions.

Et tout ça au travers des derniers jours d’un homme discret, et en moins de cent cinquante pages. Magistral.

 

Andrea Camilleri / Le tailleur gris, (Il tailleur grigio, 2008) Métailié (2009), traduit de l’italien par Serge Quadruppani.

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commentaires

C
<br /> Tout comme toi JML j'ai beaucoup apprécié ce roman qui est très surprenant. Sur la forme d'abord, très épurée, et sur le personnage d'Adèle (si je ne me trompe pas sur le prénom) dont le caractère<br /> n'est jamais simple.<br /> <br /> Par contre j'émets une réserve supplémentaire sur le fiat que si on lit du Camilleri c'est aussi pour sa langue truculente et son humour très fin or ici on ne voit les deux que très peu.<br /> Personnellement je préfère lorsqu'il met en scène Montalbano.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> C'est vrai qu'on n'a pas la bande à Montalbano. Et je comprends qu'on le préfère. J'ai surtout aimer découvrir une facette de plus du talent de Camilleri, et sa retenue sur ce roman ne me rendra le<br /> prochain Montalbano que plus délectable.<br /> <br /> <br />
H
<br /> Je viens de le terminer et je tombe sur ta chronique, qui correspond beaucoup à ce que j'en ai pensé.<br /> J'écris ma chronique rapidement en essayant de ne pas trop "copier" (j'aurai peut-être pas du lire celle-ci avant d'écrire la mienne d'ailleurs).<br /> <br /> <br />
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J
<br /> C'est vrai que c'est parfois difficile de dire quelque chose d'original quand on est face à des romans aussi "évidents", limpides.<br /> <br /> <br />
M
<br /> Je suis très curieuse de lire un Camilleri intimiste! J'ai bien envie de me plonger dans cette histoire! J'ai bien aimé cet auteur jusqu'ici!<br /> <br /> <br />
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J
<br /> Il ne devrait pas vous décevoir dans ce dernier roman. Vous surprendre peut-être, mais pas vous décevoir.<br /> <br /> <br />
J
<br /> je l'ai bientôt fini, et une fois de plus, complètement d'accord avec toi.<br /> <br /> <br />
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J
<br /> On va finir par ne faire qu'un seul blog ...<br /> <br /> <br />

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  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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