Je n’avais encore jamais lu de roman de Michel Embareck, bien que j’aie souvent vu passer des avis sur ses polars. Une lacune comblée avec la lecture d’Avis d’obsèques.
Saproville-sur-mer, petite ville de province, sa presse locale à la botte de la mairie, ses notables, ses gendarmes, ses flics. Calme et un peu moisie tout au long de l’année. Mais ce matin, réveil brutal, le patron du canard régional est retrouvé abattu d’une balle dans la tête à l’entrée du jardin public des quartiers chics. L’occasion pour la justice et les flics de mettre leur nez dans un mini-empire de presse mégalomane au bord de la ruine. L’occasion aussi pour le patriarche de reprendre les choses en main. Dans le même temps, Victor Boudreaux, privé aux méthodes expéditives, enquête sur une affaire de vol d’objetS sacrés dans les églises du coin. Tout cela va remuer l’eau sale, et faire remonter la boue d’une histoire locale pas toujours aussi nette qu’il y semble.
Je suis partagé sur ce roman.
Sur l’écriture pour commencer. Force est de lui reconnaître une vraie verve, et une certaine énergie. Mais je ne peux m’empêcher de penser également à cette phrase du grand Elmore Leonard « Si ça a l’air écrit, je réécris ». Et j’avoue que face au recours systématique au dialogue qui tue à la « tonton flingueur », parfois je souris, d’autre fois je m’agace et je me dis que ça à l’air très écrit, très très écrit même …
Personnages … A part Boudreaux, intéressant et attachant dans sa démesure, pour les autres l’auteur est plus un caricaturiste qu’une peintre. Trois traits, pif paf, le bonhomme est croqué dans ses défauts ou ses manies. C’est efficace, souvent drôle et cruel, mais ça laisse quand même le lecteur assez loin par manque de chair et de profondeur. Sur un texte court c’est drôle, sur un roman, il me manque une dimension.
L’enquête avance de façon vive là aussi, et on la suit avec intérêt, mais je n’ai pas pu m’empêcher de penser que le lien entre les deux enquêtes était un peu artificiel, et surtout dû à l’envie de l’auteur de remettre en scène son personnage de Boudreaux.
Reste le fond, peut-être le plus intéressant du roman avec son autopsie des liens entre presse, monde économique et politique locale dans un monde en plein changement où tout ce qui peut être rentable est la proie de charognards internationaux, même les bons vieux journaux limités aux rubriques nécrologiques, concours de la plus grosse … tomate et louanges aux équipes dirigeantes en place. Cela et la mise à plat des petites et grosses saloperies de toute petite ville et de ses notables si respectables.
En résumé, malgré ses défauts (pas rédhibitoires), un polar qui se lit aisément, intéressant sans être le choc de la rentrée, et qui enchantera les amateurs de bons mots.
Michel Embareck / Avis d’obsèques, L’archipel (2013).