Donc voilà. Cela fait plusieurs jours que je rame sur Le chasseur solitaire de Whitney Terrell. C’est un peu la faute du bouquin, un peu la faute à pas de chance. Commençons par dire de quoi ça cause …
Habituellement, ce sont des cadavres de jeunes noirs que l’on récupère dans le Missouri en aval de Kansas City. Victimes de guerres de gangs ou de règlements de compte entre trafiquants de drogue. Ce jour là, c’est Clarissa Sayers, fille du juge, que Stan Granger sort de l’eau. Dernièrement Clarissa avait une liaison avec Booker, un jeune noir arrivé récemment, qui semblait avoir des comptes à régler avec quelques notables de la ville. Stan ne croit pas à la culpabilité du jeune homme. Mais pour la police, pas de doute, le coupable est tout trouvé. D’autant plus qu’il a disparu juste après la mort de la jeune femme.
J’ai été plusieurs fois à deux doigts d’abandonner, et pourtant j’ai continué et je suis allé au bout. Pour la peinture de Kansas City, ville qui semble figée dans le passé, et en particulier dans un passé où noirs et blancs étaient clairement séparés. La description de cette bourgeoisie qui tente désespérément de vivre « comme avant » est particulièrement réussie. Le fossé racial est dépeint de façon fine mais néanmoins très efficace. Et pour quelques fulgurances, quelques moments où le récit accroche, rapproche d’un personnage ou d’un autre, permet de comprendre ses failles.
Mais que j’ai ramé ! Pour une raison extérieure au bouquin, parce que je l’ai lu à un moment où j’étais un peu débordé, dans l’impossibilité de me mettre à lire avant très tard le soir, et fatigué, donc moins disponible.
Mais aussi parce que c’est un bouquin très lent, qui ne m’a pas donné cette envie de m’y replonger en permanence, dans les embouteillages, en attendant que les pâtes cuisent, aux c… Bref vous m’avez compris, il y a des livres qui semblent vous coller aux doigts et que vous ouvrez dès que vous avez 10 secondes. Pas celui-ci.
Parce que j’ai eu du mal à m’intéresser complètement aux personnages. J’ai été accroché, par moment, puis relâché, avec l’impression d’être laissé sur le bord de la route.
Et aussi et surtout à cause du rythme. J’aime qu’il y ait des respirations dans le texte. Elles viennent souvent des dialogues. Pas seulement. Changement de points de vue, de personnages, de lieu, de tempo … Là elles manquent. D’un point de vue très terre à terre, vous ouvrez une page, elle est noire, un bloc. Pas un retour à la ligne, pas un saut de paragraphe … Juste ce que je n’aime pas, et qui en plus est tombé à un moment où j’étais moins disponible.
Voilà pourquoi j’ai ramé, mais aussi pourquoi je suis allé au bout. Je suis preneur d’autres avis. Comme toujours. Et encore plus que d’habitude.
Whitney Terrell / Le chasseur solitaire (The huntsman, 2001), Rivages/Thriller (2010), Traduit de l’américain par Jean-Paul Gratias.