Revoilà Ingrid Astier apparue à la série noire il y a quelques années avec Quai des enfers. Revoilà la Seine, Paris. C’est dans Angle mort, et je reste sur la même impression que dans le premier roman. Exactement la même.
On retrouve les flics de Quai des enfers. Côté pile. Et côté face c’est Diego, un braqueur, un fantôme. Jamais attrapé, jamais entrevu par les flics. Diego qui file sans laisser de traces, qui tue sans état d’âme, mais qui a un point d’ancrage, la famille. Son frère et complice Archi, et sa sœur, Adriana, la mésange, trapéziste virtuose au cirque Médrano. Jusqu’au jour où un casse particulièrement violent réalisé avec un caïd d’Aubervilliers met les flics, tous les flics, sur ses traces.
Je pourrais reprendre quasiment mot pour mot ce que j’avais écrit sur Quai des enfers. J’ai retrouvé les qualités et les défauts du premier. Pour prendre une analogie musicale, j’ai eu en lisant Angle mort la même impression que parfois en jouant dans un groupe. Tout le monde semble en place, personne ne fait de fève, et pourtant, pour une raison très difficile à pointer du doigt, ça n’avance pas, ça ne groove pas, on a l’impression de nager tout habillé !
Là c’est pareil. De très belles pages, de bonnes idées et … ça n’avance pas. Et du coup ma lecture a traîné.
Les seules choses que je sais identifier sont, une fois de plus, les mêmes que dans le premier roman. Impossible de m’attacher à un personnage, sauf à Adriana, la seule qui me touche. Et les dialogues me gênent. Je ne les « entend » pas, ils me semblent trop « écrits ».
Entendons nous bien, je sais que tout écrivain travaille son écriture. Je sais aussi que si certaines donnent une impression de facilité et de naturel (comme celles de maîtres comme McBain, Leonard ou Westlake) d’autres revendiquent ouvertement leur étrangeté en quelque sorte (l’ouverture de Versus en est pour moi un exemple éclatant). Mais elles sont portées par une énergie qui fait tout passer. Là j’ai l’impression de voir, de sentir le travail d’écriture, la volonté de faire de belles phrases, de faire claquer les dialogues … mais ça se voit trop et je ne marche pas.
A noter quand même un belle fin, attendue, inévitable, incontournable … Mais réussie. Et oui, quand on va ainsi vers un final quasi obligatoire, il ne reste que deux solutions. Soit on le rate et le lecteur hurle au cliché, soit on le réussit et le lecteur est enchanté parce que parfois on aime avoir ce que l’on attendait. Ici il est beau et réussi. Bravo.
Au résumé, comme pour le premier, un roman ambitieux, de très belles pages, en particulier sur le cirque, mais un ensemble pas totalement convainquant. Et j’attends le prochain … Mais je peux aussi me tromper. J’imagine que si la série noire soutient ce livre et cet auteur, c’est qu’il doit avoir des qualités à côté desquelles je suis passé, mais que certains d’entre vous auront vues … A vous donc.
Ingrid Astier / Angle mort, Série Noire (2013).