Après Sur les nerfs, Larry Fondation revient sur ces éclats de vies déclassées à Los Angeles. Criminels ordinaires, le titre est plus explicite.
Des gens flingués pour un regard de travers, une errance au Mexique, du sexe sans amour et sans émotion, des braquages bourrés ou complètement dans les vaps, des bagarres dans les bars … Pas de grands criminels géniaux, pas de vols spectaculaires, pas de serial killer au QI exceptionnel chez Larry Fondation. Rien que la misère, parfois encore plus morale et culturelle que financière. Et la bêtise et l’envie.
Criminels ordinaires est vraiment la prolongation de Sur les nerfs. Même personnages, même écriture, même force d’évocation de la réalité brute. C’est à la fois la force, et la limite de ce nouveau recueil.
La limite car on se demande si l’auteur peut écrire autre chose (plus long, ou sur d’autres sujets, ou plus construit), parce qu’on est en terrain très connu. Limite aussi parce que sur ce recueil il me semble que les textes les plus longs sont les moins convaincants.
Force parce qu’on retrouve cette humanité à la fois brute et vide. L’écriture sans aucun effet est au diapason de vies qui semblent sans colonne vertébrale : des désirs, des satisfactions immédiates, mais aucun réflexion, aucune construction, pas de prévision à plus de quelques jours. Le reflet de toute une portion de l’humanité réduite à la survie, sans avenir, sans rêve, sans espoirs … Mais également dépourvue de colère, de révolte, de la culture politique, de l’esprit de solidarité et de classe qui, dans une situation qui économiquement comparable, avait donné toutes les luttes du XX siècle.
Un portrait et un constat glaçants, désespérants rendue dans toute leur sécheresse.
Larry Fondation / Criminels ordinaires(Common criminals, 2002), Fayard (2013), traduit de l’américain par Alexandre Thiltges.