L’été, saison calme pour l’édition, polar compris, l’occasion, enfin, de rattraper le retard accumulé tout au long de l’année, et aussi de changer un peu de style. Cela faisait un moment que j’avais sur ma pile ce roman de Joseph Bialot, réédition (retravaillée si l’on en croit la préface) de deux romans introuvables. Il s’appelle A la vie ! et rassemble donc en un ouvrage les précédents Le semeur d’étincelles et La gare sans nom. Je n’avais pas lu les précédentes éditions, je ne saurais donc dire ce qui a été changé, par contre, je ne peux que vous encourager, très très vivement à lire celui-ci.
Le 28 mai 1871, Benoît Mongeon échappe par miracle au massacre des communards par les versaillais. De 1913 à 1948 lui, sa famille, ses amis, vivront toutes les luttes de la première moitié du XX° siècle. Pour la paix aux côtés de Jaurès, dans les tranchées, formation du Parti Communiste français, défense de Sacco et Vanzetti, brigades internationales, front populaire, deuxième guerre mondiale, résistances, camps … Tous ne seront pas du bon côté, mais tous vivront intensément. Ils participeront aux drames, mais aussi à l'incroyable vie culturelle d'un Paris qui fut, un temps, le centre du monde. A la vie.
J’avais oublié, depuis le temps que je n’en lisais plus, combien les sagas familiales, quand elles sont bien écrites, peuvent se révéler addictives. Maintenant, je sais, de nouveau. Pendant trois à quatre jours j’ai été complètement accro à la famille Mongeon. Impossible de les lâcher, dès que j’avais une minute de libre, entre deux plongeons, deux parties de foot ou châteaux de sable, presque entre deux verres d’apéro, hop, je me replongeais, même pour un seul paragraphe dans le bouquin. Et impossible d’aller se coucher avant d’avoir les yeux qui se ferment tous seuls et le cerveau qui déclare forfait. Accro, complètement accro.
Il faut dire qu’il est fort Joseph Bialot, très fort. Certes il a du matériau, et du matériau souvent vécu de première main cet homme qui a traversé, sans rien perdre de son humanité, ce que notre XX° siècle a produit de plus laid, de plus inhumain. Encore faut-il savoir le raconter. Et il sait le faire pour paraphraser un célèbre duo de pitres.
Ce n’est un scoop pour aucun de ses lecteurs habituels, l’auteur est un immense raconteur d’histoires. De pleins d’histoires, qui nous font vivre de façon passionnante, la Grande Histoire. Joseph Bialot maîtrise parfaitement son art et sait comme personne mêler destins individuels et histoire collective. Mais aussi, quels individus ! Des personnages plus vrais, plus grands, plus émouvants, plus attachants, plus tout ! On vibre, on s'indigne, on pleure, on chante, on trinque avec eux. Grâce à eux on vit les grands moment du XX ° siècles, les espoirs déçus, les aveuglements généreux, les erreurs tragiques, les actes de courage insensés, les pires saloperies, les mesquineries, les vengeances brutales …
Quelle Histoire, et quelles histoires !
Joseph Bialot / A la vie !, La manufacture des livres (2010).