Il y a quelques années (5 pour être précis), avec Transparences, Ayerdhal, auteur emblématique de la SF française, faisait une entrée fracassante dans le monde du polar. Il revient aujourd’hui avec Résurgences, la suite :
Ann X, la tueuse implacable de Transparences est morte. Du moins aux yeux du monde. Stephen, qui l'a longtemps traquée puis est tombé amoureux d'elle sait qu'elle est encore vivante, même si elle ne tue plus, ou presque. Pour la CIA, la DST, le Mossad et autres, elle n'est plus. Mais il en est un qui la traque. Marks, tireur d'élite aussi exceptionnel qu'Ann, ombre, légende dont on parle sans savoir s'il existe vraiment. Il doit exister, puisqu'il fait un carton sur Ann, en 2007, à Lyon. Mais Ann a la vie dure, et voilà de nouveau tous les services secrets sur les dents, alors que Stephen le canadien d'interpol est enlevé par la DST pour le forcer à découvrir qui est Marks, et qui est cette jeune femme qu'il a laissée pour morte …
Commençons par un avertissement en forme de critique … Inutile d’acheter Résurgences si vous n’avez pas lu le précédent. Vous n’y comprendriez rien, mais alors rien de rien. L’ennui est que même quand on a lu Transparences, pour peu que la lecture date de la parution du premier (5 ans donc) et qu’on ait un peu oublié qui sont les protagonistes, on rame dur pour démarrer. L’idéal serait donc de relire le premier avant d’attaquer ce nouveau roman.
Passé cet obstacle, on rentre dans le vif du sujet, la mécanique se met en place, les engrenages (toujours complexes chez Ayerdhal) s'enclenchent, les roues se mettent à tourner … et le lecteur est embarqué sans retour en arrière possible.
Et nous sommes toujours chez Ayerdhal. Ce qui veut dire des femmes fortes, très fortes, des scènes d’action particulièrement réussies servies par un style aussi fluide et efficace que ses tueurs, une histoire complexe et passionnante, et bien entendu, plus que jamais une réflexion politique et un contexte social très présents.
Ici l'accent est mis sur les mouvements de sans papiers, de SDF, tous ces gens très pratiques quand il faut faire du chiffre, faire peur au chômeur ou au travailleur précaire bien de chez nous. Tous ces gens dont on parle un peu l’hiver, quand le froid en tue un ou deux, et qu’on oublie aussitôt que le soleil reparaît et que les salaires de cadres ou les nouveaux régimes pour la plage passent en première page. Tous ces gens qui permettent aux uns de jouer les matamores, aux autres de se parer de vertu et de charité. Les variables d’ajustement de notre société pour faire simple. Grâce à Ayerdhal, ils ont enfin la parole.
Du pur Ayerdhal donc, passionnant, à condition d’accepter le petit effort de démarrage.
Ayerdhal / Résurgences, Au diable Vauvert (2010).