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20 mai 2013 1 20 /05 /mai /2013 14:47

Daniel Woodrell est un auteur beaucoup trop rare, et vraiment pas assez lu. Tellement rare que je m’aperçois que je n’ai parlé de lui qu’une fois en cinq ans de blog. Et que cela faisait longtemps qu’on n’avait plus de ses nouvelles. C’est pourquoi je vous encourage vivement à vous précipiter sur le Manuel du hors-la-loi, recueil qui vient de sortir chez Rivages.

 

Woodrell

12 nouvelles qui, presque toutes, se déroulent dans le Ozarks, théâtre de la majorité des romans de Daniel Woodrell. Si vous ne savez pas où ils se situent, vous pouvez aller jeter un œil sur l’embryon d’article de Wikipedia. Mais sachez qu’après la lecture de Woodrell vous n’aurez pas forcément envie d’aller arpenter le chemin de randonnée des Ozarks dont ils causent …


Ne vous attendez pas à des nouvelles « à chute ». Celles de ce recueil sont l’occasion de portraits d’hommes et de femmes perdus, enfoncés dans la folie, la misère, le chagrin ou la peur. Comme dans ses romans, l’immense force des récits de Woodrell est de nous les rendre très proches, tout pareils à nous-mêmes, de rendre palpable leur humanité. Tous les récits sont émouvants, et si l’on retient peu les intrigues, on n’oublie aucun des personnages rencontrés.


Que ce soit ce père qui doute de tous depuis la disparition de sa fille, enlevée alors qu’elle avait 17 ans, et jamais retrouvée.


Cette gamine qui pousse dans un fauteuil à roulettes un oncle monstrueux dont elle peut enfin se venger.


Ces anciens soldats, du Vietnam ou d’Irak, enfermés dans leurs souvenirs, qui finissent par y perdre la raison sans pouvoir expliquer ce qu’ils ont vécu.


Ces deux frères qui fuient dans les forêts, après avoir brûlé la nouvelle maison d’un voisin qui leur bouchait la vue sur la rivière.


Cet ancien soldat confédéré, qui semble ne rien regretter d’une guerre atroce … Et les autres.

On n’en oubliera aucun. On n’oubliera pas non plus certaines images … Une jeune fille lumineuse au bord d’une rivière, une vache morte, en équilibre sur un arbre au milieu d’une falaise, les deux frères partageant une bouteille de whiskey en attendant que les hommes du shérif se lancent à leur poursuite …


On n’oubliera pas non plus l’impression d’ensemble qui se dégage du recueil, celle d’une région où la loi et l’ordre sont des notions moins implantées que la vengeance, la loi du talion et la tradition. Où l’on compte sur soi et on n’attend pas grand-chose des autres. Où le temps semble, d’une certaine façon, s’être arrêté. Où tout est dur, âpre. La nature, les rapports avec les autres, les êtres humains. Cela pourrait être absolument désespéré et désespérant.


Et pourtant le regard et l’écriture de Daniel Woodrell sont tellement humains, tellement proches de ces gens, il réussit si bien, en quelques mots, à rendre leur humanité, leur dignité et leur désespoir qu’on referme le recueil avec gratitude. Et on espère que le prochain roman viendra sans trop tarder.


Daniel Woodrell / Manuel du hors-la-loi (The outlaw album, 2011), Rivages/Thriller (2013), traduit de l’américain par Isabelle Maillet.

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19 mai 2013 7 19 /05 /mai /2013 11:52

Buvons un coup pour fêter la mort de Videla ! Je sais je retarde, mais je ne l’ai appris que ce matin.

Quel est l’imbécile buveur d’eau tiède qui a dit un jour qu’il ne faut jamais se réjouir de la mort de quelqu’un ?

Un peu qu’on va se réjouir, avec une pensée pour les familles des 30 000 disparus, les mères et les grands-mères de la Place de mai, et une pensée plus particulière pour les auteurs croisés et appréciés au détour d’un salon : Raul Argemi, Ernesto Mallo, Carlos Salem, Guillermo Orsi ... et ceux que j’aimerais croiser un jour comme Rolo Diez ou Carlos Sampayo.

Un hijo de la gran puta est mort, et, cerise sur le gâteau, est mort condamné et emprisonné.

Et cela me réjouit, ô combien. J’irai même jusqu’à dire que cela éclaire ma journée.

 

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16 mai 2013 4 16 /05 /mai /2013 22:24

J’aime beaucoup tous les romans de Dominique Manotti. Sans exception. Alors forcément, quand j’en vois un nouveau, je me réjouis. Quand en plus il parle des réfugiés italiens, des années de plomb, on qu’on sent planer l’ombre de Cesare Battisti (même si en fait l’histoire n’a rien, ou presque, à voir avec lui) je me réjouis doublement. A la lecture de L’évasion, je me dis que j’ai bien eu raison de me réjouir.

Manotti

1987, Filippo Zuliani, jeune délinquant romain s’évade par hasard avec Carlo, un ancien dirigeant des Brigades Rouges avec qui il partageait la cellule. Ils se séparent au bout de quelques heures, et Filippo marche seul dans la montagne jusqu’à Bologne où il apprend en lisant les journaux que Carlo a été abattu lors d’un hold-up à Milan. Il se rend alors à une adresse à Paris, donnée par celui qui était devenu son ami, et rencontre Lisa Biaggi, qui attendait Carlo, son amour et son camarade de lutte. En France il est très mal accueilli par les réfugiés italiens qui voient en lui, au mieux un petit truand méprisable, au pire un infiltré. Pour vaincre ce mépris, il décide d’écrire son histoire, sans se douter qu’il va se trouver pris dans une lutte sans merci entre les différents groupes d’extrême gauche et les services secrets italiens.


Quand j’ai lu, un peu rapidement, le résumé, j’ai immédiatement pensé à Cesare Battisti. Puis je me suis aperçu que le roman n’avait rien à voir avec lui. Sinon le contexte politique. Pas grave, dès le premier chapitre j’étais harponné et j’ai lu L’évasion en un temps record. Il faut dire que le roman est court, et que Dominique Manotti a un style qui me convient parfaitement. Concis, d’une efficacité redoutable et, à l’image des plus grands, d’une fluidité et d’une apparente évidence et simplicité qui donnent une impression de facilité. Son récit coule, entraîne le lecteur d’une phrase à l’autre, d’une page à l’autre.


A ce style habituel elle ajoute ici une construction très habile qui, après les premiers chapitres, quand Zuliani se met à écrire et que tout le monde devient de plus en plus paranoïaque, amène le lecteur à douter lui aussi, à se demander où est la réalité. Qui dit vrai ? Le récit de l’évasion des premiers chapitres raconté à la troisième personne, ou Zuliani quand il le raconte à sa façon ? Quelle part de vérité y a-t-il dans le roman dans le roman ? Une des forces du roman étant d’ailleurs de ne pas éclairer toutes les zones d’ombre, de laisser à chacun le choix d’ajuster les détails à sa façon, à l’aune de sa propre paranoïa. Une autre est de ne jamais poser de façon explicite ces questions (ce qui alourdirait le récit) mais de faire confiance au lecteur pour se les poser tout seul.


Ce qui n’empêche pas le roman, comme toujours chez Manotti, d’être extrêmement bien documenté, et de mettre en lumière les saloperies des services secrets italiens (sans tomber dans la théorie du complot, il vaut mieux se méfier, car comme disait le grand Pierre, ce n’est pas parce que je suis parano qu’ils ne sont pas tous après moi), les divisions et les rancœurs entre différents groupes d’extrême gauche italiens, leur mépris envers Filippo, homme du peuple s’il en est, au nom duquel ils sont censés s’être battus, les rouages très médiatiques et très mercantiles du milieu de l’édition … Tout cela sans jamais juger et sans enlever à personne son humanité.


La conclusion du roman, fort peu optimiste est particulièrement forte, et on croirait y entendre l’auteur elle-même qui, après des années de luttes politiques et syndicales a décidé de passer à la fiction : « Oui, j’abandonne. Ce combat-là est perdu. Si je veux essayer de sauver notre passé, il ne me reste plus qu’une chose à faire. Ecrire des romans. » dit Lisa Biaggi, et sans doute aussi Dominique Manotti.


Dominique Manotti / L’évasion, Série Noire (2013).

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13 mai 2013 1 13 /05 /mai /2013 22:52

Cette année le Marathon des mots invite Buenos Aires et ses auteurs. Dont les auteurs de polars. Il y aura donc une lecture éprouvante, celle d’une partie d’un roman d’Enrique Medina, Les chiens de la nuit. Comme j’aurai l’honneur de présenter cette lecture, je m’y suis replongé.

 

Medina

Mercedes, 15 ans et Mingo 18 vivent dans un bidonville de Buenos Aires. Elle est plutôt moche, il est plutôt fainéant, autant dire que leur avenir est bouché. Mercedes travaille comme bonne, et Mingo vole à la tire. Jusqu’à ce qu’il se fasse arrêter et connaisse l’horreur de la prison. A sa sortie il décide que leur seule façon de s’en tirer est que sa sœur se prostitue. Le mirage d’une vie meilleure (au moins pour lui), le début d’une descente de plus en plus bas, en enfer.


On est loin ici des Raul Argemi, Rolo Diez et autres Ernesto Mallo. Enrique Medina n’a pas eu, à ma connaissance, d’engagement à l’extrême gauche, il n’a pas pris les armes avec les guérilleros, s’il parle si bien de la prison et de la misère, c’est qu’il a passé de nombreuses années, dans les années 40-50, dans un centre où se côtoyaient enfants abandonnés et petits délinquants.


Ici pas d’intellectuel, de journaliste ou de psy, personne ne prend les armes ou la plume contre un régime ou pour défendre des idées, on est plongé, la tête la première dans l’enfer du sous-prolétariat argentin. Et ce n’est pas particulièrement rose. D’autant moins que l’auteur ne nous laisse pas respirer un seconde. De pire en pire, c’est l’impression que l’on a au début, et qui se confirme sur un peu moins de 200 pages. Pas besoin de faire plus long. C’est déprimant, désespérant, glauque, sombre à en pleurer. Comme dans un marécage, tout mouvement pour essayer de s’en sortir ne fait qu’enfoncer un peu plus Mercedes et Mingo. Et pourtant, très fugacement, on trouve quelques étincelles de « bonheur ». Toutes petites, et dont le faible éclat ne fait que renforcer les ténèbres qui suivent.


Un texte qui laisse une impression durable. Je ne sais pas si je dois vous le conseiller … Et je suis curieux de voir (ou d’entendre), ce que cela donnera à la lecture. Rendez-vous fin juin à Toulouse pour le Marathon des mots.


Enrique Medina / Les chiens de la nuit (Perros de la noche, 1984), L’atalante/  (2013), traduit de l’argentin par Claudine Carbon.

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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 21:36

Il ne vous a pas échappé que je suis un fan de John Connolly. Ni que je m’intéresse aux lectures de mes gamins. C’est comme ça que j’ai été amené à lire à un des romans jeunesse de l’irlandais : Les portes.

Connolly portes

Samuel est un jeune garçon un peu … particulier. Disons qu’il s’intéresse à tout et pose parfois des questions qui désarçonnent les adultes. Son meilleur ami est son chien Boswell. Quelques jours avant Halloween il tombe, presque par hasard, sur une scène effarante : dans la cave de ses voisins un étrange lumière bleue est apparue, des monstres en sont sortis qui ont pris place dans le corps des adultes présents. Il semblerait que l’avant garde des démons de l’Enfer soit arrivée, pour préparer la venue de leur Maître et la fin du Monde. Au même moment, au CERN, une étrange particule semble s’échapper du Cyclotron. Il est pourtant étanche ce machin …


Les lecteurs adultes de John Connolly savent qu’il a de l’humour. Les dialogues avec Louis et Angel mettent de temps en temps un peu de soleil dans des romans en général très très sombres. Dans Les portes, il s’en donne à cœur joie ! J’ai entendu plusieurs fois mon fils éclater de rire, et j’ai moi-même beaucoup souri.


Il faut dire que les démons qui arrivent ici, et en particulier le malchanceux Nouilh ne sont pas tristes. Et que les apartés en forme de notes de bas de page valent leur pesant de protons. Parce qu’en plus de raconter une histoire plutôt bien fichue, de bien nous faire rire, John Connolly arrive, dans le même temps, à parler de trous noirs, d’accélérateur de particules et de trous de vers.


Un vrai tour de force, surtout si on ne veut pas perdre le lecteur. Résultat, le roman a autant amusé Gabrile 11 ans que son papa (c’est moi) pas mal plus d’ans. Et si vous avez un coup de blues, je vous le recommande.


John Connolly / Les portes (The gates, 2009), J’ai Lu (2011), traduit de l’irlandais par Pierre Brévignon.

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12 mai 2013 7 12 /05 /mai /2013 00:04

Pour les toulousains, David Vann sera à la Médiathèque José Cabanis le jeudi 16 mai à 18h00.

 

Les renseignements sont là.

 

Vous pouvez y aller nombreux, la salle est grande !

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10 mai 2013 5 10 /05 /mai /2013 14:29

Après Les derniers jours d’un homme, voici le second roman de Pascal Dessaint à paraître en blanche (mais toujours chez Rivages). Maintenant le mal est fait est-il pour autant si différent des autres romans de l’auteur ? Je ne crois pas, voyons ça.

Dessaint

Quelque part en Normandie un groupe d’amis est ébranlé par le suicide de l’un d’eux. Nous apprendrons rapidement que cette mort n’est pas la première qui frappe le groupe. C’est Serge, le spécialiste des insectes qui se jette du haut d’une falaise. Comment vont alors réagir Bernard le bétonneur, Elsa l’artiste, Marc le cynique, George l’amoureux des lettres et les autres ?


S’il y a une vraie différence elle est dans le lieux, Pascal Dessaint semblant s’éloigner un peu plus de Toulouse pour nous amener en Normandie. Sinon, certes il n’y a pas de coupable, les morts de Maintenant le mal est fait sont morts « tout seuls ». Ce détail mis à part, la structure de ce roman choral est très proche de celle de Mourir n’est peut-être pas la pire des choses. Il s’ouvre sur une disparition, puis laisse la parole à ceux qui ont connu le mort, souffrent de sa disparition, cherchent à comprendre, se sentent plus ou moins coupables …


De son « passé » d’auteur de roman noirs, l’auteur garde l’habileté dans la construction qui, enquête ou pas, crée un suspense et donne envie de continuer pour savoir ce qui va (ou c’est) passé. Comme dans ses romans précédents il construit son puzzle, pièce après pièce, voix après voix, ne laissant se dessiner le tableau complet qu’à la fin.


Pour le fond, les thèmes familiers reviennent : le rapport à la nature, le deuil, la fidélité et la trahison en amitié, en amour et envers des idéaux. Ils sont traités avec la sensibilité et le tact habituels. Les amateurs de Pascal retrouveront ici l’auteur qu’ils aiment, et ceux qui ne jurent que par la littérature blanche auront peut-être l’occasion de découvrir un auteur qu’ils ne seraient pas allés chercher en noire.


Pascal Dessaint / Maintenant le mal est fait, Rivages (2013). 

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6 mai 2013 1 06 /05 /mai /2013 16:58

Je continue avec les auteurs irlandais, tout en changeant totalement de style avec le dernier John Connolly (encore un auteur qui n’est pas assez connu à mon humble avis) : La colère des anges.

 

Connolly

Au fond des forêts du nord du Maine git un avion. Cela fait des années qu’il s’est écrasé là, et personne ne s’en est jamais inquiété. Presque personne. Parce que dans cet avion il y a une liste que certains voudraient récupérer, et d’autres détruire. C’est comme ça que Charlie Parker et ses amis Angel et Louis se retrouvent sur la piste. Mais ils ne sont pas les seuls, de vieilles connaissances sont aussi en chasse. Le Collectionneur qui mène sa propre guerre, mais aussi une femme inquiétante et un jeune garçon vieux avant l’âge, un gamin qui ressemble de façon troublante à un être qu’ils croyaient avoir éliminé.


John Connolly au sommet de son art de conteur. Quand on ouvre le bouquin, impossible de la lâcher. Il vous attrape par le bout du nez et mène le bal avec une maestria confondante. Autant j’avais trouvé que le précédent, La nuit des corbeaux, était un Charlie Parker mineur, autant avec celui-ci il revient très très fort. Et au passage, il éclaire un peu le précédent, ou plus exactement, il l’assombrit …


Comme toujours, le fantastique est là, présent, en toile de fond, sans jamais jouer le rôle du Deus ex machina. Pas de tour de passe-passe, tout peut s’expliquer de façon « naturelle ». Et derrière les personnages qui s’agitent, le Mal est certes une entité métaphysique, mais aussi et de plus en plus une entité très réelle, très terre à terre, avec de nouveaux Commanditaires qui n’apparaissent jamais mais tirent les ficelles dans l’ombre. Du coup, Connolly et Charlie Parker dans leur lutte contre un Mal absolu se politisent de façon de plus en plus claire et ouverte.


Ce qui n’est bien évidemment pas pour me déplaire (hihi). Mais n’est que la cerise sur la gâteau, tant le plaisir de retrouver Charlie, Angel, Louis et les histoires fascinantes de l’oncle John est immense, qu’il y ait ou non un contenu politique. Vivement le prochain.


John Connolly / La colère des anges (The wrath of angels, 2012), Presses de la cité (2013), traduit de l’irlandais par Jacques Martichade.

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5 mai 2013 7 05 /05 /mai /2013 01:16

Je craignais qu’on n’entende plus parler de lui. Depuis que la série noire avait renoncé à traduire ses romans, plus aucune nouvelle de l’irlandais Adrian McKinty. Et pourtant j’avais beaucoup aimé sa série consacrée à Michael Forsythe. Et voilà que grâce à l’ami Unwalker j’apprends qu’il revient chez Stock. Avec le début d’une nouvelle série : Une terre si froide.

 

McKinty

1981. Bobby Sand vient de mourir, Belfast s’embrase. Sean Duffy n’a pas la vie facile : catholique d’origine, il est flic dans la police criminelle à Carrickfergus, dans la banlieue de Belfast. Pour une fois, il est appelé sur une affaire qui semble détachée du contexte politique : Un homme a été trouvé assassiné, la main droite coupée. La victime était un homosexuel connu. Quand un deuxième homosexuel est tué de la même façon Sean commence à penser qu’on a là le premier serial killer de l’histoire de l’Irlande du Nord. Un tueur en Ulster qui n’ait pas trouvé sa place chez les psychopathes d’un côté ou de l’autre ?


Il y a vraiment une école irlandaise du noir. Une façon à eux de nous infliger les pires horreurs, de faire ressentir la trouille, la connerie, la lâcheté, l’obscurantisme, la terrible certitude de ceux qui, parce qu’ils croient en un Dieu, savent avec certitude qu’ils ont raison et que les autres ont tord … Tout en arrivant à nous faire rire ou sourire au détour d’une phrase, en gardant le plaisir de boire une Guiness ou de regarder le sourire d’une femme. Cette vitalité, ce plaisir de vivre au milieu des pires drames, on les retrouve ici.


Adrian McKinty, qui pourtant ne nous épargne rien en situant son roman en 1981 à Belfast, réussit une fois de plus cet exploit : C’est dur, c’est sombre, l’absurdité et l’horreur des attentats, la connerie de la répression anglaise meurtrière sont insupportables, on ressent la peur, la rage et en même temps on sourit et on s’attache à Sean Duffy. Comme en plus Adrian McKinty n’a rien perdu de son talent de conteur on se régale, malgré la noirceur d’un contexte qui vient en écho de l’autobiographie de Sam Millar lue il y a peu.


Longue vie à Sean Duffy, en espérant qu’il trouvera son public et que le nouvel éditeur de McKinty pourra continuer à nous proposer ses aventures.


Adrian McKinty / Une terre si froide (The cold cold ground, 2012), Stock/La Cosmopolite (2013), traduit de l’irlandais par Florence Vuarnesson.

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3 mai 2013 5 03 /05 /mai /2013 15:58

Roman d’outre tombe, un de plus du géant Westlake/Stark,  voici donc côté Richard Stark une nouvelle aventure de l’implacable Parker : Argent sale.

Stark

Vous vous souvenez peut-être que dans A bout de course ! Parker et deux complices avaient braqué deux camions pleins de billets, au bas mot, quelques deux millions de dollars. Et qu’ils avaient dû fuir en laissant le magot dans une église désaffectée. Depuis Parker a réussi à échapper aux flics et maintenant, avec l’aide de sa copine Claire il compte bien le récupérer. Mais ça urge, car Nick Dalesia, un de ses complices a été pris par le FBI puis a réussi à s’évader, ce qui veut dire qu’il est aux abois. Et Sandra, une privée chasseuse de prime est sur leurs traces. Il va même peut-être falloir qu’il s’associe avec elle …


Le début du roman est un peu rude pour ceux qui, comme moi, ont un peu oublié les détails de A bout de course. Mais on se remet vite dans le bain, et ensuite c’est toujours aussi bon. Quand il signe Stark, Westlake est d’une efficacité d’écriture qui touche au magique ! Impressionnant de voir comme son style alors est aussi pur et tranchant que celui de son personnage.


Au plaisir habituel, on ajoutera ici celui de l’importance donnée aux personnages féminins, Claire et surtout Sandra qui sont très « léonardiennes », cools et malines comme les meilleurs personnages du grand Elmore. Et avoir pour le même prix l’inflexible Parker et des héroïnes de cette classe c’est le bonheur !


Richard Stark / Argent sale (Dirty money, 2008), Rivages/Thriller (2013), traduit de l’américain par Elie Robert-Nicoud.

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