Ca y est, ce coup-ci c’est bien le dernier. Il ne nous restera plus que nos yeux pour pleurer, et sans doute quelques rééditions bienvenues. Et puis on pourra relire. Relire tout Elmore Leonard (ou presque) dont Raylan est donc le dernier roman.
Raylan est marshal dans le Kentucky. Un marshal à la Elmore Leonard : cool, la réplique qui tue, et le pistolet fatal. Comme il le dit : « Ecoute, si je le sors, je te mets une balle dans le cœur avant que t’aies pu dégainer le tien. » Et il va avoir besoin de tout son sang froid pour affronter une psychopathe qui vole les reins des gens, une compagnie minière que les scrupules n’étouffent pas et quelques truands bas de front mais méchants comme des teignes.
Oui c’est vrai, on n’est sans doute pas à la hauteur des meilleurs Elmore Leonard. C’est surtout la construction qui est un poil tirée par les cheveux, l’auteur voulant rassembler trois histoires qui n’ont quasiment que leur protagoniste principal comme lien.
Mais une fois ceci dit, si on considère que l’on a trois novellas, tout le reste c’est du grand Leonard. Avec un héros comme plus personne ne pourra en utiliser sans se faire accuser de plagiat tant cet archétype du super cool, qu’il soit truand, voleur, flic ou autre est la marque de fabrique du grand Elmore.
Avec des femmes fortes, très fortes, et même ici, ce qui est plus rare, deux salopes (je m’excuse pour le terme, mais je n’en vois pas de plus approprié) étincelantes qui resteront dans les mémoires ! C’est qu’elles sont intelligentes, cools et méchantes comme la gale ces deux femmes ! Elles sont d’autant plus éclatantes, que certains des truands qui les accompagnent sont bien dans le moule Leonard eux aussi : affreux, sales et méchants … Et surtout très bêtes. Mais il y a aussi « en face », de sacrés portraits de femmes, fortes, intransigeantes sur leurs valeurs, droites dans leurs bottes, de tous âges et de toutes conditions.
Et comme toujours, pas un mot en trop, pas un jugement de valeur, juste de l’action, des dialogues d’anthologie, des scènes au rythme parfaitement maîtrisé, et en prime, chose plutôt rare chez Elmore Leonard, la critique sans pitié des mœurs prédatrices de certaines compagnies minières. Une critique qui n’arrive sans doute pas par hasard dans des US où l’extraction du gaz de schiste a dévasté des régions entières … Le tout, bien entendu, sous forme de dialogues étincelants.
Décidément, nous allons vous regretter longtemps Monsieur Leonard.
Elmore Leonard / Raylan (Raylan, 2012), Rivages/Thriller (2014), traduit de l’américain par Pierre Bondil.