Qui a dit que la vieillesse est un naufrage ? Certainement pas Jean-Paul Jody qui, avec Vingt mille vieux sur les nerfs nous mitonne un poulpe qui donne envie de vieillir !
C’est la crise. Chéryl n’a plus de temps pour la gaudriole, elle passe son temps à « s’informer » en regardant la télé pour pouvoir discuter dans son salon ; et Gérard, dont le bistro est envahi par des cadres encravatés, ne sert plus de pieds de porc, parce que sa nouvelle clientèle n’en veut pas. Mais Gabriel ne s’avoue pas vaincu. Qui mange encore des pieds de porc ? Les vieux. Il va donc faire le tour des maisons de retraite pour rameuter les anciens amis de ses défunts parents. Il n’imagine pas qu’en rassemblant ainsi autant d’anciens de tous les combats (guerre d’Espagne, résistance, guerre d’Algérie, mouvements sociaux …) il joue avec le feu. Que dis-je le feu ? la dynamite. Et d’ailleurs, peu après, ça commence à péter.
En voilà un poulpe réjouissant, à défaut d’un poulpe réjoui. Le pauvre Gabriel, complètement dépassé par les événements, n’est ici qu’un détonateur, et tout juste le témoin du raz-le bol des anciens. Il observe, il subit, et même Chéryl lui refuse le repos du guerrier (ce qui donne lieu à quelques effets de comique de répétition assez réussis).
Ils sont beaux ces papis mamies. Ils sont beaux, ils sont enragés, ils ont décidé, une dernière fois, de combattre la saloperie et la connerie. Et ils ont bien raison merde ! Ils n’ont quand même pas risqué leur vie sur tous les fronts pour voir leurs idées et leurs valeurs à ce point foulées au pieds.
De toute évidence Jean-Paul Jody s’amuse à les mettre en scène et à leur faire dézinguer quelques uns des nuisibles qui nous pourrissent la vie. Alors ça ne fait peut-être pas avancer les choses (quoique, ce serait bien aussi que la peur change un peu de camp), mais qu’est-ce que ça fait du bien ! A se demander même comment ce n’est pas encore venu à l’esprit de quelques-uns.
Allez, courage, plus que 30-35 ans à patienter et …
Jean-Paul Jody / Vingt mille vieux sur les nerfs, Baleine/Poulpe (2010).