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9 octobre 2011 7 09 /10 /octobre /2011 23:24

Et nous sommes rentrés, fatigués mais contents d’avoir passé un si bon week-end …

 

Comme toujours dans un festival comme TPS, la frustration se mêle au plaisir et à la fatigue …

 

Frustration de n’avoir pas eu assez de temps. Pas le temps de discuter avec Eric Halphen, TanVan Tran Nhut, Thomas Cook, Stéphanie Benson, Jean-Hugues Oppel …  Pas le temps de tailler le bout de gras avec les copains de 813, avec ceux qui venaient me dire qu’ils me connaissaient du blog … Pas vraiment le temps de passer devant les tables …

 

Mais heureusement, un grand plaisir aussi. Revoir les copains de la Noirode, Yan de Carcassonne et de Encore du noir,  Hervé et Michel de 813. Revoir les habitués, Giovanni notre copain milanais, l’inévitable Carlos Salem, retrouver Raul Argémi, Sébastien Rutès …

 

Avoir le plaisir et l’honneur de passer quelques moments avec Paco Taibo, Nick Stone, Valerio Evangelisti, de discuter un peu plus avec Patrick Bard, de découvrir des gens comme Ignacio del Valle, Marc Fernandez ou le très talentueux, et très discret Jean-Marc Troub’s (dont je vous causerai bientôt).

 

Et puis restent les images fortes. Le débat sur Ciudad Juarez, où, ma première question posée, je ne repris la parole qu’après 45 minutes durant lesquelles Patrick Bard, Marc Fernandez et Paco Taibo ont monopolisé la parole, pour le plus grand plaisir des spectateurs. Paco, encore lui, redonnant des raisons d’espérer. L’humour très pince sans rire de Nick Stone et Valerio Evangelisti qui, alors qu’on ne parlait que d’horreurs et de personnages abominables ont fait rire tout le monde. L’humour et la finesse d’analyse de Thomas Cook. Les gens sortant hilares de la table ronde sur le polar latino-américain. Les anecdotes surréalistes d’Ignacio del Valle sur les soldats espagnols volontaires sur le front soviétique au côté des nazis. La classe de Gunnar Staalesen, très grand monsieur … Pleins d’images, de paroles, de sourires … Bref de quoi donner la force de repartir dès demain pour préparer l’édition 2012.

 

Quand j’aurai le temps et la force je mettre quelques photos en ligne sous forme d’album. Demain peut-être …

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8 octobre 2011 6 08 /10 /octobre /2011 00:21

TPS est parti sur les chapeaux de roues !

 

Après une matinée de formation sur le polar latino-américain, cet après-midi première table ronde de feu, avec les auteurs latino du salon : Paco Ignacio Taibo II, Raul Argemi, Carlos Salem et Guillermo Orsi animée par Sébastien Rutès, grand spécialiste de Taibo, et traduite difficilement par ma pomme.

 

Un moment épuisant mais jouissif, où on a appris l’histoire du petit lapin vert, comment le vent patagon fait tomber les filles enceinte, pourquoi les président argentins sont systématiquement parrains des septièmes fils d’une famille, pourquoi il y a des files de mexicains, vers midi, face au mat du drapeau sur la place centrale de Mexico, comment Paco écrasa en débat un pseudo intellectuel de droite avec seulement deux phrases, pourquoi le réalisme magique est un connerie car c’est la réalité latino-américaine qui est assez folle pour nous paraître magique … Et bien d’autres choses encore, le tout conté avec passion, humour, énergie, conviction …

 

Bref parfois de grands moment de solitude pour le traducteur, mais une jubilation constante et communicative. Pour résumer, le pied et je crois que les nombreux spectateurs n’ont pas regretté de s’être déplacés …

 

Maintenant au lit pour être en forme demain.

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6 octobre 2011 4 06 /10 /octobre /2011 23:31

Je vous ai déjà dit ici et tout le bien que je pense des romans des Wu Ming.

 

Ils écrivent bien ces enfoirés. Mais ce n’est pas tout. Ils pensent aussi sacrément bien.

 

On peut s’en persuader en allant sur leur site. Pour ceux qui n’ont pas le temps, vous pouvez aller lire cet article d’une intelligence et d’une lucidité éblouissantes.

 

Qualités auxquelles il faut ajouter que pour eux (mais c’est évident pour ceux qui ont lu leurs bouquins), intelligent, cultivé et profond ne veut pas dire forcément chiant. Donc en plus c’est bien écrit et rigolo. Allez-y, vous m’en direz des nouvelles.

 

Deux petits extraits pour vous mettre en appétit : « En bref : les intérêts des travailleurs et ceux du patron sont différents et irréconciliables. Toute idéologie qui masque cette différence (idéologie entrepreneuriale, nationaliste, raciale, etc.) est à combattre. ».

Et : « Déjà, se rendre compte que notre rapport avec les choses n’est ni neutre ni innocent, y débusquer l’idéologie, découvrir le fétichisme de la marchandise, est une conquête : nous serons peut-être cocus de toute façon, mais au moins pas cocus et contents. »

 

Et quand vous aurez bien réfléchi, vous pourrez aller rigoler un peu, Jean-Pierre Martin a repris du service.

 

Sinon, TPS pour moi c’est parti, avec une rencontre en bibliothèque avec le grand Valerio Evangelisti. Grand pas seulement par la taille, mais aussi et surtout un grand bonhomme. Gentillesse, disponibilité, humanité, chez un homme passionnant, parlant un français parfait et d’une érudition époustouflante. Eymerich, Panthera, le mouvement syndical américain, l’histoire du Mexique, celle des pirates français dans les Caraïbes, Emilio Salgari, Arsène Lupin, Rocambole, Henry Morgan … Un vrai feu d’artifice en toute simplicité.

 

Un grand plaisir pour moi, et je crois pour tous ceux qui étaient présents ce soir dans cette médiathèque de la région toulousaine. Comme il n’y a pas de hasard dans la vie, Valerio est un copain des Wu Ming …

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5 octobre 2011 3 05 /10 /octobre /2011 22:29

Attention, nous allons traverser une zone de fortes turbulences. Car dès demain soir je plonge dans ça :

 

TPS-Affiche-Polar-du-Sud

 

Si j’ai un peu de temps je vous raconterai au fur et à mesure.

 

Si j’ai encore plus de temps je finirai Le Bloc de Jérôme Leroy, qui n’a pas finit d’agiter les blogs, sites et autres machins où tout le monde donne son avis au lieu d’aller, sainement, s’arsouiller au bar du coin. Et je vous en causerai (au lieu d’aller m’arsouiller …).

 

Et tant que j’y suis, pour ceux qui habitent du côté de Reims et qui sont donc un peu loin pour venir à Toulouse, vous avez, vous aussi, un festival ce week-end.

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5 octobre 2011 3 05 /10 /octobre /2011 22:22

Vive le western ! J’aime les films, et j’adore les romans, en particulier ceux qui ont démystifié l’iconographie hollywoodienne tout en lui rendant hommage. Après Deadwood de Pete Dexter, après les westerns d’Elmore Leonard, après Lonesome Dove, voici Incident à Twenty-Mile de Trevanian.

 

Trevanian1898, quelque part dans le Wyoming, la bourgade de Twenty-Mile se meurt doucement. Créée au moment où un filon d’argent a été trouvé dans les montagnes environnantes, elle a commencé à dépérir quand le filon c’est révélé moins riche que prévu. Maintenant elle ne s’anime que le samedi soir, quand une soixantaine de mineurs descendent claquer leur paye avant de repartir une semaine sous terre.

 

Un magasin général, une auberge, un bordel, un barbier, un maréchal-ferrant … Et c’est à peu près tout. C’est là que débarque Matthew, gamin paumé, fan des aventures de Ringo Kid, un peu menteur, un peu arnaqueur, qui va en peu de jours se rendre indispensable et tenter de gagner le respect des habitants. Pas de quoi faire une histoire … Jusqu’à l’arrivée d’un trio de tueurs menés par un psychopathe échappé de la prison de Laramie, qui va prendre le village en otage.

 

Je ne fais pas partie des admirateurs absolus de Trevanian. La sanction, déjà publié chez Gallmeister m’avait laissé une impression mitigée. La même que Shibumi lu il y a bien, bien longtemps … Pour faire court, si j’apprécie l’écriture et le talent de conteur de l’auteur, je trouve sa misanthropie dérangeante. Je n’ai rien contre les auteurs qui n’aiment personne. Ce qui me gène dans les deux romans cités c’est ce sentiment diffus que Trevanian se sent, lui, bien au dessus de la mêlée et de la vaine populace …

 

Bref tout ça pour dire que cette fois il m’a complètement conquis.

 

Parce que j’aime les westerns et qu’il y a ici tous les ingrédients : Village isolé avec son joueur malade et finissant, ses putes au grand cœur, ses lâches et ses hommes courageux, sa jeune première, son Kid qui arrive et la bande d’affreux qui vient dynamiter l’intrigue … Jusqu’à l’affrontement final.

 

Ingrédients que Trevanian utilise avec un grand respect pour le genre (ce n’est pas un pastiche), mais en les reprenant entièrement à son compte. Du coup, c’est quand même nettement plus sombre que chez John Wayne, les motivations des uns et des autres ne sont pas toujours pures, la méchanceté, le cynisme, l’hypocrisie règnent et la folie n’est jamais très loin.

 

La narration est, comme à l’accoutumée, parfaitement maîtrisée, en un crescendo implacable qui voit la tension monter peu à peu jusqu’à l’affrontement tant attendu. Une montée et un affrontement qui malgré leur apparent classicisme recèlent quelques belles surprises.

 

Et pour finir, contrairement aux romans précédents cités ci-dessus, si Trevanian sait se montrer sans pitié avec quelques personnages qu’il n’épargne pas, il fait également preuve d’une tendresse étonnante pour les brisés, les cassés de l’existence qui, au final, peuvent révéler une vraie force. Tendresse bien évidemment totalement dépourvue de sensiblerie ou de bons sentiments culcul, Trevanian reste Trevanian quand même !

 

Bref, j’ai adoré.

 

Trevanian / Incident à Twenty-Mile (Incident at Twenty-Mile, 1998), Gallmeister (2011), traduit de l’américain par Jacques Mailhos.

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3 octobre 2011 1 03 /10 /octobre /2011 22:34

Rivages et Casterman continuent la mise en bulles des œuvres du fond Rivages. Chauzy adapte Rouge est ma couleur de Marc Villard.

 

Villard Chauzy

Barbès. Lors d’une intervention de routine, le coéquipier de David Nolane est abattu sous ses yeux. Et David plonge, déprime et picole. Jusqu’à ce que sa fille débarque, avec sa vitalité, sa musique et ses problèmes de came. Il décide alors de traquer l’assassin, un dealer surnommé Big Brother. Le problème est qu’il semble insaisissable et surtout protégé, très protégé … Il se pourrait même que ce soit un flic … Et il commence à faire le vide autour de Nolane et à approcher sa fille.


Flics pourris, Barbès, came, déprime, musique, la nuit … Pas de doute on est bien chez Marc Villard. Cette ambiance nocturne, de dérive et de déprime Chauzy fait le choix original de ne pas l’illustrer par des planches sombres, grises et à dominantes noires. Au contraire, ce sont les lumières artificielles de la nuit qu’il montre. Rouge des gyrophares des flics, vert des néons, bleu des écrans, jaune des lampadaires … Ca claque, ça flashe et on gagne en couleurs et en ruptures chromatiques ce qu’on perd forcément en simplifiant et en coupant la prose inimitable de Marc Villard.


Et le final, quasi sans parole est superbe, vraiment. Une très belle adaptation donc, une de plus dans cette collection.


Marc Villard, Chauzy (dessin) / Rouge est ma couleur, Rivages/Casterman/Noir (2010).

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1 octobre 2011 6 01 /10 /octobre /2011 13:59

La France tranquille d’Olivier Bordaçarre est le roman français dont on cause pas mal ces derniers temps sur les blogs. Et c’est bien mérité.


BordaçarreNogent-les-Chartreux, son centre historique piéton, ses zones commerciales, son restau pour notables, ses bars, ses jeunes qui s’emmerdent, ses petits commerçants, ses caméras de surveillance, son quartier défavorisé, sa brigade de gendarmerie, son musée de la marionnette … Depuis quelque temps aussi, ses chômeurs, ses licenciements, sa crise. Et puis d’un coup, son tueur en série et la psychose qui monte, la trouille, la méfiance et leur cousine, la haine. Alors que la ville descend la spirale infernale, que les morts s’accumulent et que la violence déteint sur tous les habitants, le commandant de gendarmerie Paul Galand, 130 kilos de déprime et de mal être tente de sortir de son apathie pour sauver ce qui peut encore l’être …


Ne tournons pas autour du pot, je partage l’enthousiasme de tous, de Holden, de Manu, de Yan etc … Mais avant de dire pourquoi j’ai beaucoup aimé, je vais juste faire deux petites critiques, gratter là où ça m’a agacé, pour m’en débarrasser et revenir à tout le bien que j’en pense …


Pour commencer j’ai l’épiderme très (trop ?) sensible et certains effets de mode dans le langage m’horripilent de façon absolument disproportionnée. Et parmi ces tics, un qui me hérisse est l’usage répété de l’adjectif improbable sensé faire joli, ou poétique ou je ne sais quoi. Et là, dès le début, deux improbables dont celui-ci : « L’homme et les femmes, couple improbable au bord du vide ». Ouille merde me suis-je dis … Et puis finit, terminé avec improbable. Ouf !


Deuxième machin qui gratte : le premier dialogue entre Paul et son fils Gregory m’a semblé complètement … improbable (hihi). Trop d’anglicismes dans le bouche du fils. C’est pas possible, j’ai jamais vu quelqu’un parler comme ça, et même si c’était possible, son père aurait dû l’envoyer paître tout de suite (parce que c’est pas toujours un gentil patient le père). Après je ne sais pas si je me suis habitué, ou si Gregory a un peu mis la pédale douce sur les « man », « you know what » et autres « bad trip » mais ça ne m’a plus choqué.


Tant qu’on en est au style, tout le reste j’adore ! J’adore les gueulantes de Galand, j’adore la description clinique de la montée de la violence dans la ville, faite de superposition de phrases allant crescendo, j’adore les blagues du style : « Dans les files d’attente bavardes, le lieu commun du poissonnier rivalisait avec le truisme du charcutier. », j’adore le joli clin d’œil à Brassens « Une patrouille de quatre gendarmes bien inspirés […] intervint pour tenter d’interrompre l’échauffourée », j’aime que le glandeur sculpteur s’appelle Giacomet et le maire Henry Bourges (je sais, je suis parfois facile à satisfaire) … Et je me dis que j’ai dû en rater pas mal, que comme dans les Rubriques à Brac il faudrait tout relire pour chercher les « coccinelles » qu’il a semées ici et là …


Ensuite c’est très fort dans la construction de l’intrigue. On part d’un machin très très cliché : Le serial killer qui se venge d’une offense plus ou moins imaginaire, c’est pas neuf. Mais ce qu’il en fait est totalement neuf, même du point de vue de la construction. Car, au début on s’en fout un peu, on est concentré sur les personnages et surtout sur la description clinique de cette petite ville de la France tranquille. Mais peu à peu, comme Garand, on se prend au jeu, on se met à trembler, à être fébrile, à participer enfin à la traque. Très fort !


Enfin il y a le fond. Et là Olivier Bordaçarre fait très fort. Sans prêche, sans démonstration, il décortique, par la seule force de ses descriptions, l’engrenage qui entraîne une petite ville sans histoire, ni meilleure ni pire qu’une autre, ni plus solidaire ni plus égoïstes qu’une autre, vers une société totalitaire, où tout le monde est surveillé, où la chasse à celui qui sort de la « norme » autoproclamée est ouverte et encouragée.


Car c’est bien ça l’histoire. Et c’est là que le final est très faussement rassurant. Certes le tueur est arrêté, certes tout semble rentrer dans l’ordre. Mais plus rien ne sera pareil, la bête a montré sa trogne, elle est sortie de la tanière et n’a pas été inquiétée. Alors elle est là, tout près, toute prête, attendant la prochaine occasion.


Thierry Di Rollo nous a dit la même chose d’une façon différente, ne doutons pas que Jérôme Leroy ne le dise pas aussi dans son Bloc, à lire dans la série noire dans quelques jours. Cela fait beaucoup en quelques semaines. Il faudrait peut-être commencer à les écouter tous.


Olivier Bordaçarre / La France tranquille, Fayard/Noir (2011).

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29 septembre 2011 4 29 /09 /septembre /2011 21:11

Dans le flot de la rentrée polar voilà un roman qui risque fort de passer inaperçu, et c’est bien dommage. Car L’hiver du commissaire Ricciardi de Maurizio De Giovanni mérite vraiment d’être découvert.

 

De GiovanniNaples mars 1931. Le fascisme s’installe durablement et le printemps tarde à venir. Dans sa loge du théâtre San Marco Arnaldo Vezzi, ténor adulé, chanteur préféré du Duce est retrouvé égorgé. C’est le commissaire Ricciardi qui hérite de l’affaire. Un flic solitaire, issu de la noblesse mais totalement détaché des biens de ce monde et des honneurs, peu aimé de ses supérieurs et du pouvoir mais terriblement efficace. Ricciardi qui fait de chaque enquête une affaire personnelle, de chaque douleur une offense. Ricciardi, un homme torturé qui a le redoutable don de voir les derniers instants de chaque victime et de ressentir sa douleur, sa peine, sa peur, sa rage …

 

Bien que l’auteur soit italien on pense immédiatement au sergent de Robin Cook et à son empathie avec les morts. Il se demandait Comment vivent les morts ? Ricciardi sait comment ils meurent … C’est un sacré pari et un gros risque. Risque d’être comparé à Cook, risque de sombrer dans le ridicule, le mysticisme en peau de lapin, ou tout simplement risque de la facilité (facile d’être enquêteur si le mort peut vous dire si, oui ou non, c’est Omar qui l’a tuer …).

 

Et bien non seulement Maurizio De Giovanni évite tous les pièges qu’il s’est lui-même tendus, mais il ne pâtit pas de la comparaison avec l’immense anglais au béret.

 

Grâce à son talent pour créer des personnages, et planter un lieu et une époque. Dès les premières pages on s’attache à Ricciardi, on sent sa douleur, on compatit à sa peine. Avec lui on découvre une ville de Naples inattendue, ventée, froide, brumeuse. Une ville aux couleurs sépia, à la tonalité nostalgique, plus triste qu’exubérante, plus pastel que vivement colorée. Une ville coupée en deux, où riches et pauvres ne se côtoient jamais, une ville où la misère est grise.

 

Une ville en résonnance avec le personnage principal, héros à la fois classique (flic solitaire, en conflit avec sa hiérarchie, en proie à ses démons) et atypique (c’est un ascète qui souffre mais ne boit pas, ne se drogue pas, ne passe pas de femme en femme … aucun plaisir charnel ne semble l’attirer tant il est habité par la douleur des morts).

 

A cela il faut ajouter la grande réussite de l’auteur : intégrer son élément fantastique à l’intrigue sans en faciliter artificiellement la résolution. Cela apporte une coloration originale, une saveur étonnante, comme une épice judicieusement utilisée relève un plat sans le dénaturer.

 

Si j’en crois le ouikipedia en italien, et comme on peut le supposer à la lecture du titre original, ce roman est le début d’une série des quatre saisons. Tant mieux. En attendant la suite, faites-moi plaisir, découvrez dès aujourd’hui le premier volet des aventures du commissaire Ricciardi.

 

Maurizio De Giovanni / L’hiver du commissaire Ricciardi (Il senso del dolore, L’inverno del commissario Ricciardi, 2007), Rivages/Noir (2011), traduit de l’italien par Odile Rousseau.

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28 septembre 2011 3 28 /09 /septembre /2011 18:57

Je vais faire une chose que je ne fais jamais, ou presque jamais, je vais être méchant, gratuitement méchant.

Il y a quelques jours un lecteur de passage me contactait pour me proposer un partenariat : je faisais la pub de son site et chaque fois qu’il gagnait un contrat il me versait un pourcentage. Je lui ai répondu poliment que j’avais pour règle de n’accepter aucune pub, aucun lien commercial. Fin de l’échange, très courtois.

 

Et non ! Aujourd’hui mon lecteur pugnace revient et poste un commentaire particulièrement pertinent sur ma chronique Six contes catalans (je vous laisse juger du commentaire) et dépose, comme il se doit, le lien vers son site.

 

J’ai peut-être la tête un peu près du bonnet. J’aurais pu jeter le commentaire à la poubelle. Ben non, il veut qu’on parle de son site, je vais en parler.

 

Donc ce site va faire de vous en écrivain, un vrai, en 15 pages d’astuces et 97 jours. Ni plus, ni moins. Mais attention, dès la première page, l’auteur vous avertit : « Créer un roman est un acte de dieu, tout comme la conception d’un enfant. Donner vie à des personnages qui viendront ensuite stimuler l’imaginaire des lecteurs, voilà un défi intéressant. ». Voilà bande de mécréants ! Vous le savez maintenant, c’est Dieu qui guide la plume d’Antoine Chainas, Caryl Férey, Valerio Evangelisti et Tim Dorsey.

 

Maintenant que l’on a posé les fondamentaux, que peut-on lire, gratuitement, pour appâter le chaland et lui donner envie de débourser les 3x27 € qui feront de lui un romancier reconnu et surtout publié ?

 

On peut lire des témoignages, comme dans les pubs pour les régimes pour maigrir ou pour faire repousser les cheveux : « Quel choc lorsque j’ai constaté que je pouvais vraiment avancer dans l’écriture de mon roman sans avoir l’impression de faire du sur place! Toute ma vie, j’ai cru que seulement certaines personnes avaient le talent nécessaire pour écrire un roman.

Vous m’avez bien appris une leçon. Écrire un roman est loin d’être réservé à quelques élus et encore plus loin d’être du travail. C’est réellement une partie de plaisir et en plus, j’ai maintenant VRAIMENT comme but d’être publié. »

 

C’est vrai ça ! Dire qu’il y a des cons pour croire qu’il faut du talent pour écrire un roman ! Et d’autres qui croient que c’est un dur labeur !! Ben non, il suffit d’acheter la méthode (3x27 €) et hop, un roman pondu en 97 jours.

 

Alors maintenant, les zôteurs, fini de vous la péter ! Tout le monde est pareil, tout le monde peut écrire Cent ans de solitude ou L’écume des jours. Alors un peu de modestie mesdames et messieurs !

 

Mais on peut aussi bénéficier de conseils gratuits (avant de commander les conseils payants). Il y en a quelques uns, ils valent tous leur pesant de cahouettes, mais je ne résiste pas à la tentation de vous livrer ceci : « Comment écrire une histoire policière? En ayant un fil conducteur solide, en imaginant un antagoniste maléfique, en planifiant la fin de votre roman en sachant que votre héros devra sauver le monde… ».

 

Ben alors ça va pas du tout ça ! J’en connais des où que c’est le méchant qui gagne ! Et où le monde ne va guère mieux à la fin !! Va falloir lire la méthode. Monsieur Férey, dans votre prochain roman j’espère bien que le gentil survit et que le méchant morfle et que le monde est sauvé !

 

Une autre : « Comment écrire une histoire pour enfants? Écrire une histoire pour enfants est très simple. Écrivez de petits scénarios, sans violence, sans cérémonie. Écrire une histoire pour enfant se résume à peu de choses tant que votre imaginaire est au rendez-vous et que vos héros débordent d’énergie. Voici la composition gagnante d’une histoire pour enfants : un héros, quelques personnages secondaires, une histoire simple sans grand revirement de fond. Voilà. J’oubliais. Comment écrire une histoire qui captivera vraiment un jeune auditoire? En favorisant les animaux comme personnages. Les enfants adorent les animaux. ».

 

Là deux commentaires. Le coup des animaux, c’est une idée originale de monsieur Jean-Hugues Oppel et ça s’appelle l’effet Gros Nez © JHO. Puis Mme Rowling elle a tout faux. Elle a écrit une histoire complexe, avec de la violence, des cérémonies, beaucoup de personnages et plein de revirements. M’est avis que son Harry machin là, il va pas marcher fort …

 

Bref, en guise de conclusion, juste une humble demande : Je trouve absolument normal que vous n’ayez rien à foutre de ce que j’écris ici, c’est le cas de la quasi-totalité de l’humanité, ça me va. Mais un conseil, n’utilisez pas les commentaires comme un moyen détourné de vous faire de la pub, ça m’agace et quand je m’agace j’oublie que j’ai bon fond.

 

Finalement j’ai une autre demande : Auteurs nouveaux ou confirmés, si vous avez appris à écrire avec la méthode ci-dessus, merci de ne pas me proposer de lire et commenter vos textes …

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26 septembre 2011 1 26 /09 /septembre /2011 22:32

Je continue à lire pour TPS. Brigitte Aubert est, avec Paco Ignacio Taibo II invitée d’honneur, et c’est un auteur que je connais peu, mis à part l’horrible et jubilatoire Souffle de l’ogre. Comme sa bibliographie est fort abondante j’ai pêché un peu au hasard. Requiem Caraïbe, bonne pioche.


AubertDagobert Leroy (oui son père avait un sens de l’humour assez spécial), 45 ans, est plutôt noir, plutôt baraqué, ex militaire et privé sur l’île de Saint- Martin dans les Antilles. Ce matin là on se croirait dans les années cinquante en Californie : Charlotte Dumas, métisse flamboyante et insupportable (en bref la femme fatale de cinéma) déboule avec sa mauvaise humeur dans son bureau. Il s’agit ni plus ni moins que de retrouver son père, qu’elle n’a jamais connu, qui a juste croisé sa mère vingt-cinq ans plus tôt à Sainte-Marie. Pas de piste, aucun témoin survivant ou presque, la routine pour Dag qui ne se doute pas qu’il va mettre les pieds dans un véritable nid de serpents.


Plus classique que ça, on peut pas.


Un privé baratineur, une cliente somptueuse et insupportable, la recherche a priori sans risque d’un (ou d’une) disparu, de jolies femmes, des bagarres et une situation qui part en vrille. Depuis l’invention du privé hard-boiled il y a eu des centaines de romans sur ce canevas. Alors pourquoi lire celui-là ?


D’abord parce que j’aime ça, et que quand c’est bien fait, ça marche. Ca marche chez Lehane, ça marche chez Pelecanos, ça marche  chez Block. Et bien ça marche aussi chez Brigitte Aubert. Voilà, le privé dur à cuire avec ses réflexions, ses vannes, ses répliques son sourire de tombeur, elle sait faire, comme les américains.


Et puis le décor change et ça aussi c’est bien. La balade d’une île à l’autre est bien agréable. Et puis elle maîtrise parfaitement les scènes à grand spectacle, comme celle de l’ouragan ou la confrontation finale. Et puis il y a de vrais affreux, bien convaincants, ingrédient indispensable du genre. Et puis il y a des coups de théâtres bien amenés. Et puis elle y introduit quelques variantes plutôt bienvenues … Allez, je vous révèle un petit secret … Malgré un début archi classique, le privé ne devient pas amoureux de sa cliente … Vous verrez … hihi …


Bref, une lecture extrêmement agréable.


Brigitte Aubert / Requiem Caraïbe, Seuil/Policiers (1997).

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Présentation

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