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21 juillet 2008 1 21 /07 /juillet /2008 21:55

Douces jeunes filles, amateurs de poésie et de finesses passez votre chemin. Cette note est à l’usage exclusifs des amateurs d’Hommes de l’ouest (ou du sud en l’occurrence), de héros avec poil aux pattes, flingues et, excusez le terme, couilles au cul ! Et oui, à l’instar d’une boisson désormais mythique, Stephen Hunter c’est pour les hommes, et dans Sept contre Thebes il y a aussi de la pomme !

1951, comté de Thebes, Mississipi. Ce qui fut un comté perdu et déshérité est devenu la prison pour noirs la plus crainte d'un sud resté très fortement raciste. C'est ce que va découvrir à ses dépends l'avocat Sam Vincent, parti enquêter sur la disparition d'un homme, qui se retrouve en danger de mort, dans les mains d'hommes coupés du reste du pays. Heureusement, avant de partir, il avait averti Earl Swagger, vétéran de la guerre du pacifique, guerrier dans l'âme, qui arrive à organiser son évasion. Mais pour réussir, il est obligé de se laisser prendre, et se retrouve aux mains d'hommes protégés par les plus hautes instances de l'état qui vont le torturer pour lui faire dire qui l'envoie. Earl s'en sort de justesse et n'a alors plus qu'une idée en tête : réunir les meilleurs tireurs du pays pour détruire Thebes.

De temps en temps, l'homme, aussi cultivé et raffiné soit-il (c’est tout moi ça), a besoin de sa dose de testostérone pure sans aditifs. Je n’en suis pas plus fier que ça, mais je n’en ai pas non plus honte. Et dans ce cas, tant qu’à faire, autant prendre les meilleurs. Un western de Eastwood, ou, pour la lecture, un polar de Stephen Hunter.

Ses thrillers regorgent de héros surarmés, de castagne et de suspense. Tout ce qu'il faut pour passer 500 pages survoltées, à tourner les pages avec délice (car cet auteur est un sacré raconteur d'histoires), en se disant qu'il ne faut peut-être pas trop se pencher sur les opinions du bonhomme, mais que l'un dans l'autre, de temps en temps, c'est quand même bon. Et que ses salopars étant de vraies ordures, on est bien content quand, dans un paroxysme d’explosions, de coups de feu et de coups de lattes ils finissent par se faire dessouder !

Certes, ce n’est pas de la grande littérature, et ce n’est pas d’une finesse à toute épreuve, mais de temps en temps, ça fait du bien. En prime, mais ce n’est pas pour ça qu’on le lit, cela rend bien le racisme ordinaire et assumé d’une époque. Après cette bonne dose de PAN !, BOUM ! et CROUNCH !, on peut retourner à Mozart.

Stephen Hunter / Sept contre Thebes  (Pale horse coming, 2001), Editions du Rocher/Thriller (2007). Traduction de l’américain par Elisabeth Luc.

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30 juin 2008 1 30 /06 /juin /2008 21:11

Rivages continue à rééditer les romans d’Elmore Leonard. Merci Rivages. Glitz était précédemment paru aux Presses de la Cité sous le doux titre de : Le jeu de la mort.

Vincent Mora est flic, à Miami. Mais pour l’instant il se trouve en convalescence à Porto Rico, après s’être fait tirer dessus par un voleur mal inspiré ayant tenté de lui prendre son portefeuille. Ce qui n’aurait dû être qu’un séjour tranquille devient un peu mouvementé quand il s’aperçoit que Teddy Magyk, qu’il avait arrêté pour le viol et le meurtre d’une vieille femme, se trouve à Porto Rico et semble en avoir après lui. Teddy qui fait une fixation, et veut absolument abattre Vincent. Tous les moyens seront bons. L’affrontement se déplace vite à Atlantic City, ville de casinos, avec le bon goût, les truands et les pigeons que cela implique. Teddy apprendra, à ses dépends, que ce n’est pas si facile de que ça de descendre Vincent Mora.

Comme je suis un peu fatigué par un rude week-end frontignanais, j’ai très envie d’être bref quoique complet. Cela donnerait : Du pur Leonard.

Pour ceux qui connaissent déjà, cela devrait suffire. Mais comme je suis un garçon consciencieux, et respectueux envers ceux qui prennent la peine de perdre quelques minutes de leur précieux temps à lire mes élucubrations, je vais développer, un tout petit peu.

Du pur Leonard, cela se décline de la façon suivante : Intrigue au cordeau, dialogues ciselés, superbe galerie de cinglés, regard amusé sur la vulgarité et la bêtise des truands, ici liés aux casinos, style vif et drôle, scènes visuelles et dynamiques … Du pur Leonard donc, avec son humour, son amour des personnages, et cette facilité apparente qui pourrait laisser croire que c’est facile d’écrire comme ça. Ce qui serait, bien entendu, une grave erreur.

D’ailleurs, il n’y a qu’un Elmore Leonard.

Comme je suis vraiment très consciencieux, j’ai cherché ce que signifie Glitz : Clinquant, tape à l’œil, d’un luxe tapageur (et pas forcément de bon goût). Comme ça, j’ai appris quelque chose aujourd’hui.

Elmore Leonard / Glitz  (Glitz, 1985), Rivages noir (2008). Traduction de l’américain par Fabienne Divigneau.


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20 juin 2008 5 20 /06 /juin /2008 11:44

Dérive sanglante de William G. Tapply était de toute évidence le début d’une série. Casco Bay en est le deuxième épisode.

Stoney Calhoun est parti pour une belle journée de pêche : Le client est agréable, pas trop bavard, et pas manchot. Les bars rayés sont au rendez-vous dans Casco Bay, Maine, USA. La journée est brutalement interrompue quand le client, débarqué sur une des nombreuses îles de la baie pour se dégourdir les jambes, découvre un cadavre mutilé et calciné. Bien qu’il n’en ait aucune envie, Stoney finit par accepter de devenir adjoint de son ami le shérif Dickman le temps de l’enquête. Une fois de plus, il va se découvrir des capacités cachées. Des capacités qui lui viennent d’une autre vie, sept ans plus tôt, avant l’accident qui lui a fait perdre la mémoire. Une ancienne vie qui lui envoie des cauchemars récurrents. Une ancienne vie qui intéresse l’homme au costume gris, qui vient régulièrement voir si les souvenirs reviennent.

On retrouve ici les qualités du premier roman de la série. Rien de révolutionnaire, mais des personnages attachants, un vrai talent pour les dialogues et les descriptions d’une nature superbe, et une intrigue parfaitement menée.

William Tapply y ajoute le mystère qui entoure le personnage de Stoney, amnésique, ancien flic, ou agent secret, capable d’enquêter et de tuer à mains nues. Tout cela fait que le lecteur accroche, et attend déjà avec impatience la suite. Un second tome qui fait sans aucun doute partie de ces excellents polars que l’on ne peut que conseiller. Plaisir de lecture assuré.

Il faut souligner, une fois de plus, le superbe travail de la maison Gallmeister, qui nous offre une vraie bouffée d’air du large.

William G. Tapply / Casco bay  (Gray ghost, 2007), Gallmeister (2008). Traduction de l’américain par François Happe.


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14 juin 2008 6 14 /06 /juin /2008 16:11

« Eh bien, il semblerait que j’essaie de corriger la race humaine dans son intégralité, un connard après l’autre ». Et oui, Honey Perry, propriétaire d’un mobil home en bordure du Parc des Everglades, Floride, USA, ne manque pas d’ambition. Et doit avouer que son projet avance assez lentement. Il faut dire qu’elle a la chance (ou le malheur) d’habiter une région où les connards en question ne manquent pas, et sont d’une qualité supérieure, surtout quand c’est le grand Carl Hiaasen qui leur donne vie !

Dans Croco-deal, Honey tente d’humaniser, entre autres, Boyd Shreave, mou, lâche, fainéant, content de lui, et, circonstance aggravante, télémarketeur. Et elle sait qu’elle part de loin car, comme elle le lui déclare sans chichi :

« Je vous donne ma voix pour l’oscar de la Tête de Con. Sans rire. »

Honey et Boyd ne sont pas les seuls cinglés qui vont se retrouver paumés sur une île au milieu du Parc. On trouve aussi :

Un métis séminole assez maladroit et très désireux de retrouver ses racines indiennes (mais tout aussi désireux de coucher avec l’étudiante blanche moitié cintrée qu’il enlève).

L’ex employeur d’Honey, obsédé sexuel agressif qui pue le poisson.

Des pénitents faisant partie de la « Première Assemblée Maritime Résurrectionniste de Dieu ». Voilà comment Hiaasen les présente : « Suant et soufflant, le pénitent d’avançait avec le grand sourire, la confiance en soi et la stupidité des bien-pensants. » Il repartira illico la queue entre les jambes, si je puis m’exprimer ainsi.

Plus une future ex-femme un peu givrée, une belle plante qui choisit mal ses conquêtes, un privé pas vraiment téméraire … Sans compter de nombreux moustiques, fourmis rouges, alligators, aigles pêcheurs et autres habitants naturels des marais.

Tout cela pourrait être juste un exercice de casse pipe un peu aigri, mais non. C’est que Hiaasen les aime ses personnages, du moins en aime-t-il certains. Et cela ce sent. D’ailleurs, comment ne pas aimer Honey ? Même son ex-mari, fatigué de subir ses emballements, ne peut la quitter vraiment car, comme il l’explique à leur fils :

« Personne ne dit qu’elle est normale, intervint Skinner, même pas elle. Mais il y a beaucoup trop de personnes soi-disant normales qui n’ont ni âme ni couilles ». Deux attributs dont les héros de Hiaasen sont abondamment pourvus. 

Alors embarquez dans le kayak foutraque d’Honey, profitez de la beauté d’un lever de soleil sur les Everglades, pourfendez la connerie, la mesquinerie et l’égoïsme. En un mot, lisez Hiaasen, et n’oubliez pas d’éclater de rire quand les méchants, les cons, les minables en prennent plein la tronche.

Carl Hiaasen / Croco-deal  (Nature girl, 2006), Denoël (2008). Traduction de l’américain par Yves Sarda.

PS. Je sais, ce résumé ne donne pas la moindre idée de l’intrigue. C’est normal, on ne résumé pas un livre de Carl Hiaasen. On le lit, et on rigole. Exécution !

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6 juin 2008 5 06 /06 /juin /2008 22:10

La quatrième de couverture cite Vertigo et Laura à propos de ce roman, Le vent du diable de Richard Rayner. Et c’est bien de ce côté-là, aussi bien pour le décor que pour la thématique, qu’il faut aller chercher les références du roman.

1956. Maurice Valentine est un des architectes en vogue de la côte ouest. Il côtoie les stars, gagne des fortunes et est sur le point de se lancer en politique grâce à l’appui de son beau-père sénateur. Sa collaboration avec Paul Mantilini, l’un des personnages les plus influents et dangereux de las Vegas lui fait miroiter des gains faramineux, d’autant plus que la ville est en train de se développer à une vitesse vertigineuse. Tout va bien pour cet homme jeune, parti de rien, et prêt à tout pour aller le plus haut possible. Jusqu’à la rencontre avec Mallory Walker, jeune architecte richissime, belle, intelligente, dure, et au moins aussi ambitieuse que lui. Une rencontre qui va faire dérailler la belle machine, et mener Maurice Valentine au bord du gouffre.

Mis à part une ou deux faiblesses dans l’intrigue, je ne vois que des qualités à ce roman. Des personnages forts. Une bonne histoire, certes classique, avec sa femme fatale qui vient enrayer un mécanisme trop bien huilé, et son atmosphère très proche des films cités plus haut, mais bien contée.

Mais surtout, un contexte historique et politique intéressant, complexe, et très bien rendu : la naissance de Las Vegas, les liens entre le politique, la presse et la pègre, la grande époque de la guerre froide, de la paranoïa anti-communiste et les essais nucléaires du Nevada, avec toutes les pressions, horreurs et mensonges que cela suppose. Cette société mafieuse et luxueuse très bien décrite, avec ses luttes de pouvoir, sa fascination de l’argent et du clinquant. Le contraste avec les conditions de vie des musiciens noirs est bien campé, sans didactisme mais avec justesse … Que des qualités donc.

Des qualités et, indéniablement, de très belles pages, sur des thèmes aussi variés que l’architecture, le jazz, ou même le mélange de terreur, de fierté et de fascination que provoquait à l’époque le nucléaire.

D’où vient alors que je ne soit pas complètement conquis ? Pourquoi bien que ce roman m’ait plu, et que j’aie pris plaisir à se lecture me laisse-t-il une impression mitigée ? Un « bien sans plus » ?

Je ne saurais le dire. L’humeur du moment, la fatigue, quelque chose qui cloche mais sur lequel je ne sais pas mettre le doigt … A moins que cela ne soit la trop grande ambition du roman, le trop grand foisonnement de thématiques, de personnages, difficile à concilier sans apporter une énergie, un folie, une originalité stylistique qui manquent un peu ?

Je suis curieux de lire d’autres avis.

Richard Rayner / Le vent du diable  (The devil’s wind, 2005), Rivages thriller (2008). Traduction de l’américain par Catherine Richard.

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2 juin 2008 1 02 /06 /juin /2008 20:01

Voilà un petit billet qui ne va rien vous apporter. Pourquoi ? Parce qu’il est consacré à mon personnage préféré, celui qui me met systématiquement en joie, j’ai nommé l’incontournable John Dortmunder. Je perds  absolument tout mon esprit critique quand il s’agit de lui. Le seul fait de lire son nom suffit à agacer mes zygomatiques, dès qu’il ouvre la bouche ou qu’il bouge, je souris, et à la première tuile qui lui tombe dessus, j’éclate de rire.

Pour la première fois, Donald Westlake, son génial créateur, a rassemblé les différentes nouvelles qui l’avaient pour protagoniste. On trouve donc dans Voleurs à la douzaine, John Dortmunder à la campagne, John Dortmunder et le divorce, John Dortmunder et le poker, John Dortmunder à une réception de Noël, John Dortmunder et l’équitation, John Dortmunder et le sport, John Dortmunder et William Shakespeare … On a même le John Dortmunder d’un monde parallèle.

Tout cela, bien entendu, revu et corrigé par le filtre un tout petit peu déformant de l’humour sans pareil de Westlake et du réalisme et du pessimisme de John.

Même l’introduction, sobrement intitulée « Dortmunder et moi, sans en faire un roman » est drôle et géniale ! Elle suffirait presque à elle seule à justifier l’acquisition du recueil. Elle éclaire, là encore au travers du prisme de l’humour de l’auteur, son travail de création autour de son personnage.

Le format court ne laisse pas Westlake créer les enchaînements de catastrophes dont il a le secret, mais lui permet de mettre son personnage dans les situations les plus ahurissantes et les plus variées. Situations dont il se sort, bien entendu. Sans rien gagner, ou presque, comme d’habitude.

Seul problème, ce recueil me laisse face à une interrogation quasi métaphysique, qui a failli m’empêcher de dormir, une fois que j’ai eu fini de rire : Donald Westlake est-il TOUJOURS génial quand il donne vie à son personnage ? Ou est-ce devenu pour moi un réflexe pavlovien : Dortmunder = Rire ? Mystère. Je penche bien entendu pour la première hypothèse, mais la seule constatation un peu scientifique est que, une fois de plus, ça a marché.

Donald Westlake / Voleurs à la douzaine  (Thieves’ dozen, 2004), Rivages thriller (2008). Traduction de l’américain par Jean Esch.

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31 mai 2008 6 31 /05 /mai /2008 19:34

Nick Travers a été élevé par Loretta et Jojo, dans leur Blues bar de la Nouvelle-Orléans. Nick est blanc, ancien joueur de football et est devenu prof à la fac, spécialiste du Blues. Loretta et Jojo sont noirs, Loretta a été chanteuse de blues. Quand deux malfrats viennent la bousculer et lui poser des questions sur son frère Clyde, ancienne gloire de la soul, qu’elle croit mort depuis quinze ans, elle demande de l’aide à Nick. Celui-ci, habitué à enquêter pour retrouver de vieux bluesmen oubliés, va se renseigner et, s’il est toujours vivant, essayer de le retrouver. Dans le même temps, du côté de Memphis, Abby, jeune fille d’une vingtaine d’année, fuit les tueurs qui ont abattus ses parents.

Une petite précision, ce roman est paru en grand format au masque, et c’est rivages noir qui en assure la réédition en poche.

Les différentes critiques, pubs, quatrièmes de couvertures font appel à Faulkner, Chandler, Burke ou Willeford pour parler de ce roman d’Ace Atkins. Moi il me fait plutôt penser à Crumley. Pour ses personnages, pour l’amitié qui les lie, pour leur facilité à faire de gros, très gros dégâts autour d’eux … Mais également pour la galerie de méchants complètement allumés, que je verrais bien face à Milo et Sughrue, pour ses femmes fatales … Un Crumley qui aurait changé le Montana et le Texas pour le sud. Quoi qu’il en soit, vous remarquerez que les références sont plutôt élogieuses, à juste titre.

Des méchants délectables, une belle galerie de personnages secondaires, une intrigue plutôt classique émaillée de très belles scènes de castagne. C’est déjà bien. Et en prime un voyage historique, géographique et humain au pays du blues et de la soul généreux, érudit et mélancolique. Un voyage d’une grande sincérité qui ravira tous les amateurs de cette musique, enchantés de la voir défendue avec autant de talent et d’amour.

Ace Atkins / Blues bar  (Dark end of the street, 2002), Rivages noir (2008). Traduction de l’américain par Nathalie Mège

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14 mai 2008 3 14 /05 /mai /2008 21:27

Voilà, ça devait arriver. C’est arrivé. J’ai été déçu par un roman de Pelecanos. Attention, relativement déçu, déçu parce que j’en attends beaucoup. Mais c’est arrivé, avec Les jardins de la mort.

1985. Le tueur au palindrome sévit à Washington, assassinant des adolescents dans les jardins. Gus Ramone et Doc Holiday, deux jeunes flics sont sur place, pour maintenir l’ordre. L’enquête est dirigée par T. C. Cook, une légendes dans le service. Les meurtres s’arrêtent seuls sans que le coupable ait été arrêté. Vingt ans plus tard, Cook est à la retraite, mais n’a jamais oublié l’affaire. Gus est toujours dans la police, au service des homicides. Doc a démissionné avant d’être mis en cause par une enquête des affaires internes. Il a monté un service de limousines. Quand le corps d’Asa est retrouvé dans un jardin, tué d’une balle dans tête, les trois hommes, chacun à sa façon, vont reprendre l’enquête.

Pelecanos continue sa chronique des quartiers populaires de Washington. Ses héros, qu’ils soient flics, privés ou anciens taulards en cours de réinsertion sont toujours des gens ordinaires, se débattant avec les problèmes ordinaires : Comment boucler les fins de mois, comment élever ses gamins sans les étouffer et en les empêchant de tomber dans la drogue ou la délinquance, comment résister au racisme, à l’intolérance, que faire face à la paupérisation et à la violence de certains quartiers … Son style est le même : sec, efficace, rythmé comme (et par) les morceaux qu’écoutent ses personnages. Si l’on veut connaître, un jour, la vie quotidienne à Washington, en dehors du strass et des paillettes médiatiques du monde politique il suffira de lire, ou relire, Pelecanos. Tout y est.

Malgré tout, ce nouveau roman est moins réussi que les autres. Peut-être parce que, prenant le risque de changer, une de fois de plus, de personnages alors même que les précédents « fonctionnaient » parfaitement, il n’a pas réussi à donner la même épaisseur à ces trois nouveaux venus. Peut-être parce qu’il y a moins d’intensité dans l’intrigue. Sans doute aussi parce qu’il est difficile de se maintenir toujours au niveau d’excellence qui est le sien. Parce que personne, même pas lui, ne peut écrire uniquement des romans ayant la force et l’impact de Un nommé Peter Karras, Hard Revolution, Soul circus ou Anacostia river blues.

Une petite baisse de régime donc, mais un polar qui se lit quand même avec plaisir et intérêt. C’est juste qu’à cause de son talent, on attend beaucoup plus de George Pelecanos. Comme disait Desproges, on ne peut être déçu que par ses amis.

George Pelecanos / Les jardins de la mort (The night gardener, 2006) Seuil/Policiers (2008). Traduit de l’américain par Etienne Menanteau.

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12 mai 2008 1 12 /05 /mai /2008 21:42

En cette fin d'année 1922, Tommy Post est jeune et plein de rêves. Des rêves qui forcément, doivent se concrétiser rapidement. Tommy Post travaille depuis six mois aux studios Coronet, comme garçon de courses sur le dernier film du magicien, Theodore Harker. Quel meilleur endroit et quel meilleur travail pour réaliser ses rêves ? Rapidement Tommy saisit sa chance et devient scénariste. Hollywood, l'âge d'or du muet, les films qui transportent l'Amérique toute entière, Tommy Post fait partie de cette aventure. Sans savoir que le compte à rebours est déjà entamé, que la crise de 29, le parlant et la main mise des financiers sur les studios sont proches, tout proches.

 

Pas de détective, pas de policier, pas d'enquête ... Mais un meurtre, un vrai, celui du cinéma muet (c'est ce qu'écrivait Michel Lebrun en 1979). Et c'est exactement l'impression qui se dégage de ce roman noir à la fois flamboyant et crépusculaire (mais les crépuscules ne sont-ils pas flamboyants ?). Le lecteur fasciné assiste à un autre meurtre : celui de l'Art et des artistes, lentement mais inexorablement étranglés par les banques et les financiers.

 

L’histoire du cinéma a montré que la bataille que met ici en scène Robert Bloch continua, et continue encore ; que les artistes ont dû, doivent et devront se battre pour protéger leurs œuvres contre des financiers qui ne voient rien d'autre que le bénéfice immédiat, et que la guerre Art contre Industrie est depuis inhérente à la création cinématographique.

Robert Bloch illustre cette guerre, et le moment de la passation de pouvoir dans une scène qui, sous des dehors feutrés, est d’une très grande violence : celle où le financier du studio, prenant petit à petit le pouvoir, met en pièce l’œuvre d’art dans laquelle scénariste et metteur en scène ont mis tout leur talent et toute leur âme. Elle est d’une violence bien plus éprouvante et impitoyable que bien des scènes d’étripage ! D’autant plus violente que l’on sait que ce genre de scène se joue, partout, tous les jours. Et que, contrairement à ce qui se passe dans les mauvais polars, dans la vraie vie, la vrai méchant, castrateur, n’est pas arrêté mais récompensé.

Là n'est pas le seul intérêt de ce magnifique roman. Ce n'est même pas son principal sujet. C'est une véritable déclaration d'amour au cinéma des années 20, à ses stars, à sa magie, aux rêves qu'il a fait naître chez des générations de gamins, à la passion de ses créateurs que livre Robert Bloch. Un chant d'amour pour ces hommes et ces femmes qui, contre tous les obstacles, ont crus en leurs rêves, ont cru qu'ils pouvaient en faire des œuvres, et les partager avec le monde entier. Un chant d'amour d'autant plus poignant que l'auteur, et les lecteurs, savent qu'il s'adresse, dès le début, à un condamné. Il n'en est que plus beau. Si comme moi, et comme bien d'autres, vous aviez raté ce roman à sa première publication en France, précipitez-vous, lisez-le, et remerciez les éditions Moisson rouge de nous l'offrir. Merci moisson rouge !

Qui plus est, moisson rouge qui ne fait pas les choses à moitié publie sur son site un dossier passionnant sur l’auteur.

Robert Bloch / Le crépuscule des stars  (The star-stalker, 1968). Moisson rouge (2008). Traduit de l’américain par Jean-Paul Gratias.

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29 avril 2008 2 29 /04 /avril /2008 23:19

Alex McKnight, ancien flic de Detroit puis privé est venu se réfugier dans le Michigan, à proximité de la frontière canadienne et vit de la location de cabanes aux amateurs de motoneiges. Un soir d’hiver où il a retrouvé Nathalie Reynaud, son amie canadienne, dans un hôtel de la ville voisine, un vieil homme les dévisage longuement avant de laisser devant leur chambre un chapeau rempli de neige dans lequel il a glissé un mot : « Je sais qui vous êtes … ». Alex est persuadé d’avoir affaire à un vieux qui perd la tête. Le lendemain, il apprend que le vieil homme est mort gelé dans la nuit. Il décide alors d’essayer d’en savoir un peu plus sur lui, et se retrouve pris dans une très vieille histoire, liée à la famille de Nathalie.

Après Ciel de sang, revoilà Alex McKnight. On retrouve ici les mêmes qualités que dans le premier volume de la série. 

Dans un premier lieu, les points forts classiques que Steve Hamilton partage avec de nombreux collègues américains. Points que l’on peut, suivant le caractère ou l’humeur, trouver répétitifs, ou rassurants, juger la marque d’une uniformisation du genre, ou le soucis, très yanqui, que le cochon de client (à savoir le lecteur), ait un minimum vital, c'est-à-dire le pur plaisir de lecture au premier degré.

A savoir : Des personnages comme les aiment les amateurs de polar, déglingués, blessés, mais entêtés et fidèles, durs au mal et prêt à tout pour venir en aide à un ami. De vrais hard-boiled en un mot. Et une intrigue solide, bien mené, qui donne envie de tourner les pages.

Ensuite, il y a la marque de fabrique Steve Hamilton, ce qui fait son originalité : La présence de la nature dans toute sa grandeur : froid, vent et neige sont, dans ces parages, encore plus meurtriers que les hommes. Il écrit des polars qui ne sont ni urbains (comme la grande majorité), ni même ruraux, mais sauvages. Dans les grands espaces gelés du Michigan, l’homme n’est qu’un invité, pas toujours très bien accueilli. Dès que l’on ouvre les pages, le blizzard souffle et il faut se réfugier près du radiateur ou de la cheminée pour ne pas risquer des engelures. Alors, prenez le frais et l’air des grands espaces avec Steve Hamilton.

Steve Hamilton / Un chapeau dans le neige (Ice Run, 2004). Seuil/Thriller (2007). Traduit de l’américain par Laurent Bury.

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  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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