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22 avril 2014 2 22 /04 /avril /2014 23:17

Yes, Jo Nesbo est de retour. Inutile de faire durer le suspense, vous le savez sans doute tous, Harry Hole, après Fantôme est … Toujours sec dans ses titres le norvégien, c’est Police.

Nesbo

Oslo. Un ancien policier est sauvagement assassiné sur les lieux d’un crime jamais élucidé. Il avait fait partie de l’équipe ayant échoué dans son enquête. Lorsqu’un second policier est tué dans des circonstances analogues, la police doit se rendre à l’évidence, un tueur a décidé de s’en prendre aux flics, en particulier à ceux qui n’ont pas élucidé les affaires sur lesquelles ils ont travaillé. D’habitude, ce genre d’affaire revenait à Harry Hole. Mais Harry n’est plus là pour les aider. Pendant ce temps, dans l’aile sécurisée d’un hôpital, un homme est dans le coma, étroitement surveillé. Certains attendent avec impatience qu’il se réveille pour parler. D’autres redoutent qu’il se réveille pour parler …


Alors, il est dans quel état Harry ? Je le dirai pas.


Alors qu’est-ce qui s’est passé à la fin de Fantôme ? Je le dirai pas non plus.


Alors merde, il va revenir, il est toujours vivant ? En forme ? Toujours rien, je serai muet comme une tombe.


Jamais peut-être Jo Nesbo n’avait maîtrisé à ce point le suspense, la façon de vous laisser avec un doute atroce à toutes les fins de chapitres. Attention, lecture déconseillée aux cardiaques. Oui, ça fait un peu procédé ou recette de cuisine. Oui, mal maîtrisé ça aurait pu énerver, agacer, voire carrément gonfler.


Sauf que Jo Nesbo est un maître cuisinier et qu’il assaisonne à la perfection les recettes les plus connues, battues et rabattues. Et je ne sais pas vous, mais moi j’ai marché comme un seul homme. Comme un couillon, à tous les coups. Et puis on sent qu’il s’est fait tellement plaisir à jouer avec nos nerfs, que ce serait gâcher de ne pas prendre plaisir nous aussi.


Comme quoi, le thriller quand c’est bien fait, c’est pas mal aussi. Et là, cela relève de l’horlogerie suisse, du grand artisanat, voire du grand art. Jouissif.


Jo Nesbo / Police (Politi, 2013), Série Noire (2014), traduit du norvégien par Alain Gnaedig.

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20 avril 2014 7 20 /04 /avril /2014 15:41

Avis de festival :

WebPolar7 avril2014

L'association Ulysse présente la 7e Rencontre autour du polar

Samedi 26 avril 2014, de 15h à 20h à l'Orangerie, avenue de l'Europe, 95 600 Eaubonne

7 ans déjà que l’association Ulysse propose au public de découvrir ou redécouvrir des auteurs de polar singuliers, engagés ou dégagés mais toujours passionnés et passionnants. Seront présents cette année :

- Patrick Bard

- Abdel Hafed Benotman

- Bernard Boudeau

- Fabrice Bourland

- Luc Fivet

- Bruno Jacquin

- Nicolas Jaillet

- Claudie Lecoeur

- Jean-Hugues Oppel

- Raynal Pellicer

- Titwane

… Et comme toujours, la Rencontre autour du polar, c'est :

- Des auteurs qui viennent à la rencontre du public et dédicacent leurs livres (de 15 à 20h),

- Un auteur qui interviewe d'autres auteurs (à 16h),

- Du Jazz à Eaubonne (à 18h30) avec les musiciens d'Eaubonne Jazz,

- Une artiste peintre qui expose ses œuvres (Christine Orihuela, artiste peintre de Saint-Leu-la-Forêt),

- Un bar et de la restauration légère sur place,

- Une entrée libre et gratuite pour une expérience enrichissante,

- L'occasion de faire le plein de livres passionnants pour cet été,

- Un après-midi ensoleillé dans le cadre bucolique du parc de Mézières...

 

Et cette année, une exposition d'affiches des élèves de 5e du collège Ste-Honorine de Taverny !

NOUS VOUS ATTENDONS NOMBREUX !!!

Tous les renseignements sur le site.

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18 avril 2014 5 18 /04 /avril /2014 16:49

Entre deux pavés, un roman de Massimo Carlotto fait parfaitement office de trou normand. C’est en général rapide, sacrément raide et ça décape les neurones ! Le souffle court ne fait pas exception.

Carlotto

Ils sont jeunes, cyniques, brillants et ambitieux. Ils en ont assez de subir la dictature des vieilles barbes qui ne veulent pas voir que le monde change. Ils ont décidé de prendre les choses en main, quitte à dégager les vieux. Ils sont quatre et se sont rencontrés en Angleterre où ils faisaient des études d’économie et ça va fumer. Seulement attention, si Inez navigue dans un milieu presque légal (les banques suisses), Zosim est dans la mafia russe, Mister Banerjee trafique dans la disparition de déchets hautement toxiques et les récupérations d’organes sur sujets vivants, et Giuseppe Cruciani a vendu ses parrains de la mafia calabraise … Des domaines d’activité très lucratifs, mais à haut risque. Tout ce beau monde, plus quelques narcos sud-américains, les services secrets russes et quelques autres malfaisants va se retrouver à Marseille où Bernadette Bourdet, flic plus que limite entend bien faire régner sa loi dans sa ville.


Ne cherchez pas les gentils, il n’y en a pas. Que des affreux, des infects, plus ou moins séduisants, plus ou moins salauds, plus ou moins prêts à verser eux-mêmes le sang de leur prochain, avec plus ou moins de raffinement dans la cruauté. Mais globalement que des fils de pute.


Et ça dégage, à toute allure. De Tchernobyl à Ciudad del Este (Paraguay), de Zurich à Marseille, de Milan à Alang (Inde), si des gens ont compris la mondialisation, ce sont bien les mafieux de tous bords.

Les quatre jeunes gens très propres sur eux sont d’autant plus dangereux et immondes qu’ils présentent bien et se gardent bien de tremper dans des affaires qui pourraient les mettre en contact avec les truands de la rue, ceux qui tuent, étripent, dealent. De parfaits représentants du capitalisme décomplexé et triomphant. Le tableau est sans pitié, l’écriture et les coups de griffes de Carlotto sanglants.


Deux cent pages à fond, qui se lisent le souffle coupé et le cœur au bord des lèvres.


Massimo Carlotto / Le souffle court (Respiro corto, 2012), Métailié (2014), traduit de l’italien par Serge Quadruppani.

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18 avril 2014 5 18 /04 /avril /2014 10:15

« Muchos años después, frente al pelotón de fusilamento, el coronel Aureliano Buendía había de recordar aquella tarde remota en que su padre lo llevó a conocer el hielo. Macondo era entonces una aldea de veinte casas de barro y cañabrava construidas a la orilla de un río de aguas diáfanas que se precipitaban por un lecho de piedras pulidas, blancas y enormes como huevos prehistóricos. »

 

….

 

« Sin embargo, antes de llegar al verso final ya había comprendido que no saldría jamás de ese cuarto, pues estaba previsto que la ciudad de los espejos (o los espejismos) sería arrasada por el viento y desterrada de la memoria de los hombres en el instante en que Aureliano Babilonia acabara de descifrar los pergaminos, y todo lo escrito en ellos era irrepetible desde siempre y para siempre, porque las estirpes condenadas a cien años de soledad no tienen una secunda oportunidad sobre la tierra. »

 

Gabriel-Garcia-Marquez

Entre ces deux extraits, l’un des romans les plus magistraux du siècle dernier, un des plus fabuleux « desde siempre y para siempre ». Un des rares que j’ai lu deux fois, et que je sais que je relirai. De ceux qui vous happent dès la première phrase et que vous refermez enchanté, au sens premier du terme.

 

Quand mon grand est né, on cherchait un prénom qui s’écrive et se dise de la même façon en français et en espagnol. Jusqu’à ce que mon regard passe sur ma bibliothèque et que l’évidence nous tombe dessus. Gabriel ! Pas comme l’archange complètement con de Christopher Moore ! Comme le grand García Márquez.

 

Et si un jour on se décide à écrire, quelque part, le nom de notre maison, il ne pourra y en avoir qu’un, Macondo.

 

J’ai vu une fois Gabriel Garcia Marquez, c’était il y a longtemps, à Biarritz, lors du festival de cinéma latino américain. Il était venu assister à la projection d’un film de son ami le réalisateur cubain Tomás Gutiérrez Alea, il est rentré juste avant le début, juste devant moi. On s’est regardé avec une copine, putain c’est García Márquez ! En sortant j’ai juste pu sortir un couillon « Muchas gracias, me gustan muchos sus libros » Grandiose …

 

Que dire de plus aujourd’hui ? Muchas gracias.

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14 avril 2014 1 14 /04 /avril /2014 19:27

Hervé Le Corre est un auteur rare. Après Les cœurs déchiquetés, on attendait depuis cinq ans. Cela valait la peine, Après la guerre est une magnifique réussite.

LeCorre

Bordeaux dans les années cinquante. Les plaies de la guerre sont loin d’être cicatrisées et une autre pointe son nez, au sud, en Algérie. Le commissaire Darlac est une pourriture. Collabo il a réussi à passer au travers de l’épuration de la libération et, grâce à un réseau de pourris de tous types, chez les flics autant que chez les truands, il tient la ville malgré ceux qui voudraient bien avoir sa peau. Daniel a vingt ans, il travaille dans un garage et s’apprête à partir en Algérie. Ses parents ont été pris dans une des dernières rafles de la guerre et sont morts dans les camps. Un jour un homme débarque au garage, pour faire réparer une moto. Un revenant qui va faire remonter à la surface ce que tant de gens veulent cacher. Pendant ce temps, en Algérie …


Il y a les polars prêt à porter, tout-venant. Hervé le Corre livre ici le haut de gamme du sur-mesure dans la grande tradition. Le classique dans sa perfection, un peu comme les meilleurs films de Clint Eastwood … Cela paraît presque simple, ou naturel, tant la richesse et la puissance du roman s’appuient sur une écriture et une construction qui évite toute esbroufe pour se concentrer sur l’essentiel.


L’essentiel commence avec les personnages. Le flic pourri, ses comparses, sa famille ; Daniel et ses peurs, ses doutes face à la guerre, la difficulté de rester fidèle à des valeurs pas toujours très claires à vingt ans quand on est confronté à la souffrance, la peur, la mort ; et les autres, marqués par le passé, fracassés, révoltés ou résignés, valeureux, lâches, pourris … Des personnages complexes et incarnés, dont on ressent les doutes, les rages, les envies et qui portent le roman tout au long de ses cinq cent pages.


La ville de Bordeaux ensuite, sale, à peine sortie de la guerre, peinant à digérer ses traumatismes et ses trahisons, à l’image du pays. Une ville grise et humide, dont les rues sombres sentent non pas le grand cru mais la vinasse et la vase de la Gironde.


Tous ces personnages, la ville, mais aussi l’Algérie participent à une danse macabre, lente spirale qui, au gré d’une intrigue éclatée entre les différents protagonistes entraine le lecteur vers un final inévitable. Comme dans la spirale, les différents bras tournent les uns autour des autres, se rapprochant petit à petit d’un centre qui ne peut être que tragique.


A tous ces ingrédients qui, à eux seuls, donneraient déjà un excellent polar il faut ajouter la saisissante peinture de toute une époque historique trouble. Cette époque où les vilains secrets de la guerre, les compromissions de la collaboration, les petits arrangements de la libération, les rancœurs et les haines qui en découlent, les envies de vengeance où les douleurs insupportables se mêlent à d’autres drames en devenir en Algérie.


Hervé le Corre excelle dans la description ô combien difficile de toutes ces souffrances. Il excelle car il arrive à écrire l’indicible de façon crédible, sans tomber dans le voyeurisme ni le pathos dégoulinant. Il émeut, terriblement, dans la dignité. Et cela donne une très grande force à ses personnages et à son roman.


Nous avons attendu cinq ans, cela valait la peine, un grand roman à découvrir absolument.


Hervé Le Corre / Après la guerre, Rivages/Thriller (2014).

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12 avril 2014 6 12 /04 /avril /2014 12:28

Pour fêter leurs dix ans les Quais du polars se sont associés aux éditions points et nous proposent des nouvelles inédites des 9 précédents gagnants des prix du festival. Un tour d’horizon du polar français ma foi assez réjouissant.

 

On y trouve :

 

BrevesNoir

La meute, une fiction guerrière toujours aussi efficace de DOA, de quoi nous faire patienter (mais pas trop j’espère) en attendant son prochain roman. Patienter et saliver tant on a plaisir à retrouver le style DOA et l’ambiance de certains passages de Citoyens clandestins.


Deux nouvelles inspirées de faits réels : les bébés dans le congélateur pour Le clandestin de Franck Thilliez et une histoire de barbe bleue contemporaine pour Un canard au sang de François Boulay.


Un portrait tendre et un rien fantastique, de deux personnages hors norme, sous la plume de Marcus Malte. Un portrait qui pose plus de questions qu’il n’apporte de réponses, mais qui laisse une empreinte durable dans la mémoire. Cela s’appelle Max Vegas.


Un carnet de voyage dans les Caraïbes auquel il ne manque ni punch (dans tous les sens du terme), ni humour. C’est L’échappée, signée … Caryl Férey.


Antoine Chainas signe Une trajectoire. Radiographie sans concession d’un parcours de battant. C’est sec, net, sombre, sans pitié et sans grand espoir.


Serge Quadruppani s’intéresse lui aux mouvements de révolte et de révolution démarrés en Tunisie dans Le point de vue de la gazelle. Malgré la violence de ce qui est évoqué, c’est sans doute le texte le plus porteur d’espoirs.


Antonin Varenne nous amène dans une petite ville déjà morte, même si elle ne le sait pas encore. Dernière lumière, la bien nommée est une nouvelle d’une tristesse terrible.


Pour finir, on se demande bien ce qu’a pu fumer ou boire ou les deux Olivier Truc chez les lapons. L’exfiltration de Snowdenski est un texte complètement allumé, totalement burlesque qui laisse un goût de vodka et de cornichon au miel dans la bouche. Il faut lire pour comprendre …


C’est la règle du genre, quand on a comme ça des auteurs aussi différents rassemblés dans un recueil on a forcément se chouchous. Avant de dire qui j’ai préféré, il est important de noter que, cette fois, toutes les nouvelles sont de bonne facture. Le recueil est donc, dans son ensemble, une réussite.


Ensuite, sans surprise (c’est peut-être une peu triste d’ailleurs), les textes de mes auteurs préférés sont ceux que j’ai trouvé les meilleurs. Et chez chacun j’ai retrouvé les thématiques et le style qui me plaisait déjà chez eux.


DOA tout en nerfs, impeccable dans l’action, sec comme un coup de trique. Marcus Malte incomparable dans sa façon de donner vie à des êtres à la marge avec une tendresse et une empathie remarquables. Caryl Férey voyageur et drôle, car oui, Caryl Férey est souvent voyageur, et très souvent drôle quand il ne décide pas d’être très noir. Antoine Chainas disséquant une vie exemplaire (dans le sens qui illustre par l’exemple) de façon impitoyable. Serge Quadruppani auprès des révoltés et des révolutions d’aujourd’hui. Bref on est en terrain connu, et c’est bon.


J’ai moins aimé les nouvelles de Franck Thilliez et François Boulay, et pour finir, s’il y a eu des surprises, c’est dans la mélancolie d’Antonin Varenne, et du côté complètement allumé de la nouvelle d’Olivier Truc. Mais il est vrai qu’eux on les connaît encore mal, même si leurs premiers romans ont fait causer dans les chaumières.


En résumé, c’est très bien, si vous aimez les nouvelles vous pouvez y aller les yeux … grands ouverts.


Collectif / Brèves de noir, Points (2014).

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10 avril 2014 4 10 /04 /avril /2014 21:30

Je l’ai déjà dit, je le redis, je le redirai très certainement, Maester est grand.

 

Il le prouve une fois de plus. Ses dessins d’actualité sont d’un humour cruel et ô combien aiguisé.

 

Regardez donc et .

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8 avril 2014 2 08 /04 /avril /2014 23:22

Lors de sa venue à Toulouse à la librairie Ombres Blanches, Aurélien Masson, patron de la série noire, nous en avait longuement parlé. La faux soyeuse d’Eric Maravélias tient toutes les promesses de son éditeur.

Maravelias

Fin des années 70 Franck est un petit loubard de Cachan. Il zone avec ses potes, traficote, glande, évite de rentrer à la maison où rien ne l’attend. Avec eux il traine chez Léon, le bistro où ils ont leurs habitudes, pour boire un coup, fumer et espérer entrevoir Cathy leur muse, leur fée, la fille du patron. En 1999, Franck est détruit, junkie, SIDA. L’héroïne est passée par là, l’addiction de plus en plus forte, les trafics, les coups de plus en plus minables pour se payer sa dose. Elle a abimé puis détruit le lien social qui existait. C’est maintenant chacun pour soi, des zombies trainent dans les rues, des vengeances, des coups bas, et Cathy n’est même plus là pour illuminer leur quotidien. Vingt années de descente aux enfers, jusqu’à la fin, inéluctable.


Attention, ce n’est pas drôle. Mais ce n’est pas misérabiliste non plus. On pense immédiatement à Bunker avec cette chronique de la délinquance et de la chute annoncée. Bunker la prison en moins, la dépendance terrible en plus. Avec aussi, en plus, incroyablement, quelques pages lumineuses d’un lyrisme d’autant plus frappant qu’on ne l’attend pas là.


Aucune complaisance dans ce regard, ni pour le narrateur, ni pour ses potes. Mais aucun jugement non plus, et une immense humanité dans le regard. Eric Maraviélas raconte, ne cache rien des horreurs de la drogue, rien de ce que peuvent faire des junkies en manque. Pas d’excuse, pas de justification. Juste des récits de parcours qui peuvent éclairer le lecteur (s’il le veut) sur ce qui les a amené là. Et puis ces moments magiques, qui irradient, la douceur de l’air, une chevelure au soleil, des potes retrouvés … Qui rendent d’autant plus sombres les ténèbres qui ne peuvent manquer de suivre.


C’est très dur, le final est quasiment insupportable, et pourtant c’est aussi très beau, et très émouvant. Une vraie découverte de la série noire.


Pour la petite histoire, et pour fermer un peu le bec de ceux qui clament partout qu’il faut faire partie d’un certain milieux pour être éditer et que tout n’est qu’histoire de copains, de coucheries, ou de retours d’ascenseurs … Le manuscrit de La faux soyeuse est arrivé chez Gallimard par la poste, l’auteur était inconnu … Et vous l’avez dans les mains.


Eric Maravélias / La faux soyeuse, Série Noire (2014).

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3 avril 2014 4 03 /04 /avril /2014 20:49

Pain, éducation, liberté conclue la trilogie de la crise du grec Petros Markaris. On ne peut que constater que la situation en France ressemble beaucoup à celle de la Grèce …

Markaris

Janvier 2014, la Grèce vient de sortir de l’euro et revient à la drachme. Par la même occasion le gouvernement annonce que les salaires des policiers ne seront pas payés pendant trois mois. Dans les rues les manifestations se succèdent et les gros bras de l’extrême droite s’en prennent aux immigrés. C’est dans cet ambiance détendue qu’un premier cadavre est retrouvé : un entrepreneur, qui pendant sa jeunesse avait été emprisonné par la dictature des colonels, mais qui, une fois la démocratie revenue, avait très bien su profiter de la légitimité politique acquise pour faire des affaires, de très bonnes affaires, quitte à renier ses idées de jeunesse. Le commissaire Charitos se retrouve avec une nouvelle affaire bras, une affaire qui a toutes les chances de dégénérer …


Après les banquiers et les gros fraudeurs du fisc, voici donc dans le collimateur de Petros Markaris la génération de ceux qui, s’appuyant sur leurs luttes et souffrances de jeunesse, ont fait main basse sur le pays et n’entendent pas lâcher le morceau.


Pour en revenir sur ce que j’écrivais en introduction, ce n’est surement pas en France que l’on trouvera des anciens « révolutionnaires », disons qui avaient 20 ans à la fin des années 60, qui ont mis les mains dans le pot de miel et se sont gavés tout en continuant à donner des leçons à tout le monde parce que EUX ils y étaient. Non, cela n’existe qu’en Grèce.


Autre exemple qui ne s’applique qu’à la Grèce, et surtout pas à la France, et encore moins en ces jours électoraux : Une jeune qui s’intéresse à la politique analyse ainsi les mouvements d’extrême droite d’Aube Dorée : Ils n’ont pas intérêt à ce que les immigrés disparaissent, car leur seul programme consiste à demander … leur disparition, et les partis « traditionnels » n’ont aucun intérêt à ce que l’extrême droite disparaisse, car c’est un bon sujet de peur et d’entente (sans parler d’articles à n’en plus finir).


Mais ça c’est en Grèce, pas ici. Ce n’est pas ici que la presse nous rabattrait les oreilles tous les jours avec un parti d’extrême droite qui gagne moins de 20 communes sur plus de 36000 …


Toute politique mise à part, ce troisième volume de la trilogue confirme ce que j’ai pu dire sur les deux premiers. Sans rien apporter de très nouveau en termes d’écriture, Petros Markaris utilise, et utilise très bien, les codes du polar pour éclairer un autre aspect de la crise grecque. L’humour fait passer les moments les plus sombres, la colère et la rage sont là, ainsi que la tendresse pour ceux qui souffrent et l’admiration pour ceux qui luttent.


C’est bien fait, c’est utile, très utile même et on passe un bon moment de pure lecture. Aucune raison de passer à côté donc.


Petros Markaris / Pain, éducation, liberté (Psomi, Paidia, Eleftheria, 2012), Seuil/Policiers (2014), traduit du grec par Michel Volkovitch.

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28 mars 2014 5 28 /03 /mars /2014 21:07

Cathi Unsworth n’est plus une inconnue chez nous. J’avais beaucoup aimé ses deux premiers romans traduits, avec une mention spéciale pour Le chanteur, un peu moins le dernier, Bad Penny Blues, elle revient et quitte Londres dans Zarbi. Superbe.

Unsworth

Ernemouth, petite ville du Norfolk. Ses plages, son parc d’attraction, son chef de la police … En 1984 toute une bande d’ados plus ou moins mal dans leur peau y vivent, vont au lycée, se rebellent, se font des crasses. La routine. Peut-être un poil plus perverse qu’ailleurs. Corrine Woodrow est zarbi, se démarque, se fait remarquer ; il faut dire que sa mère fait la pute. Samantha arrive de Londres avec sa mère, récemment divorcée, elle revient chez ses grands-parents propriétaires du parc … Samantha est belle, sympa, propre sur elle. Mais Samantha joue un drôle de jeu. Jusqu’à ce qu’on retrouve Corinne dans un bunker sur la plage, couverte de sang auprès d’un cadavre mutilé et d’un pentagramme peint avec le sang de la victime. Corinne avoue et est enfermée.


Vingt ans plus tard, des analyses ADN montrent que Corinne n’était pas seule sur place. Engagé par une avocate, Sean Ward, ancien flic devenu privé reprend l’enquête pour essayer de trouver qui était avec elle. Au risque de faire remonter à la surface des odeurs bien nauséabondes.


Trois choses frappent d’emblée dans ce roman.


La construction, classique dans ses allers retours entre les deux époques, mais diablement efficace, et particulièrement habile à faire monter le suspense en parallèle. La pression monte de chapitre en chapitre, le mystère du passé semble s’épaissir au fur et à mesure que les enquêteurs de 2004 commencent à sentir le roussi. Magistralement orchestré !


La finesse et la justesse des portraits. Que ce soit les ados de 1984, parfaitement rendus dans leur malaise dans l’atmosphère étouffante d’une petite ville mais aussi dans leurs goûts musicaux leurs moments de joie et leurs drames ; ou les adultes qui, vingt ans plus tard, survivent tous avec leurs plaies et leurs fantômes. Tous sont complexes, personne n’est complètement blanc, peu sont complètement noirs.


Et enfin la puissance de la description de cette petite ville, étouffante, corrompue jusqu’à la moelle, tenue par quelques pourris particulièrement réussis. A ce titre, Len, le grand flic, est à la hauteur, dans l’horreur, des personnages les plus terrifiants du grand James Ellroy. Et ce n’est pas peu dire.


Avec Zarbi, Cathi Unsworth quitte les milieux artistiques londoniens pour venir s’intéresser à cette petite ville très provinciale et à ses habitants « comme tout le monde ». Elle le fait magistralement. Il serait dommage de passer à côté de ce roman qui prouve, une fois de plus, que le roman noir anglais se porte vraiment très bien.


Cathi Unsworth / Zarbi (Weirdo, 2012), Rivages/Thriller (2014), traduit de l’anglais par Karine Lalechère.

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