Suite donc des rééditions des romans de Jim Thompson, avec L’assassin qui est en moi, que j’avais lu il y a fort longtemps, et que j’ai eu beaucoup de plaisir à retrouver.
Lou Ford est un gars simple de Central City, petite ville texane. Tout le monde l’aime bien en ville, ce qui facilite son boulot d’adjoint du shérif. S’ils savaient, les habitants de Central City. S’ils savaient ce que Lou cache en lui, ils l’aimeraient sans doute moins. Car sous le vernis de brave gars qui n’a pas inventé l’eau tiède se cache un tueur qui tente désespérément d’échapper à sa vraie nature. Et qui y arrive, jusqu’à l’arrivée en ville d’une nouvelle prostituée qui va jouer le rôle de détonateur, et les cadavres vont s’accumuler.
Celui-là je l’avais donc lu, mais il y a très très longtemps, à l’époque où je découvrais le polar en écumant les bibliothèques. N’empêche quel saut d’eau froide. Un polar glaçant qui nous colle dans la tête de Lou. Glaçant et parfaitement construit, les révélations et images du passé venant toujours à point nommé.
Glaçant aussi car, si le narrateur est un fou pas furieux du tout (il exerce même la plupart du temps une parfaite maîtrise sur lui-même), la petite ville autour de lui n’est pas mal non plus. Hypocrisie, non dits, poids du qu’en dira t’on, meurtres connus de tous mais niés car ils remettraient en cause les équilibres de la ville … Un vrai panier de crabes dans lequel Lou, personnage finalement plutôt intelligent et cultivé est contraint de passer pour un plouc inculte pour éviter d’attirer l’attention.
Intéressant aussi de voir comment avec un personnage central assez proche de celui de 1275 âmes Jim Thompson écrit un roman complètement différent.
Bref, encore un grand roman, mené par un maître de l’ellipse, et l’occasion pour tous de découvrir ou redécouvrir un des précurseurs du genre.
Jim Thompson / L’assassin qui est en moi (The killer inside me, 1952), Rivages/noir (2012), traduit de l’américain par Jean-Paul Gratias.