Pain, éducation, liberté conclue la trilogie de la crise du grec Petros Markaris. On ne peut que constater que la situation en France ressemble beaucoup à celle de la Grèce …
Janvier 2014, la Grèce vient de sortir de l’euro et revient à la drachme. Par la même occasion le gouvernement annonce que les salaires des policiers ne seront pas payés pendant trois mois. Dans les rues les manifestations se succèdent et les gros bras de l’extrême droite s’en prennent aux immigrés. C’est dans cet ambiance détendue qu’un premier cadavre est retrouvé : un entrepreneur, qui pendant sa jeunesse avait été emprisonné par la dictature des colonels, mais qui, une fois la démocratie revenue, avait très bien su profiter de la légitimité politique acquise pour faire des affaires, de très bonnes affaires, quitte à renier ses idées de jeunesse. Le commissaire Charitos se retrouve avec une nouvelle affaire bras, une affaire qui a toutes les chances de dégénérer …
Après les banquiers et les gros fraudeurs du fisc, voici donc dans le collimateur de Petros Markaris la génération de ceux qui, s’appuyant sur leurs luttes et souffrances de jeunesse, ont fait main basse sur le pays et n’entendent pas lâcher le morceau.
Pour en revenir sur ce que j’écrivais en introduction, ce n’est surement pas en France que l’on trouvera des anciens « révolutionnaires », disons qui avaient 20 ans à la fin des années 60, qui ont mis les mains dans le pot de miel et se sont gavés tout en continuant à donner des leçons à tout le monde parce que EUX ils y étaient. Non, cela n’existe qu’en Grèce.
Autre exemple qui ne s’applique qu’à la Grèce, et surtout pas à la France, et encore moins en ces jours électoraux : Une jeune qui s’intéresse à la politique analyse ainsi les mouvements d’extrême droite d’Aube Dorée : Ils n’ont pas intérêt à ce que les immigrés disparaissent, car leur seul programme consiste à demander … leur disparition, et les partis « traditionnels » n’ont aucun intérêt à ce que l’extrême droite disparaisse, car c’est un bon sujet de peur et d’entente (sans parler d’articles à n’en plus finir).
Mais ça c’est en Grèce, pas ici. Ce n’est pas ici que la presse nous rabattrait les oreilles tous les jours avec un parti d’extrême droite qui gagne moins de 20 communes sur plus de 36000 …
Toute politique mise à part, ce troisième volume de la trilogue confirme ce que j’ai pu dire sur les deux premiers. Sans rien apporter de très nouveau en termes d’écriture, Petros Markaris utilise, et utilise très bien, les codes du polar pour éclairer un autre aspect de la crise grecque. L’humour fait passer les moments les plus sombres, la colère et la rage sont là, ainsi que la tendresse pour ceux qui souffrent et l’admiration pour ceux qui luttent.
C’est bien fait, c’est utile, très utile même et on passe un bon moment de pure lecture. Aucune raison de passer à côté donc.
Petros Markaris / Pain, éducation, liberté (Psomi, Paidia, Eleftheria, 2012), Seuil/Policiers (2014), traduit du grec par Michel Volkovitch.