Après son premier roman très remarqué, Victor del Arbol revient avec La maison des chagrins. Moins historique (quoique …), mais toujours aussi dense.
Eduardo est un homme détruit. Peintre de renom, il a tout perdu quand un chauffard a percuté sa voiture, tuant sa femme et sa fille. Après des semaines à l’hôpital, il a retrouvé l’homme et l’a tué. Ce qui lui a valu quatorze ans de prison. Il survit maintenant, entre l’alcool, les médicaments que lui prescrit sa psychiatre, et quelques peintures de commande. Jusqu’au jour où la galeriste qui le maintient vaguement à flot lui transmet une étrange demande : Une femme, violoniste célèbre, veut qu’il peigne le portrait de l’homme qui a tué son fils dans un accident de voiture. Sans trop savoir pourquoi Eduardo accepte et ouvre la boite de Pandore. L’ouragan de haine et de vengeance qui s’en échappe emportera tout sur son passage.
Victor del Arbol confirme avec ce roman les belles qualités de son roman précédent. Sans révolutionner le genre il livre un solide roman noir. Un roman très dense, long sans jamais tirer à la ligne, pas le genre qui se lit par petits bouts en étant interrompu tout le temps, ou en pensant à autre chose, mais le petit effort consenti est amplement récompensé.
Une fois de plus, tous ses personnages sont lacérés par la vie et prêt à basculer dans la folie ou l’horreur, quand ce n’est pas déjà fait. Si le contexte historique est un peu moins présent que dans la Tristesse du samouraï, il est quand même là, en toile de fond, et ce sont bien les violences de l’histoire (de la guerre d’Algérie à la seconde guerre mondiale, en passant par les dictatures sud américaines) qui, dans bien des cas, ont fait des personnages ce qu’ils sont.
Au delà de ce contexte, la construction est remarquable. Une spirale de haine et de vengeance, un tourbillon que le lecteur découvre peu à peu, un labyrinthe qui ramène finalement tout le monde au point de départ. La construction est vraiment étonnante, virtuose, et réserve au lecteur quelques coups de théâtre que je me garderai bien de révéler.
Un auteur à suivre décidément, que les lecteurs toulousains pourront venir rencontrer dans les jours qui viennent (je vous en reparle, promis).
Victor del Arbol / La maison des chagrins (Respirar por la herida, 2013), Actes Noirs (2013), traduit de l’espagnol par Claude Bleton.