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13 octobre 2007 6 13 /10 /octobre /2007 15:10

La présentation du blog annonce que des mouvements d’humeur pourraient s’inviter, entre deux pages consacrées au polar. Un voici un.

 

Les quarante ans de la mort du Che donnent lieu en ce moment à une véritable hystérie anti Che Guevara. A ce demander comment un tel mythe a pu naître autour d’un personnage qui, si l’on écoute les média, est plus proche de l’empaleur des Carpates que du guérillero christique (qu’il n’est pas davantage) qui était son image jusqu’à ce fameux anniversaire.

 

Sur France Inter, où 2000 ans d’histoire met en avant un Che sanguinaire, sadique, exécutant à tour de bras. L’émission qui conseille des bouquins sur son site réussit à ne pas citer l’indispensable bouquin de Taibo II Ernesto Guevara connu aussi comme le Che.

 

Rue 89 qui publie un article sur le sauvetage des survivants de la catastrophe bolivienne par Salvador Allende, se voit submergé par quantité de commentaires caricaturaux et débordants d’inculture crasse. Un papier suivant consacré au livre de photos du reporter Patrick Bard (Les routes du Che), dont j’avais beaucoup apprécié le polar l’attrapeur d’ombres, permet aux aigris de remettre le couvert.

On pourrait s’en amuser, si cela ne venait après l’arrivée au pouvoir en France d’une droite dite décomplexée, qui affiche sans la vergogne sa collusion avec le pouvoir financier, qui a tenté avec le tact et le résultat que l’on sait de faire partager à la nation l’idée des bienfaits de la colonisation, puis pendant la campagne électorale, a mené une attaque en règle contre mai 68. C’est donc cette population de droite, dopée par la victoire qui se met à hurler avec les loups et à cracher une haine et une rancœur qu’elle avait jusque là dû garder plus ou moins secrète.

 

Qui sera le prochain ? Salvador Allende bolchevique sanguinaire, Dracula sud-américain qui voulait saigner un pauvre pays heureusement sauvé par de courageux militaires, appuyés par les grands défenseurs de la démocratie américains ? Les Républicains espagnols, massacreurs de curés et violeurs de bonnes sœurs heureusement mis au pas par le très catholique Paquito ? Les paris sont ouverts.

D’où peut donc bien venir une telle hargne ? Pourquoi maintenant ? Le libéralisme partout triomphant désire t’il maintenant effacer jusqu’au souvenir de ses défaites ? L’émergence de mouvements très à gauche en Amérique Latine (mouvements qui font tous référence au Che) lui fait t’il craindre un renouveau de l’idéal révolutionnaire ?

Il existe de nombreux antidotes à cette marée, en voici deux : lire la monumentale biographie écrite par un autre monument, l’écrivain mexicain Paco Ignacio Taibo II (dont il faudra bien que je parle ici), et voir ou revoir Carnets de voyage, le film du brésilien Walter Salles qui retrace le périple qu’Ernesto Guevara de la Serna (qui n’était pas encore le Che), fit à vingt ans avec son ami Alberto Granado au travers de l’Amérique Latine.

Et puis pour ceux qui, je l’ai lu, pensent avoir exprimé la critique définitive en disant que le Che était un looser qui n’avait rien réussi, indépendamment de l’opinion que l’on peut se faire sur sa réussite ou non, je conseille également l’ode à ceux qui ont essayé mais raté, l’hommage aux perdants magnifiques écrit, une fois de plus, par Taibo II. Cela s’appelle Archanges, Douze histoires de révolutionnaires sans révolution possible, chez Métailié. Voici ce qu’en dit l’éditeur : « Dans un monde qui ne s’intéresse qu’aux victoires, voici douze histoires de défaites terribles mais héroïques. Des histoires qui parlent de la ténacité, du respect des principes, de la politique comme morale tragique. »

 

Pour finir, je suis en rogne, mais pas très inquiet, étant assez d’accord avec la nouvelle Il faut tuer Karl Marx de Jérôme Leroy publiée dans son récent recueil Comme un fauteuil Voltaire dans une bibliothèque en ruine : On a beau essayer de tuer les hommes, certaines idées renaîtront toujours.

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commentaires

Y
Quel sympathique coup de colère... Voilà qui fait du bien, Le discours officiel commence à être des plus pesant (non il ne commence pas, ça fait un bail qu'on le voir arriver !) et merci de me remettre en mémoire la bio de Taibo II que je me suis promis de lire il y a une éternité... (du temps où j'avais le che au dessus de mon lit, c'est dire si ça fait un bail...)
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J
Il faut avouer qu'il faut du temps devant soi pour se lancer dans un tel pavé. Mais, étant écrit par Taibo, il est très agréable à lire. Pour les courageux, à venir une bio tout aussi fournie sur Pancho Villa.

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  • : Le blog de Jean-Marc Laherrère
  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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