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20 septembre 2011 2 20 /09 /septembre /2011 00:27

Encore un beau roman atypique chez Métailié, il nous vient d’Italie cette fois. Vous connaissez la camorra façon documentaire de Gomorra de Roberto Saviano ? Découvrez-la romancée dans L’offense de Francesco De Filippo.

 

De FilippoIl ne voulait pas être camorriste Gennaro, jeune homme d’un quartier populaire de Naples. Mais dans ce quartier, quand on a 21 ans, on ne dit pas non à Don Rafele. Et Don Rafele n’est pas seulement le parrain du quartier, c’est un boss, un vrai, une pieuvre avec des tentacules dans le monde entier. Pourtant il est simple Gennaro, il ne se pose pas trop de questions, mais il n’a pas non plus de grandes ambitions : « Moi, je voulais pas tuer, je voulais pas tirer et je voulais casser la gueule à personne, je voulais … je l’ai dit mille fois, je voulais seulement gagner ma vie. »

 

Alors quand peu à peu il prend conscience du regard des autres, il s’en étonne : « J’étais personne avant, j’étais personne en ce moment et surtout je serai personne à l’avenir. Qu’est-ce que je devais faire ? ». Et puis s’est l’engrenage, inévitable, pour un Gennaro qui, comme il le dit souvent, ne comprends pas grand-chose à ce qu’on lui fait vraiment faire …

 

Bienvenue dans la tête d’un camorriste malgré lui. Car c’est bien ce qu’est Gennaro, bourreau mais également (et surtout ?) victime d’une organisation criminelle qui noyaute toute la ville. Victime inconsciente parfois, consentante aussi, victime et bénéficiaire.

 

Un roman tout en contrastes, véritable et permanente douche écossaise. Contraste entre cette langue (superbement rendue par Serge Quadruppani) chaude et la réalité glaçante qu’elle décrit. Contraste entre le côté frustre et simpliste des réflexions du narrateur et la complexité et les ramifications de l’organisation qu’il sert. Contraste entre la fraicheur et l’humanité de ce garçon (malgré ce qu’il voit, subit et inflige) et la cruauté, la violence qui l’entoure. Contraste entre ses aspirations, ses envies qui le rendent très attachant, et le costume de bourreau qu’il endosse.

 

C’est toute cette complexité que rend ce roman étonnant écrit pourtant dans une langue très parlée, a priori « simple » parce que le narrateur fait avec les mots et les images qui sont à sa disposition.

 

Un roman qui fait peur, tant l’emprise de la camorra sur Naples y semble définitive, tant elle semble ancrée dans la vie de tous les jours, dans l’ADN de toute une ville serais-je tenté de dire. Certes l’auteur tente un happy end qui est peut-être la seule faiblesse du roman, pour essayer, au moins, d’en sauver un. Mais les autres ?

 

Vous pouvez compléter cet avis en allant lire l’interview de l’auteur sur Bibliosurf.

 

Francesco De Filippo / L’offense (Sfregio, 2006), Métailié (2011), traduit de l’italien par serge Quadruppani.

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commentaires

S
<br /> <br /> J'ai plutôt passé un bon moment. Il y a une nette tendance à la séquence, ce n'est pas trop linéaire, avec la camorra dans les sous sols, la camorra qui viole dans un restau, la rencontre avec le<br /> capo... plein de petites scènes pleines de vie et cette langue ! Par contre, c'est vrai, la fin est irréaliste au possible : pour fuir la camorra, il faut je pense être plus malin que ça. Dommage<br /> parce que le reste est riche.<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Entièrement d'accord avec tout ça.<br /> <br /> <br /> <br />
D
<br /> <br /> j'ai trouvé la fin pleine de vie ?<br /> <br /> <br /> :)<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> C'est vrai, ça change après un roman plutôt mortifère ... Il m'a juste semblé qu'il aurait peut-être été encore plus fort avec une fin ... sans espoir.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> pas lu le roman. Mais le film est vraiment dur par moments. Et puis, surtout, quand on en ressort, on se dit que rien ne changera... déprimant. Mais utile aussi;<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Bon, donc je crois qu'ayant lu le bouquin j'éviterai la déprime et je n'irai pas voir le film. Le bouquin aussi est déprimant, et sa fin absolument effrayante.<br /> <br /> <br /> <br />
C
<br /> <br /> Intéressant. Sur le sujet il faut voir Gomorra. Un film terrible sur la mafia dan sle sud de l'Italie. Une véritable tragédie.<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> J'ai lu Gomorra, mais j'ai été tellement secoué par le bouquin que je n'ai pas voulu voir le film.<br /> <br /> <br /> Peut-être une erreur de ma part ?<br /> <br /> <br /> <br />
M
<br /> <br /> Vous donnez envie de lire ce roman. Merci<br /> <br /> <br />  Contraste entre cette langue (superbement rendue<br /> par Serge Quadruppani)<br /> <br /> <br /> Juste une question, pour pouvoir faire cette affirmation, vous avez lu le texte italien?<br /> <br /> <br /> <br />
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J
<br /> <br /> Non, certes non !<br /> <br /> <br /> Je veuc dire par là que la version française est belle et donne à entendre un parler des rues que, en tant que non italianophone, je trouve superbe.<br /> <br /> <br /> Si j'avais voulu juger la traduction (ce dont je suis bien incapable), j'aurais écrit "fidèlement rendue" ou quelque chose dans le style.<br /> <br /> <br /> Mon superbe est donc un jugement du résultat français, sans préjuger de la fidélité au texte original.<br /> <br /> <br /> <br />

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