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3 septembre 2007 1 03 /09 /septembre /2007 09:54

Il y a quelques années, quand la Californie avait pondu une loi sur la récidive, un dangereux malfaiteur qui en était à son troisième crime avait enfin été mis à l’ombre pour 15 ans. Ouf, la société était à l’abri d’un dangereux voleur de pizzas. En France tout le monde s’était moqué de ces abrutis d’amerlocs qui mettaient 15 ans en taule un pauvre type pour vol de pizza (je ne suis même pas sûr qu’il avait volé un pizza entière).

 

Aujourd’hui grâce à notre dynamique ministre de la justice, un pauvre gars vient de prendre quatre ans pour le vol d’un téléphone portable et de quelques dizaines d’euros.

 

Encore un effort et grâce à notre nouvelle équipe gouvernementale nous allons faire un grand pas en avant, vers le … XIX° siècle. Au fait, ça ne vous dit rien, dans les classiques que l’on a tous lu et vu au cinéma un homme envoyé au bagne pour le vol d’un morceau de pain ?

Plus près de nous, la nomination et l’action de Rachida Dati me renvoient aussi et encore vers la littérature, récente cette fois, et, américaine. On se croirait dans l’avant dernier roman de Jake Lamar, Nous avions un rêve, publié chez Rivages.

Melvin Hutchinson est noir. Il a été avocat des droits civiques dans les années soixante, puis associé d'un un grand cabinet d’affaires de Wall Street. Il vient de faire une entrée remarquée en politique comme ministre de la justice de l’équipe du très charismatique président Troy McCracken, très charismatique, très médiatique, et très agité (comme chez nous ?). Il déclare lors de sa première conférence de presse que les parasites (toxicomanes, dealers, et autres voleurs ou assassins) doivent être, internés pour les moins dangereux, pendus pour les autres. Il devient donc Melvin la corde. Et sa carrière ne fait que commencer. Mais le passé le rejoindra et il finira par s’apercevoir qu’il n’a été, tout du long, qu’un alibi, une marionnette dans les mains de ceux qui ont le réel pouvoir.


Le roman est impressionnant, par sa richesse, sa puissance, et sa qualité d’écriture. Sur la forme, l’intrigue est superbement construite, avec ses multiples allers-retours entre les quelques jours du présent, et le passé des différents protagonistes qui viennent, au compte-gouttes, préparer la chute. Sur le fond, il est effrayant : Dans sa façon de rendre, en l’exagérant si peu, la mise en spectacle de toute la vie américaine, que ce soit la politique ou la justice (comme chez nous ?) ; dans son anticipation du grand virage sécuritaire, annoncé par la politique tolérance zéro du maire de New-York, et renforcée par les attentats de septembre 2001 (comme chez nous ?) ; dans sa description des effets du communautarisme poussé à outrance (comme chez nous ?).

Il met en scène, ce que nous vivons aujourd’hui avec la récupération de personnalités alibi qui, pour justifier leur poste, sont plus royalistes que le roi. Espérons seulement que notre ministre ne finira pas aussi mal que Melvin. Heureusement, parfois les artistes vont un tout peu plus loin que la réalité, mais si peu.

 

Très bientôt, je vous parlerai du nouveau roman de Jake Lamar, Rendez-vous dans le 18°.

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30 août 2007 4 30 /08 /août /2007 18:25

Contrairement à ce que l’on pourrait croire, sous ce nom ne se cache ni un méchant fourbe de la Ligue des Gentlemen Extraordinaires, ni le nouveau personnage de Qiu Xiaolong, ni une nouvelle lubie orientalo-new-age pour cadres fatigués en mal de spiritualité, ni ... Ne cherchez pas, si vous ne connaissez pas, vous ne pourrez jamais deviner. Moi même qui fais le malin, il y a quelques jours je n’en avais jamais entendu parler. Il s’agit d’un collectif de cinq jeunes auteurs italiens, agitateurs de web et de consciences, grands pourfendeurs de copyright et de toute entrave à la liberté de propager les idées, proches, cela va sans dire, des mouvements altermondialistes ...

 

Pour en savoir davantage sur ces hurluberlus (car ce sont des hurluberlus), il suffit d’aller sur leur site, traduit en français, espagnol, anglais, portugais, allemand, finois ... ou d’aller sur celui des éditions Métailiés qui éditent les romans solo de deux des cinq hurluberlus suscités. Autre possibilité, sur le site personnel de Serge Quadruppani, traducteur et directeur de l’excellentissime suite italienne, toujours chez Métailié.

 

Les cinq rigolos sont cohérents. Ils utilisent le copyleft, pour la liberté de propager la culture, et le mettent en application. On lit ceci sur les premières pages de leurs deux romans français : « La reproduction totale ou partielle de l’œuvre ainsi que sa diffusion par voie télématique sont autorisées, sous condition de fins non commerciales et de reproduction de la présente mention. ». Pour ceux qui voudraient en savoir plus sur le sujet, il y a un article en français sur le site. Cohérents jusqu’au bout, bien entendu, leurs bouquins sont téléchargeables gratuitement au format pdf sur le site de Métailié.

 

Venons-en aux romans. New Thing, est signé Wu Ming1. Il se situe en 1967 à New York. La contestation noire estundefined au plus fort. La contestation politique s'accompagne d'une réelle révolution musicale. Autour de l'immense John Coltrane, une pléiade de musiciens, tous très politisés, explorent les limites de leur art et font exploser une musique, dans l'ahurissement général, l'incompréhension de la critique et du public blanc, et même la haine des tenants du swing. Albert Ayler, Archis Shepp, Pharao Sanders, Ornette Coleman … font la révolution du free. C'est alors que des musiciens sont abattus par un inconnu. Les mouvements noirs y voient immédiatement un complot du pouvoir, d'autant plus que la police ne se préoccupe guère d'arrêter le coupable. C'est une journaliste juive qui parcourt New York avec son magnétophone qui découvrira la vérité, avant de disparaître totalement. Quarante ans plus tard, un journaliste, part sur ses traces et interviewe les survivants … Construit comme un recueil de témoignages directement enregistrés, ce roman, pas vraiment policier, offre le kaléidoscope de toute une époque. Témoignages direct (ou supposés tels) de musicien sur leur mouvement, son évolution et sa mort, sur l'influence de Coltrane, sur le racisme ambiant ; récits de militants politiques ; délires de certains mouvements extrémistes et fortement allumés (la palme revenant à un groupe persuadé que des extraterrestres, ressemblant à des lémuriens, tournent autour de la Terre et préparent l’extermination de l’humanité pour repeupler la Terre de vrais hommes, à savoir les descendants des premiers hommes d’Afrique) ; articles de journaux relatant les faits ; rapports de police … reconstituent peu à peu le puzzle, et dressent, par petites touches, le portrait d'une époque violente et passionnante, sur les plans politiques et artistiques.

 

undefinedLe narrateur de Guerre aux humains, signé Wu Ming 2, craque. Il en a marre de courir après sa survie de petit boulot en petit boulot. Alors il plante tout, laisse le monde courir à sa perte, convertit ses derniers euros en un sac à dos, des fèves et haricots, quelques plants de ganja, un paquet de piles pour son walkman et des boites d’allumettes puis part, dans une grotte pas loin de chez lui, faire le super héros troglodyte. Il sera autosuffisant, héroïque, et pionner de la nouvelle civilisation, avenir de l’humanité une fois la catastrophe consumériste et libérale advenue. Cela aurait pu marcher si … Si une belle barmaid n’était pas passée par là pour chercher son chien ; si trois éco-terroristes n’avaient pas choisi sa colline pour déclarer la guerre aux humains ; si un adjudant des carabiniers survivaliste ne s’entraînait pas dans le coin ; si de bons citoyens n’avaient pas décidé de faire justice en s’amusant, à cheval, et lance à la main ; si un mafieux albanais n’y avait pas monté une affaire d’immigration illégale couplée à l’organisation de combats entre chiens et humains ; si … Beaucoup trop de si, même pour un super héros cavernicole. A ma connaissance personne en Europe n’avait jamais mis en scène une telle collection de givrés. On se croirait chez Hiaasen et on ne serait pas outre mesure étonné de voir débarquer l’ex gouverneur avec son bonnet de bain orange. Avec en prime des truands assez bêtes et méchants pour figurer au casting des Cohen ou de Tarantino. Mais attention, sous les dehors du rigolo je-m’enfoutiste se cache un auteur qui a bossé, construit des vrais personnages, une intrigue qui, ô surprise, se tient, et surtout un auteur qui réfléchit à notre société, ses absurdités, ses injustices et ses saloperies, les dérives et folies qu’elle entraîne (ce qui n’étonnera pas ceux qui seront allés faire un tour sur le site de Quadruppani cité plus haut).

 

On s’aperçoit finalement que les deux Wu Ming ont écrits deux romans totalement différents dans les thèmes, les époques et les lieux traités, les constructions et les écritures mais qui ont, outre l’amitié de leurs auteurs bien des points communs : Tout d’abord, et il fallait s’y attendre, ils traitent de mouvements contestataires. C’est ce qui saute aux yeux. Moins direct, ils sont les deux, d’une certaine façon, très américains. Le premier, New Thing, tout simplement parce qu’il se déroule à New York, à un moment important de l’histoire américaine. Le second Guerre aux humains, parce qu’il ressemble plus à des polars américains de gens comme Carl Hiaasen qu’aux polars italiens, et même européens que l’on connaît ici. C’est moins étonnant qu’il n’y parait, vu l’intérêt que porte le collectif à la culture populaire et à la création des mythes.

Il serait intéressant de leur poser la question.
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28 août 2007 2 28 /08 /août /2007 21:08

Comme indiqué dans la chronique précédente, Bibliosurf publie un dossier sur le polar nordique. Après l’interview de Gunnar Staalesen, c’est celui d’Arni Thorarinsson qui est en ligne. Je suis en train de réaliser celui de Jo Nesbo. A suivre donc.

Mais qui est Arni Thorarinsson ? C’est le nouvel auteur de polar islandais découvert par Métailié. Son héros récurrent est Einar, journaliste à Reykjavik. Dans Le temps de la sorcière, il est envoyé dans une petite annexe que son journal ouvre dans le nord de l’Islande, pour faire du journalisme de « proximité ». Travail passionnant qui consiste, entre autres, à poser la question du jour à cinq passants et à publier leurs réponses … Mais contre toute attente, cela va bouger. Tout d’abord avec la mort d’une femme d’une cinquantaine d’années, tombée d’un rafting lors d’une sortie cohésion de son entreprise. Sa mère qui s’ennuie dans une maison de retraite est persuadée qu’elle a été assassinée par son mari. Puis avec la disparition d’un lycéen, unanimement admiré et aimé, qui devait jouer le rôle principal dans une pièce amateur. Finalement le nord est plus vivant que prévu …

Beaucoup de bon, un peu de moins bon chez ce nouvel auteur islandais. Commençons par nous débarrasser du moins bon. On compare forcément avec Indridason. Et c’est là que le bât blesse. Thorarinsson n’évite pas certaines longueurs, maîtrise moins bien que son compatriote le rythme du récit, et n’arrive pas à rendre ses personnages aussi émouvants que ceux d’Indridason. Du coup, par moment, l’attention se relâche, et on n’est pas aussi touché.

Reste quand même beaucoup de bon, et de très bon même. Tout d’abord une autre vision de l’Islande, et ici de sa province. Une Islande qui souffre des problèmes actuels de toutes les sociétés occidentales (pertes des valeurs autres que le profit, individualisme de plus en plus forcené, racisme …), une Islande où la religion semble très présente (du moins c’est l’impression que je retire du roman), une Islande également où les discours politiques ressemblent comme deux gouttes d’eau … à ce que l’on peut entendre ici.

Malgré cette noirceur, et c’est là un autre très bon côté du roman : ni l’auteur ni Einar ne perdent le sens de l’humour. Il y a vraiment quelques dialogues et quelques scènes très drôles. Les relations d’Einar avec son rédacteur en chef qui veut du sensationnel sont très bien croquées, la question du jour offre quelques perles, et comme l’explique l’auteur dans l’interview cité plus haut, Einar peut se montrer sans pitié quand il s’agit de se moquer de lui-même. Donc, l’un dans l’autre, une belle découverte, malgré quelques réserves.

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25 août 2007 6 25 /08 /août /2007 18:14
Très peu de temps aujourd'hui, donc juste quelques lignes pour signaler, sur la site de bibliosurf (référencé à côté), l'ouverture par Bernard Strainchamps d'un dossier concernant le polar nordique.

Je vous parlerai très prochainement du nouvel islandais de Métailié (Arni Thorarinsson), pour l'instant j'ai inauguré le dossier avec un interview de Gunnar Staalesen, auteur norvégien publié par l'excellente maison Gaïa et repris en poche chez Folio.

C'est là :

http://www.bibliosurf.com/Interview-de-Gunnar-Staalesen
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23 août 2007 4 23 /08 /août /2007 13:19

Si je vous dis Eric Halphen, vous allez penser Juge Halphen, et forcément ville de Paris, Jacques Chirac,undefined scandales politico-financiers, média … Si je vous dis qu’Eric Halphen a écrit un polar, vous penserez sans doute qu’il s’agit d’une histoire très médiatique, inspirée des faits sus-cités. Et même, si vous avez mauvais esprit, que l’éditeur se paie de la pub et éventuellement de grosses ventes par un simple effet de mode. Et vous aurez tord.

Maquillages d’Eric Halphen est  un excellent roman, écrit par un vrai écrivain, ce dont on peut se douter quand on apprend qu’il est publié chez Rivages, maison qui n’a pas l’habitude de faire dans la complaisance. Autour de deux personnages centraux, le juge Jonas Barth et le commandant Bizek, de la Criminelle, et de nombreux personnages secondaires superbement traités, il construit une enquête polyphonique sur la mort d’une jeune maquilleuse travaillant dans les métiers du spectacle. L’intrigue, faussement classique, réserve peu à peu, et sans effets spectaculaires, son lot de surprises.

Bien entendu, Eric Halphen exploite sa connaissance du milieu, parsemant son roman d’anecdotes que l’on sent tirées de son expérience, et décrit parfaitement le fonctionnement de la justice, les rapports entre ses différents protagonistes, la relation avec la police, avec la hiérarchie et le pouvoir, sans jamais tomber dans le didactisme. Sans jamais non plus tomber dans le cliché, les flics ne sont pas tous fachos, et ne considèrent pas tous les juges comme des ennemis laxistes, les juges ne sont pas tous hautains et méprisants … Loin de toute simplification, il traite tous ses personnages, flics, juges, victimes ou accusés, avec la même profondeur et la même humanité.

Il dresse ainsi un portrait de la justice française qui risque de faire grincer quelques dents chez ses collègues, même si Barth est un juge comme on aimerait en voir davantage, car, bien entendu, il y a des juges bien, aussi. Exemple :

« Petit métier exercé par des petites gens », avait dit un jour l’avocat Soulez Larivière à propos des juges. La seconde partie de l’affirmation, Barth la vérifiait tous les jours. Ce microcosme de six mille hommes et femmes qui s’estimaient supérieurs aux autres alors qu’ils étaient souvent mesquins et jaloux, sans envergure aucune, il avait bien du mal à le supporter encore. En revanche, il persistait à n’être pas d’accord avec l’autre partie. Le métier qu’il exerçait était l’un des plus nobles, des plus attachants qui soient.

Un excellent roman donc, avec lequel Eric Halphen pourrait bien avoir coulé les fondations d’une série exceptionnelle : Comme ses grands prédécesseurs McBain ou Harvey il ne s’est pas limité à décrire une enquête mais réussit à nous passionner également à la vie de ses personnages. On attend avec impatience de savoir ce qu’il va advenir de Jonas Barth, Biztek et des autres. Alors, le début d’une belle série ?

 

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22 août 2007 3 22 /08 /août /2007 10:37

C’est la première phrase du Dernier baiser de Crumley qui m’a donné envie, dans la base de donnée où je trie mes petites notes de lecture, de garder également les premières phrases des romans que je lis.

Il commence comme ça : « Quand j'ai finalement rattrapé Abraham Trahearne il était en train de boire des bières avec un bouledogue alcoolique nommé Fireball Roberts dans une taverne mal en point juste à la sortie de Sonoma, en Californie du Nord ; en train de vider le coeur d'une superbe journée de printemps. ». Je ne sais pas vous, mais moi cette première phrase me met en joie, le sourire aux lèvres, certain que j’ouvre un roman qui va me marquer.

J’ai lu beaucoup de romans qui commencent de façon moins enthousiasmante mais se révèlent excellents, mais je ne suis encore jamais tombé sur aucun qui me déçoive après une entrée fracassante et/ou révélatrice.

Exemples : Quand on lit :

« Savez-vous quand j'ai commencé à regretter la mort de ma mère ?

C'est lorsque les premières gouttes de pluie se sont mises à dégouliner par le trou de balle dans le toit de la Ponty. »

ou :

« L'ange faisait le ménage dans ses placards quand il perçut l'appel. »

ou encore :

« Les habitants du vieil immeuble de pierre de taille, en bordure du parc de Humlegard, à Stockholm, étaient des gens aisés, à l'instar de Rafael Juntnen, gangster de son état. »

ou pour finir :

« La mère de Tony Zank s’engouffra dans le couloir de la maison de retraite, ses spongieuses et tremblantes fesses à l’air, en hurlant : « A l’aide ! » et « Arrêtez ce monstre ! ». »

on sait qu’on ouvre un roman passablement allumé, et qu’il faut s’attendre à une belle collection de cinglés. Et c’est le cas, pour ces quatre romans qui sont (non ce n’est pas un jeu, je donne les réponses tout de suite) : Cadavres du québécois François Barcelo, L’agneau de Christopher Moore, La forêt des renards pendus d’Arto Paasilinna, et le plus récent qui vient d’être réédité en rivages noir, A poil en civil de Jerry Stalh.

Pour d’autres, on sait au contraire que l’on ne va pas rigoler, et qu’on se prépapre à une plongée dans du noir profond. C’est le cas des Chiens de la nuit de Kent Anderson, un de ces romans d’une noirceur totale, écrit par un flic de Portland : « Tous les 15 juin, au commissariat de North precinct, la relève A et l'équipe de nuit partaient tuer des chiens. »

Il y a ceux qui vous font éclater de rire en deux répliques :

« - Pigeon vole …

- Ta gueule ! »

C’est du Carrese, bien entendu, dans Les veuves gigognes.

Ou bien encore ceux qui intriguent, comme C. J. Box dans La mort au fond du canyon : « Au troisième jour de leur lune de miel, Stewie Woods, écolo activiste à la notoriété douteuse, et son épouse Annabel Bellotti, cloutaient des arbres dans la forêt nationale de Bighorn lorsqu'une vache explosa et les mit en pièces. »

Il y a ensuite ceux qui donnent le ton d’emblée, sans un mot de trop. Une des plus belles réussites, qui dénote un sacré maîtrise, vient de quelqu’un qui n’en manque pas : Richard Stark, alias le grand Westlake, qui démarre ainsi Firebreak : « Quand le téléphone sonna, Parker était dans le garage, il tuait un homme. » Le moins que l’on puisse dire est que le ton est donné.

Et puis il y celles que j’aime parce que c’est comme ça. En voilà quelques-unes : Dans le dernier JH Oppel, Réveillez le Président ! on lit :

« BOUM !

Une charge atomique de 1 kilotonne est aussi puissante que l’explosion de 1000 tonnes de TNT. » Mais sa plus belle réussite reste la première phrase de Pirana matador :

« A Santa Cruz de Natividad, la Mort vient toujours par le fleuve. »

J’aime beaucoup également le début du Caméléon noir de Jake Lamar :

« "Bordel de merde ! putain de bordel à queue de merde !"

Reginald T. Brigus avait connu des moments de plus grande éloquence. »

Et pour finir, mes préférées avec celle de Crumley citée en haut de page. De Donald Westlake encore, il y a l’ouverture magistrale d’Aztèques dansants. Je ne reprends ici que la première phrase, il faudrait citer tout le chapitre qui constitue une des plus originales, des plus belles, mais aussi des plus justes description de New-York : « A New York, tout le monde cherche quelque chose. Des hommes cherchent des femmes, et des femmes cherchent des hommes. Au Trucks, des hommes cherchent des hommes, tandis que chez Barbara et au MLF, des femmes cherchent des femmes … »

Et pour finir l’entame flamboyante d’un roman inclassable, l’absolument indispensable Water Music de TC Boyle : «A l'âge où les trois quarts des jeunes Ecossais retroussent les jupes des demoiselles, labourent, creusent leurs sillons et répandent leur semence, Mungo Park, lui, exposait ses fesses nues aux yeux du hadj Ibn Fatouni, émir de Ludamar. »

N’hésitez pas à faire part de vos coups de cœur.

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21 août 2007 2 21 /08 /août /2007 09:04

Le polar anglo-saxon, pour notre plus grand plaisir, est un vivier de sales mioches sans respect, d’iconoclastes, de dézingueurs de mal embouchés, d’administrateurs de coups de pieds qui pourtant se perdent, de pornographes, non du phonographe, mais de l’édition. Juste avant les vacances ont été publiés en série noire trois romans sans pitié pour leurs victimes, mais jouissifs pour le lecteur.

 

Le premier est américain, il s’agit du cinquième volet des aventures de Hap Collins (blanc, hétéro, démocrate et looser de la plus belle eau) et Leonard Pine (noir, homo, républicain et looser de la plus belle eau) les deux amis inséparables de Joe R. Lansdale. Celui-ci  commence par une croisière de rêve, qui tourne très vite au cauchemar et à la distribution de beignes. Comme les romans précédents, Tsunami mexicain est totalement déconseillé à tous ceux qui brandissent chapelet, crucifix et gousse d’ail quand ils lisent des mots comme bite, cul ou couille. C’est un fait, dans cette série Lansdale est gras. Mais, Jésus, Marie, Joseph, qu’il est drôle !! J’ai éclaté de rire au moins une dizaine de fois, à la grande surprise des gens qui se trouvaient autour de moi. Heureusement, aucun ne m’a demandé de lui lire ce qui m’avait fait me bidonner, j’aurais peut-être rougi. A ma connaissance aucun autre auteur n’est capable d’écrire des dialogues aussi grossiers, sans jamais tomber dans la vulgarité (mais je ne demande qu’à découvrir). Est-ce le naturel de son écriture ? Sa façon rendre palpable l’amitié et la complicité entre ses personnages ? Son énergie ? Mystère. Outre la rigolade, Lansdale a un sacré sens du rythme, réussit particulièrement bien les scènes de castagne et, mine de rien, sous son nez de clown, dresse roman après roman, le portrait sans complaisance du Texas qu’il a l’air de très bien connaître.

 

Les deux suivants sont irlandais.

 

De Ken Bruen une nouvelle aventure de son duo de flics londoniens de cauchemar. R et B sont de retour dans Blitz. La première scène du bouquin à elle seule justifie la lecture du roman. La confrontation entre Robert, flic violent, ripoux, raciste, machiste … mais loin d’être con avec le psy qu’on l’oblige à aller voir sous peine de le virer de la police renvoie tous les tâcherons qui mettent en scène des flics forcément rebelles, forcément victimes de harcèlement, forcément maltraités, obligés de voir un psy, à leurs chères études. Pour le reste, Ken Bruen qui se revendique ouvertement de l’héritage de McBain et de son 87° district en est sans le moindre doute l’héritier le plus original et le plus déjanté. Il réussit un numéro d’équilibriste de haute voltige, sans cesse sur le fil du rasoir, en limite de caricature et de pastiche, avec l’air de ne rien prendre au sérieux ; et pourtant il construit un vraie œuvre, donnant de l’épaisseur à ses personnages et les humanisant sans jamais perdre son sens de l’humour.

 

Colin Bateman lui tombe à bras raccourcis, et à gorge déployée sur les religieux fanatiques de tous poils. Turbulences catholiques est le plus sombre des trois romans, le plus angoissant aussi. L’histoire de Dan Starkey, journaliste poivrot qui se retrouve sur une île à enquêter sur une soi-disant nouvelle incarnation du Christ fait froid dans le dos, à la manière d’un Shutter Island. Même sentiment de claustrophobie, même panique d’être enfermé avec des fous dangereux dans un endroit coupé du monde. A la différence du chef-d’œuvre de Dennis Lehane, Colin Bateman désamorce tout cela grâce à l’humour, son personnage ne pouvant résister, même en danger de mort, à l’impulsion de se foutre de la pipe des fanatiques intégristes qu’il a en face de lui. Donc on rit, même si parfois c’est un rire un peu jaune.

 

A noter également dans le rayon collection de déjantés, la réédition en poche d’un roman déjà paru en grand format chez Rivages, A poil et en civil de Jerry Stalh qui met en scène une collection d’allumés encore plus méchants que bêtes (ce qui n’est pas un mince exploit) que ne renieraient pas les frères Cohen. C’est délirant, ça va à fond, on se demande à chaque scène comment l’auteur va réussir à tenir la distance et faire encore plus hénaurme. Et pourtant la fin, d’une insolence absolument réjouissante, réussit encore à étonner le lecteur.

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17 août 2007 5 17 /08 /août /2007 21:54

Rééditions.

L’été et son vide éditorial finalement reposant permet aux uns et aux autres de rattraper le retard accumulé tout au long de l’année, ou mieux, de combler, peu à peu, les effrayantes lacunes de notre culture. Encore faut-il pouvoir mettre la main sur les grands classiques, parfois totalement épuisés, ou introuvables. Heureusement folio policier fait depuis quelques années un formidable boulot de réédition du fond.

Dans les derniers titres parus cela m’a permis, enfin, de lire James Hadley Chase, et de découvrir des Jim Thompson que je ne connaissais pas, moi qui croyais avoir tout lu de cet auteur génial.

Le Chase c’est le mythique Pas d’orchidées pour Miss Blandish, titre impossible à ignorer si on a pratiqué un tant soit peu la série noire, mais que je n’avais jamais lu. Certes le lecteur actuel qui lit cette histoire d’une belle héritière enlevée par une bande de malfrats bas de fronts et sadiques, peut avoir une impression de déjà vu, voire de clichés. Mais c’est justement que l’on a là, entre les mains, un des romans qui a donné le jour à ces clichés. Et un roman qui tient encore la route. Les affreux, malgré la surenchère que l’on a ensuite connue, sont particulièrement effrayants, et comme disait le grand Alfred, si le méchant est réussi, le film (ici le roman), fonctionne. A noter également réédités récemment, La chair de l’orchidée et Eva.

Du côté de Jim Thompson, mis à part l’incontournable 1275 âmes dont j’ai revu il y a peu l’excellente adaptation de Bertrand Tavernier (Coup de torchon), folio vient de rééditer quatre titres. Dont Eliminatoires, à la trame a priori archi classique : le pigeon parfait débarque dans une petite ville du Texas qui semble être sous la coupe d’un flic pas vraiment net. Il a beau sentir venir le coup fourré, il n’a pas le choix et accepte le poste de privé dans le seul hôtel de bled. Et le coup fourré arrive, bien entendu. Du pur Thompson, bien sombre, bien glauque, sans aucune illusion sur la nature humaine. Même en le connaissant bien, on est encore surpris par ses contre-pieds et ses fausses pistes. Le roman a également et surtout valeur de témoignage sur les mœurs et préjugés (raciaux et sexuels) d’une époque pas si lointaine qui paraissent pourtant d’un autre âge … A moins que certains ne soient en train de ressurgir.

Impossible de finir ce tour d’horizon trop rapide sans citer un roman de Charlie Williams que tout amateur de polar se doit d’avoir lu, et même relu, Fantasia chez les ploucs, réédité il y a déjà quelques années. Billy Noonan, sept ans, s’apprête à passer le plus fabuleux été de sa vie. Pop, son papa, a décidé de laisser tomber les champs de courses et d’aller à la ferme de l’oncle Sagamore. Une ferme où on ne travaille pas beaucoup la terre. Tonton Sagamore est la calamité du comté, le cauchemar du shérif, producteur de gnole en ces temps de prohibition, spécialiste en arnaques en tous genres, tout ça sous des dehors de plouc fini. Classique parmi les classiques du polar humoristique, il fonctionne sur le principe de l’anticipation : Le lecteur sent venir le coup. Il rigole par avance, puis il rigole quand ça arrive, et il se prépare déjà à rigoler de nouveau pour l’arnaque suivante. Du grand art, indispensable pour tout amateur de polar déjanté.

Egalement une excellente nouvelle chez Rivages, la réédition d’un roman introuvable de Donald Westlake, Adios Schéhérazade, ou les tribulations d’un auteur de romans pornos en panne d’inspiration. Dans les mains d’un autre cela pourrait être vulgaire, pathétique et racoleur, dans celle du génial inventeur de Dortmunder c’est un pur régal.

Pour folio policier, leur site web est superbe et propose, outre le catalogue et les prévisions de parutions, de nombreux portraits d’auteurs et des critiques de libraires, ou amis de libraires (comme ma pomme …).

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17 août 2007 5 17 /08 /août /2007 19:08

J’avais déjà eu pas mal de mails me proposant de rapatrier quelques millions de dollars en liquide pour le compte du fils/fille/épouse/cousine d’un négociant/pétrolier/général  etc … Moyennant un pourcentage bien entendu. C’est la première fois que je reçois celle-là, qui témoigne d’un professionnalisme certain !

 

 

Ces arnaqueurs font preuve de tellement d’invention que j’espère que ça marche parfois. Et j’attends avec impatience que quelqu’un s’en empare pour écrire un polar.

 
 

Il est bien entendu que je cède mon lot au lecteur de ce blog qui le souhaite.

 

 

 

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Très Cher(e)  Lauréat(e),

 

A l'occasion de l'expansion de ses activités, la société d'épargne et de crédit (AFRIQUE PROJET FINANCE INTERNATIONAL) a organisé une tombola concernant toutes personnes résidant en Côte d'ivoire et toutes personnes vivant hors de la Côte d'ivoire ayant une boite électronique. Pour cette Tombola faite par la société d'épargne et de crédit (AFRIQUE PROJET FINANCE INTERNATIONAL)  la somme totale de 194.500 Euros ont décaissé et répartie comme suite :

 

-Le premier prix est une villa jumelée de 90. 000 Euros située à la Riviera Golf (Abidjan).
-le second prix, la somme de 50.000 Euros,

 

-le 3ème prix un montant de 29.000 Euros,

 

-le 4ème prix un montant de 15.000 Euros

 

-le 5ème prix un montant de 10.500 Euros.

 

A l'issue de cette tombola, vous avez été tiré(e) à la seconde place donc l’heureux (se) bénéficiaire de la somme de 50.000 Euros.

 

Si vous avez reçu ce message alors vous êtes la personne correspondante au numéro de code suivant: APF/TI 246 et ayant l'adresse électronique tirée au sort et qui fait de vous l’heureux (se) bénéficiaire des 50.000 Euros.

 

 
Nous vous prions de contacter de toute urgence l'huissier chargé de superviser cette tombola en la personne de Maître Konan Célestin à l'adresse électronique suivante : trinity.chamb@yahoo.fr qui est le cabinet désigné pour la circonstance. Lui faire parvenir les informations ci-dessous indiquées et aussi votre numéro de code gagnant afin de lui permettre de vous adresser la démarche à suivre pour vous faire parvenir votre gain.

 

 v      Nom et Prénoms

 

v      Adresse postale et téléphonique.

 

 Félicitation et Bravo.

 
 

v      IMPORTANT

 

 
Directeur Marketing

 

(APF INTERNATIONAL)

 

Mr Zamblé Gustave.

 

 

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16 août 2007 4 16 /08 /août /2007 20:21

Dans la presse, deux articles sur un auteur que j’avais totalement oublié Dan O’Brien, un de ces auteurs des grands espaces américains qui, le temps d’une lecture, font reculer nos murs et souffler dans nos appartements l’âpre vent des plaines.

C’est dans Télérama et dans l’Express, à propos de son dernier roman Les bisons du Cœur brisé publié au Diable Vauvert.

J’avais lu ses quatre premiers romans, sur les conseils d’un ami pour le premier. L’esprit des collines, polar classique dans sa trame (un ancien du Vietnam traque les assassins de son frère), mais éblouissant dans sa forme, par la puissance des descriptions, et le souffle épique et lyrique qui l’anime. J’ai en particulier le souvenir ému d’une histoire parallèle à celle du personnage principal, qui voit un vieux chasseur traquer le dernier loup de la région, c’était magnifique. Le suivant, Au cœur du pays, beaucoup plus sombre, retrace la lutte inégale de ranchers endettés mais attachés à leur terre contre un banquier résolu à racheter leurs terres. Un roman âpre, très émouvant dans sa description de la relation entre les ranchers et leur terre, superbe dans la peinture de la nature, jamais idéalisée mais rendue dans toute sa beauté mais également sa violence.

J’ai arrêté de le lire après Brendan prairie, où les convictions écologistes de l’auteur (parfaitement justifiées et respectables au demeurant), plombent le roman, le militant prenant le pas sur le romancier. Pour ceux qui aiment la nature, les grands espaces et la vie sauvage, Dan O’Brien qui, en plus de rancher et écrivain est également fauconnier, à écrit un beau récit d’initiation, Rites d’automnes, lié à son activité dans une association qui tente de réintroduire le faucon pèlerin.

J’essaierai sans doute le dernier, en espérant retrouver l’auteur qui m’avait tant touché.

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  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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