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18 novembre 2010 4 18 /11 /novembre /2010 23:14

Voici comme promis (voir commentaire ci-dessous), la série des John Rebus dans l’ordre. Je n’ai rien inventé, je l’ai pompée sur Wikipedia, où vous pouvez vous rendre pour plus de détails. Et comme je suis sérieux, j’ai aussi vérifié la liste sur le DILIPO de Claude Mesplède. Donc normalement, les informations sont dignes de confiance.

 

1. L'étrangleur d'Édimbourg.

2. Le Fond de l'enfer.

3. Rebus et le loup-garou de Londres.

4. Piège pour un élu.

5. Le Carnet Noir.

6. Causes Mortelles.

7. Ainsi saigne-t-il.

8. L'Ombre du tueur.

9. Le Jardin des pendus.

10. La Mort dans l'âme.

11. Du fond des ténèbres.

12. La Colline des chagrins.

13. Une dernière chance pour Rebus.

14. Cicatrices.

15. Fleshmarket Close.

16. L'appel des morts.

17. Exit Music.


Les anglophones peuvent également aller directement à la source, à savoir sur le site de l’auteur.

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17 novembre 2010 3 17 /11 /novembre /2010 22:51

Charlie Resnick revient (mais c’est vrai qu’il n’avait pas pris sa retraite), au même moment, John Rebus, le flic le plus tignous d’Edimbourg prend sa retraite, dans Exit Music de Ian Rankin.

 

RankinDix jours ! Pas un de plus. C’est ce qui sépare John Rebus de la retraite. Dans dix jours il ne sera plus flic. Et il ne pourra plus faire tomber Big Ger Cafferty, le caïd d’Edimbourg qu’il poursuit depuis presque trente ans. Une dernière occasion pourrait lui être donnée avec le meurtre d’un poète russe, particulièrement critique avec le régime et ses nouveaux oligarques, qui se trouvait en résidence en Ecosse. Juste avant sa mort, il a été vue en train de boire un verre avec Big Ger lui-même. Le caïd qui semble très copain avec un groupe d’hommes d’affaire russes en visite à Edimbourg. Les cibles privilégiées de la victime. Alors, le baroud d’honneur de Rebus ?

 

John Rebus part en beauté, dans un excellent épisode de la série. Style alerte, intrigues savamment entremêlées, peinture sans concession d’une Ecosse entièrement livrée au fric, aux banques, au mythe de la réussite économique comme seule valeur reconnue. Sous le vernis policé, c’est une société sans pitié que décrit Ian Rankin, où les riches et puissants font pression sur la police et la presse (Non ? Si !), où la revendication nationaliste est une façade pour mettre la main sur de nouveaux magots sous prétexte d’identité, où tous les faits et gestes sont filmés, archivés, dans le pays qui compte le plus de caméras de surveillance au monde. L’auteur a la dent dure, et ça fait du bien.

 

Le rock est toujours là, en soutien, et John piétine avec délectation les parterres bien arrangés des nouveaux riches, toujours cul et chemise avec les politiques, et plutôt bien avec la pègre, du moment qu’elle manipule beaucoup d’argent. Sa hargne fait merveille, le lecteur se réjouit de le voir envoyer chier la hiérarchie, mettre dans la mouise le nez d’un banquier arrogant, provoquer allègrement tous les gros bras qui pourraient pourtant l’écraser comme une mouche.

 

Même pas mal, même pas peur, incorruptible, capable d’être méchant comme une teigne, rétif à toutes les conventions imposées par le respect du fric, des chefs ou du politiquement correct, qu’est-ce qu’on l’aime ce Rebus. Ce Rebus qui parvient, parfois, à faire courber l’échine à tous ces infects pourris et intouchables qui, tous les jours, nous regardent du haut de leur fortune, avec morgue et mépris.

 

Merci John et Ian pour cette petite vengeance par procuration. Merci pour cet excellent épisode, à l’énergie réjouissante, et ce départ en beauté. Avant un retour sur les planches ?

 

Ian Rankin / Exit music (Exit Music, 2008), Le Masque (2010), traduit de l’anglais (Ecosse) par Daniel Lemoine.

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12 novembre 2010 5 12 /11 /novembre /2010 17:03

Cela faisait un moment que j’en avais entendu parler, un moment donc que j’attendais ce moment, le retour de Charlie Resnick, flic fétiche que John Harvey avait abandonné à la fin de Derniers sacrements. Et donc Charlie’s back, dans Cold in hand.

 

En rentrant chez elle Lynn Kellogg, collègue et maîtresse de Charlie Resnick s’interpose dans une bagarre Harvey Coldentre deux bandes rivales. Un des participants sort une arme, la blesse et tue la gamine qu’elle était en train d’appréhender. Le jour même, alors qu’elle est à l’hôpital, le père de la victime se répand dans les média prétendant qu’elle a utilisé sa fille comme bouclier humain. C’est Charlie qui se retrouve en charge de l’enquête, le tueur ayant pris la fuite sans être identifié. Dans le même temps Lynn s’inquiète pour une jeune femme Roumaine ayant accepté de témoigner contre son mac dans une affaire de meurtre. L’homme vient d’être libéré sous caution et tout laisse penser que la jeune femme est en danger …

 

Si vous êtes un habitué de ce blog, vous savez maintenant qu’en général les avis dithyrambiques en quatrième de couverture m’agacent prodigieusement. Je ferai un exception. « John Harvey est un maître », le Guardian, peut-on lire ici. C’est sobre, net, et ça résume parfaitement le sentiment que l’on éprouve à la lecture.

 

Personnages extraordinaires, saisis dans toute leur humanité, peinture sans concession et sans pitié d’une Angleterre ravagée par la crise : perte de repères et de valeurs, générations livrées au seul consumérisme et à l’individualisme, classe défavorisée totalement acculturée … Et Charlie, sa grande carcasse lourde, son jazz, ses chats, son amour pour Lynn. Comme souvent chez Harvey, à l’image d’un bon chorus de jazz, tout commence tranquillement, avec plusieurs histoires plus ou moins imbriquées. Harvey installe son rythme, son climat. Et puis bang ! accélération brutale, et grosse claque, pour une deuxième partie où l’intensité va croissante.

 

Le tout servi par une écriture fluide, comme une évidence. « John Harvey est un maître », vraiment. Jeanjean a aussi aimé … Et désolé de pomper son titre.

 

John Harvey / Cold in hand (Cold in hand, 2008), Rivages/Thriller (2010), traduit de l’anglais par Gérard de Chergé.


PS. Un détail, sans importance, mais en tant que toulousain je ne pouvais décemment pas laisser passer, page 72 : « Et un placage qui aurait fait la fierté de n’importe quel avant-centre de rugby l’envoya au sol. » Pour ceux (extrêmement rare j’en suis certain) qui trainent ici et n’ont aucune notion de rugby, sachez qu’il n’y a pas d’avant-centre au rugby. Au foot oui, au rugby non. Au rugby il y a des avants, des centres, mêmes un troisième ligne centre qui joue …avant, mais pas d’avant-centre. De deux choses l’une, soit John Harvey qui ne cause que de foot dans ses bouquins s’est raté, soit c’est le traducteur (excellent par ailleurs) qui s’est troué. C’est pas grave, mais c’est dit.

 

PPS. Pour tout savoir sur Charlie, j’ai déjà fait une partie du boulot.

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7 novembre 2010 7 07 /11 /novembre /2010 16:20

Ellory et les éditions Sonatine ont les faveurs des critiques et des lecteurs. Et j’avoue que je me sens un peu en dehors de cette unanimité. Une fois de plus avec Les anonymes, les dernier roman de R. J. Ellory. Explication.

 

elloryWashington. Catherine Sheridan est retrouvée chez elle, étranglée et tabassée. L'inspecteur Miller est en charge de l'enquête. Une enquête complexe, sur laquelle plane l'ombre d'un tueur en série. La police vient de faire le lien avec trois autres femmes, tuées de la même façon. Seul point commun entre les quatre victimes, elles semblaient n'avoir aucune vie privée : célibataires, sans amis, sans connaissances, sans famille. Sur place, aucun indice, si ce n'est une photo trouvée sous le matelas de la dernière victime. Sur cette photo, un homme mystérieux qui semble impossible à identifier. Quand Miller s'aperçoit que Catherine Sheridan vivait sous une fausse identité l'affaire devient encore plus opaque. Et il ne sait pas encore où il met les pieds.

 

Explication donc. Ellory choisit la forme du thriller procédural pour dénoncer les exactions américaines en Amérique centrale dans les années 80, ainsi que les liens entre les trafiquants de drogues et la CIA. Comment ce trafic manipulé, au départ, par les services secrets américains en échange d'hommes, d'argent et d'armes pour les contras au Nicaragua, échappe ensuite à tout contrôle pour devenir le monstre actuel. Parce que les sommes d’argent en jeu sont devenues titanesques, parce que beaucoup de gens puissants, y compris membres de la CIA, y gagnent trop pour vouloir arrêter, mais aussi parce que les victimes (pauvres, noirs ou latinos essentiellement) n’intéressent personne aux US. Le livre est documenté, le procédé de l'enquête des flics fonctionne, l'intrigue est prenante (malgré quelques longueurs quand même).

 

Pas mal donc. Alors pourquoi des réserves ? Justement, parce que « pas mal », mais sans plus. Le flic enquêteur met beaucoup, beaucoup trop de temps à s’apercevoir qu’il y a forcément une officine de renseignement derrière toutes les irrégularités commises. Et l’auteur n’arrive pas à me faire partager sa trouille. Il nous parle souvent de frissons dans la nuque, de sueur froides, il les décrit, mais je ne les ai pas ressentis …

 

Pas mal parce que, finalement, on n’apprend pas grand-chose. On sait que la CIA a été derrière la majorité des coups tordus, pour ne pas dire plus, en Amérique centrale et en Amérique du Sud. Quand on a grandi, comme moi, dans une famille communiste dans les années 70, on n’a pas attendu Ellory, ou les autres, pour savoir que les américains et leurs sbires, étaient derrière les saloperies en Argentine, au Chili, au Nicaragua, au Salvador …

 

Et surtout, tout cela résiste mal, très mal, à la comparaison avec La griffe du Chien, le chef-d'œuvre de Don Winslow qui traite du même problème. Il manque le souffle, la puissance narrative, l’impact émotionnel immédiat, dès la première scène qui laisse le lecteur sonné d’emblée. Il manque la force des personnages, l’indignation, le dégoût, la révolte viscéraux que l’on ressent à la lecture du Don Winslow.

 

Ce qui m’étonne, c’est qu’aucun des billets que j’ai lu ne fait cette comparaison. Normal peut-être pour les blogueurs, La griffe du chien étant passé malheureusement presque inaperçu à sa sortie (c’est un billet de Jean-Bernard Pouy qui me l’a fait découvrir). Moins normal pour les critiques …

 

Pour conclure, si vous avez aimé Les anonymes, si vous trouvez que c’est un chef-d’œuvre, un conseil, lisez La griffe du chien, vous ne le regretterez pas.

 

J. R. Ellory / Les anonymes (A simple act of violence, 2008), Sonatine (2010), traduit de l’anglais par Clément Baude.

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5 octobre 2010 2 05 /10 /octobre /2010 23:35

 

De temps en temps, cela fait du bien de se retourner vers les valeurs sures du polar anglais fait main. On a alors le choix, Nottingham ou Portsmouth, John Harvey, ou Graham Hurley. Ce coup-ci, c’est Portsmouth avec Du sang et du miel, de Graham Hurley.

 

Sur l’île de Wight, en face de Portsmouth un corps sans tête est rejeté sur le rivage. L’inspecteur Faraday, de la Hurleysection des crimes graves se retrouve en charge de l’enquête. Très rapidement les soupçons se portent sur Pelly, ancien soldat en poste en Bosnie, homme solitaire craint pour ses accès de violence et maintenant propriétaire d’une maison de retraite.

 

A Portsmouth, l’inspecteur Winter, connu pour ses méthodes peu orthodoxes s’attaque à un réseau de drogue s’adressant à quelques membres de la haute qui se pensent au-dessus des lois et fait connaissance de Maddox, une call-girl qu’il a du mal à cerner. Dans le même temps, il se débat avec une santé de plus en plus défaillante.

 

Du Graham Hurley comme on l’aime. Belle intrigue, solide et documentée (ou plutôt plusieurs intrigues qui se croisent), des personnages que l’on apprend à connaître de roman en roman, une magnifique galerie de personnages secondaires, tous fouillés avec la même attention … Rien qu’avec cela, on est assuré de le suivre avec grand plaisir tout au long de ses quelques 500 pages.

 

En prime, ces histoires servent toujours de toile de fond pour décrire la société anglaise, et plus précisément celle de Portsmouth, et ici de l’île de Wight. Impunité et arrogance des riches, traumatismes des dernières guerres (même si elles n’ont pas lieu sur le sol anglais), parallèle avec les traumatismes de toutes les guerres. Et pour illuminer une histoire bien sombre, de superbe pages sur une lumière de ciel d’orage, ou sur les oiseaux qu’observe Faraday.

 

Bref du cousu main, comme son frère littéraire John Harvey, vivement le prochain …

 

Graham Hurley / Du sang et du miel (Blood and honey, 2006), Folio/policier (2010), traduit de l’anglais par Philippe Rouard.

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6 septembre 2010 1 06 /09 /septembre /2010 22:24

Depuis que je vous fait languir … Voici donc le dernier David Peace, second roman consacré à la ville de Tokyo au lendemain de la fin de la guerre. Tokyo ville occupée.

 

Une petite note qui mérite une introduction. Ceux qui me connaissent, où qui ont lu certains commentaires ici même savent que je ne fais pas partie des admirateurs inconditionnels de David Peace. Ses romans, me semble-t-il, suscitent trois types de réactions :

 

Ceux qui adorent et le considèrent comme un des très grands noms du polar actuel.

Ceux qui détestent et ne comprennent pas qu’on puisse lui trouver le moindre talent.

Ceux qui lui reconnaissent un talent immense, sans toutefois arriver à rentrer dans son univers, et qui donc évitent ses livres.


Jusque là, je faisais partie de la troisième catégorie. La lecture de 1974 m’avait secoué, dérangé, mis mal à l’aise, et ne m’avait donné aucune envie de poursuivre la découverte de son univers. Récemment l’atypique 44 jours m’avait un peu réconcilié avec ses romans. Sa venue à Toulouse et la possibilité de le rencontrer m’ont servi de motivation pour lire son dernier ouvrage.

 

Fin de la longue introduction.

 

PeaceTokyo, ville occupée, 26 janvier 1948. Un homme entre dans une agence de la banque impériale juste après sa fermeture au public. Il se prétend médecin et demande à rassembler tous les employés, y compris le concierge et sa famille. Prétextant une épidémie de typhus, il convainc les 16 personnes d’avaler un médicament. Les 16 s’écroulent, 12 meurent empoisonnés, seuls 4 survivront. L’homme qui a pris tout l’argent disponible disparaît. Malgré une énorme mobilisation de la police de la ville, l’assassin n’est pas identifié. Des années plus tard un écrivain tente de rétablir l’innocence de celui qui sera condamné, malgré la faiblesse des preuves recueillies contre lui. Douze récits de personnes, vivantes ou mortes, touchées de près ou de loin par cette affaire tenteront de l’aider …

 

Voilà donc le roman qui m’a réconcilié avec David Peace. Et pourtant j’ai du mal à trouver les mots pour vous convaincre de le lire. Car c’est un roman difficile, un roman qui se mérite, qui se gagne, qui semble parfois vouloir se débarrasser de son lecteur … Mais roman qui donne beaucoup.

 

J’ai été happé, dès le prologue par le rythme hypnotique de la langue. J’ai même été à deux doigt de le relire à haute voix. C’est sans doute cet élan initial qui m’a permis de passer les obstacles que l’auteur met ensuite dans les pattes du lecteur.

 

Le récit est éclaté, scandé, lancinant, chaotique, répétitif ou d’une sécheresse totale au gré de la personne qui a la parole. Si l’auteur repose parfois le lecteur, et lui propose un chapitre à la narration relativement classique, c’est pour ensuite le submerger sous le flot décousu des pensées d’un homme complètement perdu … A l’image de cette ville qui oscille entre haine et admiration des vainqueurs.

 

Le tout forme peu à peu un tableau abstrait d’où émerge l’image d’une société en ruine, occupée, aliénée, ayant perdu tous ses repères … Un océan bouillonnant où nagent, décidés, quelques prédateurs prêts à la curée. Personne n’est épargné, ni vainqueurs américains ou russes, ni les japonais coupables des pires atrocités durant la guerre en Chine.

 

L’ensemble n’est pas aimable, pas agréable, mais sacrément impressionnant. On aime ou pas, on rentre dans le rythme ou pas, mais il est difficile de ne pas reconnaître la virtuosité de style, de langue, de construction, l’ampleur du propos, l’ambition du projet et la maîtrise de sa réalisation.

 

J’ai terminé le livre impressionné, admiratif et secoué. Et pour me remettre je crois que je vais passer à quelque chose de plus léger …

 

David Peace / Tokyo ville occupée  (Occupied city, 2009), Rivages/Thriller (2010), traduit de l’anglais par Jean-Paul Gratias.

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21 mai 2010 5 21 /05 /mai /2010 22:18

Quand j’ai vu annoncé dans les programmes des éditions Métailié un roman d’un certain Liam McIlvnney, j’ai fait un bond (un petit bond, mais un bond). Et je me suis précipité sur internet pour voir s’il avait un lien de parenté avec le grand (et trop méconnu) William McIlvanney. Il en a un, c’est son fils. C’est alors avec impatience que j’ai attendu Les couleurs de la ville, son premier roman traduit. Vous allez voir que, si le fils, à mon avis, ne vaut pas encore le père, ses débuts sont très prometteurs.

 

McIlvanneyGerry Conway est responsable de la rubrique politique au Tribune on Sunday, le journal de référence à Glasgow. Depuis quelques années il a misé sur Peter Lyons, jeune homme prometteur, déjà ministre de la justice et sur le point de devenir premier ministre. Mis quand un anonyme lui révèle des liens entre Lyons et les mouvements terroristes protestants d'Ulster, Gerry Conway voit l'occasion de marquer un grand coup et d'assurer son poste dans un journal en pleine restructuration. Son enquête va le mener jusqu'à Belfast, où même après des années de cesser le feu, la guerre est présente dans tous les esprits. Entre Glasgow et Belfast bien des surprises et bien des déconvenues attendent Gerry.

 

Débuts très prometteurs donc, même si j’ai une petite réserve. D’ailleurs commençons par là.

 

Je ne sais pas vraiment dire pourquoi, mais j'ai ressenti une certaine insatisfaction durant les deux premiers tiers du roman. Le genre de gêne difficile à décrire mais qui fait qu’on n’est pas forcément pressé de se remettre à la lecture, et qu’on se trouve, au moment d’ouvrir le bouquin, tout un tas de petites choses à faire (choses qu’on ignore complètement si, par exemple, on est plongé dans le dernier Deon Meyer, ou Antoine Chainas …). Peut-être un manque de profondeur des personnages secondaires, une certaine indifférence à ce qui leur arrive, une difficulté, parfois, à s'y retrouver dans leurs rôles à chacun, un certain flou dans la direction de l’histoire …

 

Fin de la réserve. Parce qu’à part cela, ce roman est très prometteur, comme annoncé plus haut.

 

Le fond est passionnant, surtout pour quelqu'un comme moi (et sans doute la plupart des lecteurs français) qui ne savais rien, ou pas grand-chose, des liens entre l'Ecosse et l'Irlande du nord, et des répercussions dans le vie politique écossaise de la guerre entre l'IRA et les paramilitaires unionistes. Le roman est bien construit, les informations arrivent de façon naturelle, sans que jamais l'auteur ne donne l'impression de faire un exposé, et sans jamais non plus perdre un lecteur peu au fait de cette histoire récente. On découvre tout un monde d’intolérance, de rancœurs, de guerres sourdes par procuration. On découvre qu’à Glasgow aussi il y a des querelles (pour ne pas dire plus) entre catholiques et protestants, que comme il y avait des circuits de trafic d’armes des US vers l’IRA il y en avait du Canada et d’Ecosse vers les unionistes …

 

Outre cette découverte, les séquelles physiques et psychologiques de la guerre d’Irlande du Nord sont palpables, comme dans certains romans de Ken Bruen et surtout d’Adrian McKinty, ce qui donne une vraie épaisseur au récit.

 

Pour les personnages, si certains, secondaires, sont peut-être un peu « bâchés », le personnage principal est bien campé et on sent que l’auteur connaît bien le fonctionnement des journaux, et en particulier de leur rubrique politique.

 

Dernier point positif, et non des moindres, la fin fait oublier les réserves et emporte tout dans une superbe succession de coups de théâtre (comme par hasard, je l’ai terminé d’un trait, sans pouvoir le refermer).

 

Un bon roman donc, très intéressant, auquel il manque peu de choses pour être une réussite totale.

 

Liam McIlvanney / Les couleurs de la ville  (All the colours of the town, 2009), Métailié (2010), Traduit de l’anglais (Ecosse) par David Fauquemberg.

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25 avril 2010 7 25 /04 /avril /2010 22:47

Quand j’ai appris, en musardant sur les blogs, qu’il y avait un nouveau Tim Willocks chez Sonatine, je me suis précipité. Il s’avère qu’il s’agit de Green River, le premier roman de l’anglais givré. Un coup d’essai, et déjà un « presque » coup de maître.

 

WillocksRay Klein, ancien médecin condamné pour un viol qu'il n'a pas commis se retrouve à purger sa peine à Green River, prison de haute sécurité au Texas. Le directeur, John Hobbes, certain qu'il a une mission, sombre peu à peu dans la démence et finit par déclencher une émeute raciale la veille de la libération de Klein. Alors que ce dernier n'a qu'une idée en tête, rester le plus possible à l'écart des événements, il ne peut s'empêcher de se trouver entièrement impliqué quand une partie des émeutiers s'en prend à l'infirmerie où se trouvent les malades qu'il a traité durant sa captivité, et Juliette Devlin, médecin psychiatre dont il est tombé amoureux. Qu'il le veuille ou non Ray va devoir plonger dans la mêlée, au cœur même de l'enfer.

 

Le principe du roman est simple, il relève de la thermodynamique la plus élémentaire : prenez un gaz, confinez le dans un récipient hermétique et rigide, élevez la température, la pression augmente. Prenez donc une population à fort pourcentage de psychopathes, enfermez-les, augmentez la température en exaspérant les antagonismes et, tout simplement, en coupant la clim … La pression augmente, jusqu’à l’explosion. Simple et imparable.

 

Si je n’avais encore rien lu de Tim Willocks j’aurais sans aucun doute été totalement enthousiaste. Mais ce n’est pas le cas. Et lire, après Bad city blues, Les rois écarlates et La religion ce premier roman montre tout le chemin parcouru, même si ces débuts étaient déjà très impressionnants.

 

On y trouve déjà les thèmes que l’on retrouvera par la suite : folie, violence extrême, relation à Dieu (pour le prier ou le nier), manipulation … Ils sont déjà là et bien là. Déjà l’auteur arrive à manipuler la dynamite sans qu’elle lui explose à la figure, à savoir nous plonger au cœur d’une violence éprouvante sans jamais faire de la surenchère gratuite ni nous donner l’impression d’être des voyeurs. Tout est justifié, à sa place, nécessaire au propos et à la structure narrative. Et ça secoue.

 

Sa seule faiblesse par rapport aux romans à venir réside dans quelques temps morts sous la forme de digressions un poil trop explicatives qui viennent (très légèrement, vraiment très légèrement) faire retomber le soufflet par moment. Encore une fois, venant d’un autre, je n’aurais aucune restriction. Mais j’attends maintenant beaucoup, énormément de Tim Willocks, et il est presque rassurant de vérifier qu’il n’a pas été immédiatement, dès son premier roman, totalement niveau des monuments à venir.

 

Ceci dit, ils sont nombreux ceux qui tueraient pour écrire un premier roman ayant une telle puissance.

 

Tim Willocks / Green river  (Green river rising, 1994), Sonatine (2010), Traduit de l’anglais par Pierre Grandjouan.

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11 mars 2010 4 11 /03 /mars /2010 21:34

Bon, me revoilà, à la bourre, fatigué, mais de retour. Et bien décidé à éponger le retard pris pendant ces derniers jours de voyage. Commençons donc par du solide, du beau travail, fait main … Traîtrises, du britannique Charles Cumming.

 

cummingHong Kong à quelques mois de sa rétrocession à la Chine. L'endroit grouille de diplomates, de curieux, de journalistes … et d'espions. Joe Lennox est l'un d'eux. Jeune, anglais, grand connaisseur de la Chine, il est promis à un brillant avenir. Comble du bonheur, il est éperdument amoureux de la belle Isabelle. Quand le professeur Wang parvient à trouver refuge dans l’enclave britannique après avoir, malgré son âge, traversé un dangereux détroit à la nage, Joe pense qu'il a là une occasion en or. Curieusement, alors qu'il n'a pu interviewer le transfuge qu'une poignée d'heures, ce dernier est littéralement enlevé par son supérieur de connivence avec Miles Coolidge, ami de Joe, émargeant à la CIA. Joe commence alors à se méfier de Miles. Jusqu'au jour de la passation de pouvoir, où Miles manœuvre pour lui enlever la femme de sa vie. Sept ans plus tard, Joe aura l'occasion de prendre sa revanche en démasquant le complot ahurissant mené par l’américain et quelques faucons du Pentagone visant à déstabiliser la Chine.

 

Le roman d'espionnage est bien une spécialité britannique. Cet écossais, qui si l'on en croit la quatrième de couverture sait de quoi il cause, en est une nouvelle démonstration. Certes on peut peut-être chipoter en disant que l'écriture n'est pas d'une folle originalité. Mais force est de reconnaître que, à l'image du maître Le Carré, ou d'un Henry Porter, Charles Cumming excelle dans l'art de nous faire vivre le monde de l'espionnage de l'intérieur. Interview de transfuge, filatures, mesures de précautions, rendez-vous tordus, fabrication de couvertures … tout y est, tout sonne vrai.

 

Même choses pour les personnages bien campés, crédibles, attachants ou agaçants, en un mot, vrais. Et puis il y a le fond, avec cette passionnante description des manigances américaines et britanniques autour de la Chine : cynisme absolu des décisions, poids grandissant de l'argent et des grosses firmes, utilisation des hommes comme des pions …

 

La période considérée, entre le changement de statu de Hong Kong et la préparation des JO de Pékin, avec une Chine de plus en plus arrogante, des services d’espionnages américains complètement désorganisés par le 11 septembre, et les doutes, pour ne pas dire plus, des services secrets anglais quant à la justification de la guerre en Irak, est particulièrement riche, et propice à de multiples surprises et rebondissements.

 

Pour finir, on a droit à une belle description de l'orient réel et fantasmé, d'hier et d'aujourd'hui, vu au travers des yeux d'un européen. Bref, une réussite.

 

Charles Cumming / Traitrises  (Typhoon, 2010), Le Masque (2010), Traduit de l’anglais par Johan-Frédérik Hel Guedj.

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19 septembre 2009 6 19 /09 /septembre /2009 14:20

On ne peut pas dire que je m’y prenne dans l’ordre, mais je vais quand même y arriver. Après le choc de la Religion, j’étais curieux de lire les polars de Tim Willocks. Mais je m’y suis mal pris et je finis donc par Bad city, qui vient pourtant avant Les rois écarlates.

 

Une ville de Louisiane écrasée par la chaleur humide du mois d’août. Callilou, ex prostituée, camée, femme d’un pasteur télévangéliste s’est associée avec Luther, un ancien du Vietnam et quelques truands pour dévaliser la banque où son mari a des responsabilités. Elle s’apprête maintenant à doubler tous ses associés avec l’aide de Cicero Grimes, un psy complètement déjanté. Cicero est le frère de Luther, et il a juré de le tuer. Comme si les choses n’étaient pas assez compliquées, Clarence Seymour Jefferson, flic colossal, brillant, sadique et complètement allumé, est mis au courant par hasard et décide d’entrer dans la danse. Une danse mortelle qui ne peut s’achever que par un bain de sang.

 

La vache. Quand on est lecteur de polar, on a forcément vu son comptant de fous furieux, de sadiques, de flics immondes, de tueurs déjantés … Mais même comme ça, les personnages de Tim Willocks sortent vraiment du lot. A commencer par le personnage extraordinaire de Clarence Jefferson qui constitue un des méchants les plus réussis mais également des plus ambigus de la planète polar qui en compte pourtant quelques-uns.

 

Bad city blues est d’une noirceur, d’une folie, d’une violence rarement égalées. Et pourtant l’auteur réussit le miracle de ne jamais donner l’impression de faire du sensationnel, de racoler, d’en rajouter pour accrocher le voyeur. Il est impressionnant de voir comme il maîtrise ses personnages, sa narration et mène le lecteur par le bout du nez, l’amenant où il veut sans lui laisser jamais la possibilité de le lâcher ; comme il impose violence, folie et noirceur sans jamais rebuter. Du grand art.

 

Tim Willocks / Bad city blues, (Bad city blues, 1991) Points (2007), traduit de l’anglais par Elisabeth Peellaert.

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Présentation

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  • : Il sera essentiellement question de polars, mais pas seulement. Cinéma, BD, musique et coups de gueule pourront s'inviter. Jean-Marc Laherrère
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